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Législatives en France: le Nouveau Front populaire crée la surprise et sort en tête devant les macronistes et le RN

L'alliance de gauche du Nouveau Front populaire est sortie en tête du deuxième tour des élections législatives dimanche, devant les macronistes et le Rassemblement national dont la progression est largement endiguée. Le NFP décroche 180 sièges, selon les résultats définitifs du ministère de l'Intérieur.

L'immense surprise de ce second tour a estomaqué tous les Français. Les résultats définitifs placent la gauche en tête avec 180 députés. Les 180 sièges de la gauche se répartissent comme suit: La France Insoumise décroche 71 sièges à l'Assemblée nationale, le Parti socialiste 64 sièges, les Ecologistes-EELV 33, le Parti communiste français 9 et d'autres formations de gauche, qui se répartissent les trois derniers sièges. Le "front républicain", bâti entre les deux tours de ce scrutin pour limiter la vague RN qui devait déferler dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, semble donc avoir porté ses fruits, après 210 désistements de candidats du camp présidentiel ou de gauche.

Le camp présidentiel (intitulé "Ensemble, ndlr), obtient 162 sièges. A savoir, 98 sièges pour Renaissance, 34 pour le MoDem, 26 sièges pour Horizons et 4 sièges étiquetés "Autres". Le camp macroniste résiste, même s'il perd des sièges. Le pari de la dissolution lancé par Emmanuel Macron il y a un mois, au soir d'une lourde défaite aux européennes (14,6%), aurait pu se solder par une déroute bien plus importante.

Le Rassemblement national de Marine Le Pen et Jordan Bardella, allié à certains membres des Républicains, décroche 143 sièges. C'est-à-dire 126 sièges pour le Rassemblement national et 17 sièges pour le Rassemblement national-LR.

Les Républicains et alliés obtiennent 67 sièges. Dans le détail, il s'agit de 39 sièges pour Les Républicains, 25 sièges pour Divers droite et 3 sièges pour l'Union des démocrates et indépendants.

Restent 25 sièges dont les élus sont de tendance politique diverse. A savoir 12 sièges pour les Divers gauche, 10 sièges pour le parti Régionaliste, 2 sièges pour Divers centre et 1 siège pour Divers.

Mélenchon demande le départ d'Attal

Au RN, c'est la déception. Certes, le parti à la flamme engrange de nouveaux élus, avec 143 députés, contre 89 en juin 2022, soit "la percée la plus importante de toute son histoire", a revendiqué Jordan Bardella. Mais il voit s'évaporer le rêve de hisser son jeune patron de 28 ans à Matignon, porté par une majorité absolue qui lui semblait atteignable au soir du premier tour. Une victoire attendue qui devait ouvrir la voie à la conquête du pouvoir pour Marine Le Pen en vue de la présidentielle de 2027. 

"Notre peuple a clairement écarté la solution du pire", a pour sa part lancé le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, triomphant. "Le Premier ministre (Gabriel Attal) doit s'en aller" et le NFP doit "gouverner", a-t-il ajouté. 

Mais avec une alliance hétérogène allant de LFI à Place publique, avec notamment le retour à l'Assemblée de l'ancien président François Hollande, élu en Corrèze, beaucoup de questions restent en suspens sur les rapports de force à gauche.

La tripartition jette en effet la France dans le brouillard, au terme d'un scrutin qui a fortement mobilisé les électeurs avec une participation de 67%, la plus forte depuis 1997. Car faute d'atteindre la barre de 289 députés, ou même de s'en approcher, aucun bloc ne semble en mesure de composer seul un gouvernement.

Emmanuel Macron a d'ailleurs rapidement appelé à la "prudence", les résultats ne répondant pas à la question de "qui pour gouverner ?, selon son entourage, qui souligne que le bloc central "est bien vivant"

En attendant les intenses tractations à venir, plusieurs scénarios, tous inédits sous la Ve République, se dessinent.

Coalition inédite en vue ?

Les partis de gauche et le camp macroniste trouveront-ils un improbable accord politique, après deux ans à ferrailler contre la réforme des retraites ou encore la loi immigration ?

Quelle place dans le prochain dispositif pour Jean-Luc Mélenchon, dont la suprématie à gauche pourrait désormais être contestée par un Parti socialiste revigoré? 

Face à une "Assemblée divisée", "il va falloir se comporter en adulte", a déjà prévenu Raphaël Glucksmann, le patron de Place publique qui s'était frontalement opposé à Jean-Luc Mélenchon lors de la campagne des européennes du 9 juin. Le Premier secrétaire du PS Olivier Faure a, lui, appelé le NFP à "refonder un projet collectif".

A trois semaines de l'ouverture des Jeux olympiques, qui propulseront la France sous les projecteurs du monde entier, le pays pourrait aussi s'orienter vers l'hypothèse d'un gouvernement technique, comme celui qui avait sauvé l'Italie de la crise de la dette en 2011. A condition de parvenir à un consensus sur des personnalités.  

Dans des conditions si floues, Emmanuel Macron pourrait aussi être amené à temporiser alors que Gabriel Attal s'est déclaré disponible pour assurer la continuité de l'Etat "aussi longtemps que nécessaire".

Le chef de l'Etat, qui s'est offert son traditionnel bain de foule dimanche au Touquet après son vote, sort affaibli de cette séquence d'un mois, malgré le résultat honorable de son camp, avec notamment la réélection de Gérald Darmanin. 

La campagne éclair des législatives se sera déroulée dans une atmosphère tendue, marquée par des nombreuses agressions de candidats et militants, révélatrices d'une France à cran et divisée.

Crever l'abcès

Mais Emmanuel Macron aura-t-il "réussi à crever l'abcès" du RN, comme l'espère un de ses intimes ? Et parviendra-t-il à préserver l'unité de sa propre majorité alors que se profile déjà l'échéance de 2027 pour laquelle plusieurs ténors, à commencer par l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, nourrissent de hautes ambitions ?

Attendu mercredi au sommet de l'Otan, le chef de l'Etat devra en tous cas s'employer à rassurer les partenaires et les milieux financiers sur la stabilité de la France.

La semaine qui se profile va aussi produire son lot d'âpres négociations pour les postes clés à l'Assemblée, avant l'ouverture le 18 juillet de la 17e législature de la Ve République qui débutera par l'élection à la présidence, puis la constitution des groupes politiques.

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