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Dans un vacarme de tous les diables, un ange blond nommé Félix Lebrun, 17 ans seulement, a remis la France du "ping" sur la carte olympique, en décrochant le bronze aux dépens du Brésilien Hugo Calderano, balayé 4-0, dimanche à l'Arena Paris Sud.
"C'est un rêve depuis que je suis tout petit. C'est magnifique, incroyable", a réagi à chaud, Féfé, monstre de maturité et de sang froid autour de la table, redevenu soudain gamin débordant de larmes de joie, sitôt la victoire, écrasante, acquise (11-6, 12-10, 11-7, 11-6).
Assurément la plus belle de sa jeune carrière et qui laisse un peu plus entrevoir un avenir qu'on imaginait déjà glorieux, au vu de sa progression météorique qui l'a vu passer du 1068e rang mondial fin 2021 à la 5e place depuis mars 2024. Non content d'être pressé, Félix est aussi sacrément précoce car il est le plus jeune médaillé olympique de l'histoire en individuel, hommes et femmes confondus.
Pour l'heure, le présent est de bronze, mais pour Lebrun et le tennis de table tricolore il a un peu des reflets dorés, puisqu'il est le deuxième Français de l'histoire à monter sur un podium du simple aux Jeux, 32 ans après Jean-Philippe Gatien en argent à Barcelone-1992.
Deux jours après sa lourde défaite en demi-finale (4-0) face au grand favori chinois Fan Zhendong, "Féfé", dont la force de caractère et la maturité ne cessent de bluffer, a brillamment su se remobiliser.
- "Le match parfait" -
Pourtant, Calderano restait sur deux victoires dans leurs quatre face-à-face et, pour ses troisièmes JO, espérait enfin décrocher une médaille, après avoir notamment échoué en quarts à Tokyo en 2021.
Mais le Brésilien n'a lui manifestement pas digéré sa déception d'avoir été éliminé en demi-finale, face au Suédois Truls Moregard, un joueur moins bien classé (26e) et contre lequel il partait largement favori.
Porté par quelque 6.500 supporteurs bouillants ne demandant qu'à entrer en fusion, Félix débordait au contraire d'énergie, avec, comme surplus de motivation, la volonté de venger son frère Alexis, tombé sous les coups de raquette de Calderano en 8e.
Son aîné, intenable dans les tribunes, en a hurlé et hurlé de rage et de joie, en voyant son frangin ne pas manquer l'occasion d'un match d'une vie, qu'ils s'étaient fait mille fois, enfants et jusque pendant le confinement, autour de la table de "ping" familiale dans le garage de leurs parents.
"J'ai fait le match parfait, avec le soutien du public", n'a d'ailleurs pas manqué de souligné Lebrun "Féfénoménal" de maîtrise dans le jeu.
En découla une leçon de "ping", avec ce que Félix sait faire de mieux: envoyer des services aux variations illisibles, lui qui en possède une centaine de différents dans la raquette, tenir les longs échanges quand ils se font bras de fer, alors que Calderano est pourtant un des joueurs les plus puissants et tranchants du circuit.
- Et maintenant, par équipes -
Quant aux nerfs, ils étaient indéniablement plus solides côté français, en témoigne le deuxième set remporté en ne paniquant pas, malgré une énorme remontée au score du Brésilien.
Oui mais avec sa prise à la Chinoise, qui permet de donner d'innombrables effets à la balle et le tournis à l'adversaire, Félix était un chat se jouant allègrement du cobra d'en-face, confirmant sur ce match l'adage selon lequel "la plume est plus forte que l’épée".
"Je vais pouvoir célébrer avec toute ma famille, toute l'équipe de France, c'est énorme", a enfin dit Lebrun, conscient du caractère collectif de son accomplissement.
À ce titre, les Jeux ne sont pas finis: avec son frère Alexis et Simon Gauzy, ils entameront lundi face à la Slovénie le tournoi par équipes, avec la même ambition de glaner une médaille. Un objectif à leur portée, même si la Chine, immense favorite, sera une muraille quasiment infranchissable dans le dernier carré.
Mais atteindre ce stade voudrait dire s'offrir deux nouvelles chances de médaille, pour tenter d'imiter Jean-Philippe Gatien et Patrick Chila qui avaient décroché le bronze en double messieurs, à Sydney en 2000.