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Tous les sondages donnent le Rassemblement National de Jordan Bardella en tête au premier tour des élections législatives anticipées en France. Le parti d’extrême droite peut-il vraiment réussir à passer cette fois?
En France, il ne reste plus que deux semaines de campagne avant les élections législatives. Toutes les projections en siège placent le Rassemblement National en tête. Hier, son chef de file, Jordan Bardella, a prononcé une déclaration solennelle, un peu comme s'il était déjà Premier ministre. La question est simple: est-ce que les jeux sont déjà faits?
Les chiffres sur base des élections européennes sont sans appel. Le Rassemblement national est arrivé en tête dans 457 circonscriptions sur les 577 que compte la France. Les Insoumis dans 48, les Macroniens 39, les Socialistes 30, les Républicains 2 et Marion Maréchal 1. Sur base de cette étude, l'Assemblée nationale va être submergée par une vague bleu marine, sauf que ces chiffres ne sont pas à prendre au pied de la lettre.
En France, les élections européennes et législatives fonctionnent de manière différente. Les européennes se font à la proportionnelle et ne comptent qu'un tour sur une circonscription nationale. Les législatives sont au scrutin majoritaire sur deux tours dans 577 circonscriptions. À la proportionnelle, si vous faites 30%, vous décrochez 30% des élus. À la majoritaire, si vous obtenez 30% au premier tour, vous vous qualifiez pour le second tour, mais vous n'avez toujours pas de député. Pour ça, il faut l'emporter au second tour en gagnant des sortes de mini-présidentielles. Et là, bien des choses peuvent jouer. D'abord, l'implantation des candidats. Même s'il s'est beaucoup développé dans les régions ces dernières années, le RN de Marine Le Pen ne dispose pas d'un maillage aussi dense que celui des partis traditionnels. C'est ce qui explique son rapprochement avec le chef des Républicains, Éric Ciotti, qui dispose, lui, d'un réservoir d'élus locaux.
Ensuite, le RN peut se heurter au résidu de ce qu'on appelait autrefois le front républicain, c'est-à-dire l'alliance au second tour de tous les partis anti-Le Pen. En 2002, lors de l'accession de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, ce fut très efficace. Le PS avait appelé à voter pour le gaulliste Jacques Chirac, qui l'avait emporté avec 82% des voix.
On en est bien loin. Mais dans certains bastions de la gauche ou de la droite républicaine, ça pourrait encore fonctionner. Donc, Rassemblement national en tête, c'est probable. Mais majoritaire au Parlement, ce n'est pas si sûr. On pourrait se retrouver le 7 juillet avec une chambre ingouvernable. Or, les élections de 2022 l'ont prouvé, il n'existe pas en France de culture du compromis. La majorité Macronienne a cherché des alliés en vain pendant deux ans. C'est ce qui pourrait arriver à Bardella. S'il n'obtenait pas la majorité absolue à lui seul, Emmanuel Macron ne le nommerait pas Premier ministre. Il pourrait trouver d'autres solutions. Comme disait La Fontaine, il ne faut pas vendre la peau de l'ours.