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Suite à la victoire de la droite aux dernières élections, l'avenir des conditions sociales et économiques pose questions auprès des acteurs sociaux et des représentants du milieu associatif. Alors que le nouveau paysage politique se forme, nous avons récolté les réactions des trois principaux syndicats, mais aussi de certains représentants associatifs.
Les principaux syndicats, tels que la FGTB, la CSC ou encore la CGSLB ont réagi aux résultats électoraux, exprimant pour certains leurs préoccupations concernant les réformes potentielles que pourrait introduire un gouvernement de droite. "Une bonne partie de nos priorités risque de ne pas se retrouver dans un gouvernement de droite", s'inquiète Thierry Bodson, président de la FGTB, qui insiste sur l'importance de "garder la couverture garantie par la sécurité sociale, mais aussi le caractère fédéral de cette couverture. Or, avec ce qu'on entend, ça risque d'être compliqué."
Le président de la FTGB ne cache pas non plus ses craintes concernant le renforcement du pouvoir d'achat et de la concertation sociale : "Il faut éviter de s'attaquer à l'indexation automatique des salaires. Il ne faut pas non plus avoir un gouvernement qui s'assied sur les éventuelles décisions qui sortent de la concertation sociale, comme au temps de la Suédoise. Si des décisions doivent aller dans le mauvais sens pour ce qui nous concerne, on aimerait avoir la capacité de pouvoir réagir rapidement à ces décisions", souligne Thierry Bodson, qui assure vouloir réagir "à partir du moment où il y aura du concret, comme une déclaration gouvernementale. On descendra dans la rue s'il le faut, pour contester un éventuel programme du gouvernement qui est négatif nous concernant."
L'importance de la concertation
Du côté de la CSC, Jean-Marc Namotte, secrétaire fédéral à la CSC Liège, se dit "surpris" quant à l'ampleur de la victoire des partis de droite et de centre-droit. "Quand la démocratie s'exprime, il faut la respecter", déclare le secrétaire fédéral. "Du côté des organisations syndicales, on n'a pas encore pris d'attitude définitive. Dès qu'on aura les compositions officielles des organes de gestions à la région et au niveau fédéral, on prendra contact pour voir ce qui est possible de défendre par rapport aux positions de notre organisation."
Jean-Marc Namotte assure par ailleurs qu'il y aura sûrement une série de mesure sur lesquelles il sera possible de trouver un terrain d'entente. "On discutera sur celles qui sont plus compliquées." D'après lui, ce virage à droite pourrait avoir un impact sur la sécurité sociale : "La crainte, c'est de voir fleurir une augmentation salariale dans les entreprises, alors qu'on ne finance pas la sécurité sociale. In fine, ça a des répercussions sur les soins de santé, sur le chômage ou encore la pension. Ce sera le job des organisations syndicales de défendre ces valeurs-là, et si on ne trouve pas d'accord, on réagira. On manifestera si c'est nécessaire, même si je reste un défenseur de la concertation avant tout. J'imagine que, même de droite, le futur gouvernement invitera les représentants syndicaux pour les écouter."
Nous ce que nous regardons, ce sont les mesures qui seront prises. Si celles-ci font mal aux travailleurs ou aux allocataires sociaux, nous réagirons.
Quant à la CGSLB, le syndicat refuse de prendre position sur les résultats électoraux. Le secrétaire national, Olivier Valentin, insiste plutôt sur la nécessité de réfléchir à l'ensemble des mesures qui seront prises dans les programmes gouvernementaux à venir, mais aussi, et surtout, de se concerter avec la société civile et avec les associations représentatives des travailleurs.
"C'est important de pouvoir dire quels sont les éléments qui sont importants pour les travailleurs et les allocataires sociaux, et d'avoir une véritable concertation qui soit une concertation à la fois dans la période de négociation d'un gouvernement, mais aussi que cela reste un élément structurel et permanent dans la mise en œuvre des différentes politiques du futur", explique celui qui souhaite "une concertation sociale forte" avec la société civile. "Nous ce que nous regardons, ce sont les mesures qui seront prises. Si celles-ci font mal aux travailleurs ou aux allocataires sociaux, nous réagirons. Mais nous espérons avant tout que par la discussion et la concertation, on puisse être impliqué dans la discussion sur ce qui sera mis en place."
Entre attentes, craintes et interrogations
Dans le chef du secteur associatif, là aussi, les avis semblent plutôt contrastés. "Il y a un peu des craintes dans le sens où on a été bien accompagné dans nos politiques lors de la législature précédente, que ce soit au niveau régional et au niveau fédéral. Ici, cela va changer puisqu'on va changer d'interlocuteur", affirme Erynnn Robert, coordinateur-ice de la Fédération Prisme, qui rassemble et représente les associations wallonnes LGBTQIA+. "On est dans l'expectative et on attend d'avoir les contacts une fois que les cabinets seront formés."
Après une analyse détaillée du programme des partis, la Fédération Prisme a observé que le MR et les Engagés proposent des programmes "qui ont l'air d'être assez soutenants et d'aller dans le bon sens par rapport à notre politique", bien que pour certains points, "ils ne vont pas aussi loin que ce que l'on souhaiterait. L'inquiétude ne porte donc pas tant sur le plan idéologique, mais plutôt sur la question budgétaire : "Ce qui nous inquiète plus c'est le niveau budgétaire. On sait que le MR et les Engagés auront un contrôle budgétaire beaucoup plus stricte. Dès lors, quelles en seront les conséquences pour notre secteur, mais aussi plus globalement pour le secteur associatif", s'interroge Erynn Robert.
Ce n'est pas parce qu'on est de gauche qu'on fera forcément mieux pour le handicap
La crainte d'un changement lié à l'arrivée d'une nouvelle législature, on la retrouve également dans le secteur du handicap. "Ce n'est pas parce qu'on est de gauche qu'on fera forcément mieux pour le handicap", assène pourtant Cinzia Agoni, porte-parole du GAMP, un organisme qui défend l'inclusion des personnes handicapées en Belgique. "Ceci étant, le programme du MR est plutôt réduit en matière de handicap, c'est le moins intéressant sur ce point. Par contre le programme des Engagés est l'un des meilleurs." Pour la porte-parole, tout dépendra surtout de qui prendra en charge la politique du handicap, elle qui reste malgré tout confiante quant à l'engagement du futur gouvernement pour la cause qu'elle défend. "Pour ce qui concerne le handicap de grande dépendance, je ne m'inquiète pas trop. C'est un combat que nous avons mené avec tous les partis, que ce soit l'opposition ou la majorité. Et on a toujours été entendu, même par le MR lorsqu'il était dans l'opposition. Après, il faudra voir ce qu'il se passera une fois qu'ils seront au gouvernement." La principale source d'inquiétude réside dans les priorités qui seront mises dans les accords du gouvernement : "Il y a eu des promesses de la part des partis qui étaient dans l'opposition avant, je leur rappellerai", promet-elle.
Enfin, quid des défenseurs de la cause environnementale ? Chez Canopea, la fédération des associations environnementales belges qui défend l'environnement en Wallonie et en Belgique, on refuse de parler de crainte. "On existe depuis plus de 50 ans et on a connu plein de gouvernements différents", explique Alain Geerts, responsable presse de Canopea. "Ce n'est pas une mauvaise nouvelle, car on a déjà connu des contextes semblables dans lesquels les choses se sont bien passées. Ce n'est évidemment pas non plus une bonne nouvelle, car le contexte sociétal par rapport aux questions environnementales n'est pas favorable", regrette-t-il. "On se pose des questions et nous allons investiguer pour voir comment les questions environnementales qui ont été mises un peu sous le boisseau pendant la campagne électorale, vont pouvoir revenir au-devant de la scène. On se demande avec quel partenaire, on va pouvoir avancer." Le parti présidé par Maxime Prévot semble cependant mieux correspondre aux attentes des associations environnementales : "Nous pensons qu'avec les Engagés, au vu de leur programme, il y a de nombreuses possibilités de rencontre et de travail. En revanche, on s'attend à éprouver un peu plus de difficulté avec le MR, même si ce parti compte des gens qui sont sensibles aux questions environnementales", conclut Alain Geerts.