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Avec sa réélection, Trump pourra-t-il échapper à la justice ?

Depuis la fin de son mandat en 2020, l’ancien président a été confronté à une avalanche de convocations judiciaires. Que ce soit au civil ou au pénal, le milliardaire continue d’être impliqué dans plusieurs affaires judiciaires. La véritable question est désormais de savoir si son retour à la présidence lui offrira une protection face à ces procédures.

Âgé de 78 ans, le républicain, fraîchement élu 47e président des États-Unis, demeure toujours sous le coup de quatre affaires judiciaires. Donald Trump est par ailleurs le premier président de l’histoire des États-Unis à avoir été condamné dans une affaire pénale.

  • Affaire Stormy Daniels

En 2016, peu avant l’élection présidentielle, Donald Trump aurait versé environ 130 000 dollars à Stormy Daniels, une actrice de films X, pour la dissuader de révéler une liaison qu’ils auraient entretenue dix ans auparavant, alors qu'il était marié à Melania Trump. Ce paiement, dissimulé dans les comptes de la Trump Organization, a donné lieu à des accusations de falsification de documents commerciaux.

En avril 2024, Trump a été inculpé de 34 chefs d'accusation pour falsification de documents commerciaux, et en mai, il a été reconnu coupable de tous les chefs d'accusation. Le prononcé de la peine, initialement prévu avant l’élection, a été reporté au 26 novembre 2024. En théorie, Donald Trump encourt une peine pouvant aller jusqu’à quatre ans de prison.

  • Affaire des documents classifiés à Mar-a-Lago

Après avoir quitté la Maison-Blanche, Donald Trump a emporté plusieurs documents classifiés dans sa résidence de Mar-a-Lago en Floride, malgré une loi de 1978 qui interdit ce type de pratique. Il n’en a restitué qu’une partie, ce qui a conduit le FBI à perquisitionner sa résidence en août 2022, où 11 000 documents supplémentaires ont été retrouvés.

En juin 2023, il a été inculpé pour rétention illégale d’informations de défense nationale et pour obstruction à la justice, suite à son refus de restituer ces documents aux Archives nationales. Le procès, initialement prévu pour mai 2024, a été reporté indéfiniment en raison de procédures préliminaires complexes et de l’annulation de la procédure par une juge en juillet 2024, une décision qui fait l’objet d’un appel.

  • Tentative de renversement des résultats de l'élection de 2020 en Géorgie

L’affaire porte sur les tentatives de Trump pour inverser les résultats de l’élection présidentielle de 2020 en Géorgie. La presse avait ainsi révélé un enregistrement dans lequel le milliardaire demandait au secrétaire d’État de Géorgie de "trouver" les voix manquantes pour garantir sa victoire. En août 2023, il a été inculpé pour ingérence dans le processus électoral en Géorgie. Pour le moment, la date du procès n’a pas encore été établie.

  • Assaut du Capitole

Toujours dans sa tentative de renverser les résultats de l’élection présidentielle de 2020 remportée par Joe Biden, Donald Trump a franchi un nouveau cap. Le 6 janvier 2021, ses partisans, galvanisés par son discours, ont pris d’assaut le Capitole pour contester les résultats de l'élection présidentielle. Cette insurrection a causé la mort de dix personnes et fait une centaine de blessés.

Pour ces événements, Donald Trump a été inculpé par la justice fédérale en août 2023 pour complot contre les États-Unis et obstruction à une procédure officielle. Un procès était initialement prévu en 2025, mais il est peu probable qu'il ait lieu maintenant que le républicain est de retour dans le Bureau ovale.

Trump est-il devenu intouchable ?

En tant que chef de l’exécutif, Donald Trump disposera d’une certaine influence sur la justice fédérale, ce qui pourrait rendre difficile une condamnation à ce niveau. "En étant président, il peut avoir du poids sur la justice fédérale, et ce sera probablement difficile de le condamner au niveau fédéral", précise Serge Jaumain, professeur d'histoire contemporaine à l'ULB et spécialiste des États-Unis.

Concrètement, Trump aurait la possibilité de nommer un nouveau ministre de la Justice qui licencierait le procureur spécial Jack Smith, désigné par le ministre de la Justice démocrate Merrick Garland pour superviser les deux dossiers fédéraux : l'assaut du Capitole et la rétention de documents classifiés. Une démarche qui "mettrait fin aux procédures fédérales en cours, car il est peu probable que son successeur les reprenne." Le milliardaire pourrait également simplement ordonner à son ministère de la Justice d’abandonner les poursuites.

Influence limitée au niveau des États

En revanche, l’influence de Trump ne s’étend pas aux procédures judiciaires menées au niveau des États. "Les affaires qui relèvent des États, comme celles en Géorgie, échappent à son contrôle direct, et donc il pourrait être poursuivi à ce niveau", explique le professeur de l'ULB. "Mais on peut penser que les juges seront relativement prudents par rapport au président des États-Unis, car on n'a jamais connu une situation comme celle que l'on connaît aujourd'hui."

Si Trump venait à être condamné dans un État, il aurait la possibilité de faire appel dans le système judiciaire de cet État, puis, si nécessaire, de porter l'affaire devant la Cour suprême des États-Unis, qui aurait alors la tâche de décider du sort d’un président condamné. Et là encore, Trump ne risquerait pas grand-chose : "On sait que la Cour suprême est évidemment très favorable à Donald Trump puisqu'il a lui-même nommé trois des juges", indique-t-il.

En outre, la Cour suprême des États-Unis a statué en juillet que Donald Trump bénéficiait d’une immunité absolue contre les poursuites pénales pour les actions officielles menées durant son mandat. Cependant, cette protection ne s’applique pas aux actes non officiels. "Il y a une grosse discussion pour savoir si l’assaut du Capitole, pour lequel Trump est poursuivi, peut être interprété comme relevant de ses fonctions", précise-t-il.

Il y a très peu de chances de voir Donald Trump finir en prison

Pour autant, même si les procédures d’État se poursuivent, une peine sévère pour Trump paraît improbable. "Il y a très peu de chances de voir Donald Trump finir en prison", reconnaît l'historien. "Pour autant, il n'est pas complètement libéré de ses ennuis judiciaires, mais on peut dire que globalement, c'est évidemment une bonne nouvelle pour lui d'avoir été élu, pas seulement pour devenir président des États-Unis, mais aussi parce que ça risque effectivement de lui permettre de mettre ses ennuis judiciaires de côté."

À l’instar d'autres pays, le président des États-Unis dispose du pouvoir de gracier des individus pendant son mandat. Trump avait largement utilisé cette prérogative en fin de mandat, accordant des grâces à des proches et à des personnalités influentes. Reste toutefois la question : pourrait-il se gracier lui-même ? "On n'a jamais eu ce cas de figure dans l'histoire des États-Unis. Certains juristes estiment que oui, c'est tout à fait possible", conclut Serge Jaumain.

Pour rappel, Donald Trump a déjà fait l'objet de plusieurs enquêtes judiciaires au cours de son premier mandat. Notamment, une investigation menée par le procureur spécial Robert Mueller a examiné les liens potentiels entre son équipe de campagne et la Russie lors de l'élection présidentielle de 2016. Le rapport final, publié en 2019, a conclu qu'il n'y avait pas de preuves suffisantes pour établir une collusion entre l'équipe de Trump et le gouvernement russe, même si l'ingérence de la Russie dans le processus électoral américain a bel et bien été confirmée.

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