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Ça y est, depuis 11h17, ce mardi 16 avril, la flamme olympique est allumée et brillera jusqu’à la fin des Jeux olympiques de Paris, le 11 août prochain. La cérémonie à Olympie, inspirée par les traditions antiques, précède le traditionnel relais. Origines, logistique, symbolique,… Voici tous les secrets de la flamme olympique.
La "grande prêtresse", vêtue d'une longue robe claire inspirée par la Grèce antique, allume la torche dans le sanctuaire d'Olympie, devant les ruines du temple d'Héra, vieilles de 2600 ans. Le rituel a eu lieu, presque, selon la tradition, après deux ans d'absence dû au Covid. Cette fois-ci, ce ne sont pas les rayons de l'étoile qui ont permis l'allumage, faute de soleil. Mais le moment reste tout aussi solennel.
Ce rituel, n'est en vérité pas si ancien. La flamme olympique non plus. "Ce sont des innovations qui ont été prises dans le courant du XXᵉ siècle", révèle Gilles Goetghebuer, rédacteur en chef des magazines Zatopek et Sport et Vie.
L'origine nazie de la flamme olympique
La flamme n'a été allumée pour la première fois que le 28 juillet 1928, lors des jeux d'Amsterdam. Il n'y avait pas encore de relais. Il faudra attendre les Jeux de 1936… en Allemagne nazie. "Ces Jeux devaient montrer la grandeur du régime nazi au monde. Donc c'est là qu'a été prise cette initiative d'allumer la torche aux rayons du soleil d'Olympie et de l'amener en courant jusqu'à Berlin", admet Gilles Goetghebuer.
L'idée est attribuée à Carl Diem, qui était le secrétaire général du comité olympique allemand, et qui s'inspirait, vraisemblablement, des lampadédromies organisées en Grèce antique. Mais le projet plaît à Joseph Goebbels, le ministre de la Propagande du IIIème Reich : le cérémonial s'intègre bien dans la stratégie visant à se réapproprier des codes de l'Antiquité gréco-romaine pour soutenir l'idéologie national-socialiste en établissant des liens historiques entre ces deux périodes.
Ils ont trouvé que c'était du plus bel effet, cette flamme qui traversait l'Europe. Et donc on a reproduit l'initiative pour les éditions suivantes
Comment cette tradition a-t-elle subsisté, malgré son origine délicate ? "Les Jeux de Berlin ont été une grande réussite. C'est un peu paradoxal de le dire avec le recul, mais tout le monde en était revenu charmé par l'organisation et par la popularité de ces Jeux. Et donc ils ont trouvé que c'était du plus bel effet, cette flamme qui traversait l'Europe. Et donc on a reproduit l'initiative pour les éditions suivantes", répond l'expert.
Loin de l'idéologie nazie, le symbole de la flamme a bien évolué. Ce mardi, le président du Comité international olympique (CIO), l'Allemand Thomas Bach, a insisté sur le message d'"espoir" que porte la flamme olympique, symbole de paix dans l'Antiquité, dans un climat international marqué notamment par les conflits en Ukraine et au Proche-Orient : "Dans notre cœur à tous, nous aspirons à quelque chose qui nous rassemble à nouveau, à quelque chose qui nous unifie, à quelque chose qui nous donne de l'espoir", a-t-il souligné.
Le déroulé du relais de la flamme
Depuis lors, la tradition est donc, après avoir allumé la torche à Olympie, de courir jusqu'à Athènes, au stade de Panathinaïkos qui a accueilli les Jeux de 1896. Cette partie est habituellement confiée au Comité Olympique grec.
Pour cette édition, c'est le champion olympique grec d'aviron Stefanos Ntouskos qui a été le premier porteur de la flamme. Il l'a ensuite remise à la nageuse française Laure Manaudou.
Une fois arrivée, après 9 jours, la torche est remise au Comité d'organisation des Jeux Olympiques (COJO) du pays hôte. Cette fois-ci, elle embarquera à bord du mythique Belem, pour traverser la mer Méditerranée. Elle rejoindra Marseille le 8 mai 2024. L'épopée de la Flamme Olympique pourra enfin débuter en France.
Tous les porteurs de la flamme, se sentent concernés par l'événement
"Cette opération, a quand même quelques intérêts. Elle permet de conscientiser les gens. Dans tous les territoires traversés, par exemple, tous les porteurs de la flamme, se sentent concernés par l'événement et sont même souvent assez fiers de porter cette flamme", justifie Gilles Goetghebuer.
Le comité organisateur motive le relais à travers la France en quatre points :
- Mettre la lumière sur l’Histoire de France et ceux qui l'ont écrite
- Mettre la lumière sur le patrimoine naturel
- Mettre la lumière sur la créativité et les savoir-faire français
- Mettre la lumière sur les émotions et l'Énergie collective du sport
Concrètement, pour y arriver, la flamme passera par 400 villes, en 65 étapes, entre le 9 et le 26 juillet. Elle passera par des lieux emblématiques du pays. Depuis Brest, elle prendra même un bateau pour rejoindre les Antilles. Après neuf jours sur place, elle retournera en métropole.
Les voyages en bateau de la flamme n'étonnent personne, car elle a vu pire."Il y a eu des transports par avion, forcément, quand on organise les Jeux olympiques en Amérique du Nord ou en Asie. Aux Jeux de Sotchi, la flamme a voyagé en vaisseau Soyouz, pour montrer aussi la technologie russe dans l'exploration de l'espace. Chacun profite de l'événement pour mettre en avant ses atouts technologiques", note Gilles Goetghebuer.
L'espace, à bord de la navette Columbia, la Grande barrière de corail, grâce à des plongeurs, le sommet de l'Everest… tout semble permis pour impressionner le monde entier.
11.000 relayeurs... qui sont-ils?
La grande aventure de la flamme olympique est assurée par les relayeurs. Athlètes, célébrités, citoyens,… chaque pays organisateur s'occupe de sa sélection. La France en a sélectionné près de 11.000. Le comité d'organisation et le mouvement sportif s'en sont occupés, ainsi que les parrains du relais de la flamme BPCE et Coca-Cola.
Parmi les personnalités retenues, notons Jamel Debbouze, l'astronaute Thomas Pesquet ou le chef Thierry Marx.
Chaque relayeur portera la flamme pendant environ quatre minutes sur une distance de 200 mètres.
Un parcours sous haute sécurité
Le relais se passe, cela dit, toujours sous une haute sécurité. "Pour beaucoup d'activistes, là je pense à des mouvements écologistes ou peut-être des agriculteurs en colère,… beaucoup de personnes aimeraient bien manifester leur colère par rapport à telle ou telle thématique en éteignant la flamme", note Gilles Goetghebuer.
Ce ne sera pas la première fois. Le passage de la flamme a été plusieurs fois perturbé, particulièrement en 2008, à Londres, Paris ou San Francisco, par des militants anti-chinois qui dénonçaient la politique de Pékin au Tibet.
On aura certainement des images de groupements d'activistes qui essayeront d'éteindre la flamme
"C'est presque devenu un sport pour les activistes et les militants d'éteindre la flamme pour faire parler d'eux. J'imagine que dans les jours et dans les semaines qui viennent, on aura certainement des images de groupements d'activistes qui essayeront d'éteindre la flamme", estime notre spécialiste des JO.
Cette fois-ci, la sécurisation du parcours est assurée par les services de l'Etat. Elle devrait coûter près d'un million d’euros. À Marseille, où 150.000 personnes sont attendues, 5.000 policiers et gendarmes seront mobilisés. Dans Paris, ils seront 1.600.
C'est là que la flamme terminera son long voyage. La cérémonie d'ouverture devrait avoir lieu le long de la Seine, mais la menace terroriste fait planer le doute. Le président français Emmanuel Macron a évoqué un plan B, "limité au Trocadéro et pas toute la Seine", voire un plan C, "dans le stade de France", dit-il aux journalistes.
Il y a toujours un petit suspens pour savoir qui sera l'ultime porteur
Quoi qu'il en soit, "l'honneur suprême, c'est évidemment d'être le dernier porteur de la flamme", ajoute Gilles Goetghebuer. "Et alors là, c'est un secret. Évidemment, ce nom est divulgué à la dernière minute et il y a toujours un petit suspens pour savoir qui sera l'ultime porteur (...) on aura certainement un très grand nom du sport qui sera dernier porteur ou dernière porteuse de la flamme", pronostique-t-il.
Avant de le savoir, le 26 juillet, il reste le temps d'apprécier les nombreuses surprises qu'offrira l'épopée de la flamme olympique durant deux mois et demi.