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Jérémy, victime d'agression homophobe via une application de rencontre, met en garde: "J’ai reçu un coup-de-poing, j’étais en black-out"

Jérémy (prénom d'emprunt) s'est laissé tenter par l'application de rencontre "Grindr" pour les LGBTQIA+. Malheureusement, ce qui devait être une rencontre plaisante s'est transformé en un véritable cauchemar.

Jérémy (prénom d'emprunt) se souvient de son agression dans les moindres détails. Il nous raconte sa mésaventure via le bouton orange Alertez-Nous.

Tout a commencé par des messages échangés sur Grindr, une application de rencontre pour la communauté LGBTQIA+. Il y a trois semaines, le jeune homme se rend dans le centre-ville de Liège pour faire la fête.

"Avant d’y aller, j’ai chatté avec un gars sur Grindr. Il fêtait son anniversaire dans la même boîte, donc il a voulu qu’on fasse connaissance. On s’est rencontrés là-bas, dehors, et je l’ai présenté à mes meilleurs amis pour être en sécurité. Je sais qu’il faut se méfier avec Grindr", raconte-t-il. "Tout s’est bien passé, on a même dansé ensemble sur la piste."

Je me suis tourné et j’ai reçu un coup de poing

Vers cinq heures du matin, tout bascule. Jérémy sort de la boîte pour rejoindre sa nouvelle rencontre. En pleine rue, une amie de cette dernière l’agresse violemment : "À un moment donné, la fille nous a suivis. Je me suis tourné et j’ai reçu un coup de poing. La fille s’est ensuite assise sur moi et m’a mordu l’oreille droite et les lèvres. J’ai ensuite été conduit à l’hôpital... J’ai une entorse à la cheville, je n’arrive pas bien à marcher."

"Il n’y a même pas eu d’insultes, c’était directement des coups, j’étais en black-out", ajoute-t-il. "Quand elle s’est levée, j’ai essayé de me défendre, mais elle a fui pour se réfugier dans la boîte de nuit."

"Maintenant, je me méfie trop"

Encore sous le choc et en convalescence, Jérémy souhaite mettre en garde les nouveaux utilisateurs des applications de rencontre : "D’habitude, je prends le temps de parler avec la personne avant de la rencontrer. Mais ici, tout est allé très vite. (...) Avant, je n’étais pas méfiant. Maintenant, je me méfie trop."

"J’ai même désinstallé Grindr", confie-t-il. "Il y a des gens qui vont t’envoyer des photos qui ne sont pas les leurs, ou bien des mineurs qui se font passer pour des personnes majeures. Pour le moment, je ne conseille pas cette application. Ce n’est pas sûr."

Des outils "idéaux" pour les personnes mal intentionnées ?

Grindr semble réunir tous les atouts requis pour quelqu'un de mal intentionné : c'est gratuit, rapide, permet de chatter et de géolocaliser quelqu'un anonymement. Mais est-ce vraiment si facile d'y faire des rencontres ? 

Grindr ne fournit aucune garantie quant à la conduite, à l’identité, aux intentions, à la légitimité ou à la véracité des utilisateurs

Nous avons mené l'expérience. Après avoir téléchargé l'application et encodé une adresse mail, notre compte est créé. Dans la liste des conditions d'utilisation, une ligne perdue parmi les autres, précise brièvement que "Grindr ne fournit aucune garantie quant à la conduite, à l’identité, aux intentions, à la légitimité ou à la véracité des utilisateurs".

Un profil avec un nom quelconque, sans aucune photo... Pourtant, quelqu'un a bel et bien mordu à l'hameçon. Il ne faudra pas plus de deux minutes pour obtenir un rendez-vous et une adresse personnelle.

Quelles solutions ? 

Selon l'ASBL Ex Aequo, il s’agit d’un mode opératoire de plus en plus utilisé par les agresseurs. Cependant, certifier l’identité des utilisateurs de ce genre d'application ne serait pas nécessairement la solution idéale.

"En tant qu’association, on a des contacts avec Grindr, mais de là à leur demander de changer les conditions d’utilisation, c’est très compliqué parce qu’on tombe dans un possible fichage des homosexuels", affirme Stephen Barris, coordinateur de l'ASBL. "Pour des applications qui ont une portée mondiale, alors qu’il y a une soixantaine de pays qui pénalisent encore l’homosexualité, c’est très dangereux".

Nous brisons les barrières entre les victimes et la police

En 2023, la police de Liège n'a reçu qu'une dizaine de plaintes pour agression homophobe. D'innombrables faits ne sont pas rapportés, raison pour laquelle la zone de police a désigné des personnes référentes. Objectif ? Instaurer un climat de confiance afin que les personnes issues de la communauté LGBTQIA+ se sentent en sécurité. 

"Ce que nous faisons à travers nos actions, est de briser les barrières entre les victimes et la police. En personnalisant l’accueil, ils sont accueillis de manière positive, sans être jugés", confirme Constantin Xyngakis, référent LGBTQIA+ à la police de Liège.

Ce dernier souligne l'importance d'un dépôt de plainte : "Les plaintes servent à mener une enquête, à informer le parquet. (...) Sans plainte, il n’y a pas d’action".

Pour prévenir les agressions sur les applications, il est conseillé de demander le numéro de téléphone de son interlocuteur, d’effectuer un appel vidéo avant la rencontre et d’organiser le rendez-vous dans un lieu public.

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