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Mike, Bruxellois, refusé d'une assurance à cause de sa maladie: "C'était assez violent dans la forme"

Mike, Bruxellois, est séropositif. En souhaitant souscrire une assurance, il a dû compléter un questionnaire médical. Aucune raison pour lui de cacher sa maladie, le VIH. Il la vit sans difficulté majeure grâce à un traitement. Mais son assurance lui est refusée. Son assureur ne veut pas prendre ce "risque". Une situation discriminante pour Mike. 

"Selon moi, ça ressemble à une politique de discrimination". Mike, 37 ans, nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour dénoncer une situation qu'il estime injuste.

Tout commence quand ce Bruxellois souhaite contracter une assurance "incapacité de travail". Cette assurance garantit "un revenu en cas d'incapacité de travail de longue durée." Précisons de taille: Mike est indépendant. Il travaille dans le secteur de l'immobilier.
Après un passage chez un courtier, il contacte la compagnie 'AG Insurance' pour souscrire à cette assurance "incapacité de travail". La procédure l'oblige à remplir un questionnaire sur son état de santé. Mike est séropositif. Il ne le cache pas et le mentionne dans le questionnaire n'imaginant pas une seconde que cette précision allait se retourner contre lui. Dix jours plus tard, il reçoit la réponse de l'assurance: "Nous devons malheureusement refuser la garantie incapacité de travail. Raison: VIH."

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Un refus qui lui coupe l'herbe sous le pied: "Ça se résumait en une seule phrase. C'était assez violent dans la forme." Sur la question de fond, Mike est tout aussi touché: "Ils n'ont pas accès à mon dossier médical. Ma vie avec le VIH est tout à fait normale, la même qu'une autre personne. Cela fait des années qu'on sait que l'espérance de vie d'une personne vivant avec le VIH est exactement la même qu'une personne séronégative. Selon moi, il n'y a aucune raison de refuser cette assurance." Et de poursuivre : " Je les ai contactés pour leur dire que c'était anormal de refuser une assurance à quelqu'un qui est séropositif. Que cela ne correspondait pas du tout à ce que c'est la vie avec le VIH en 2023. Je voulais comprendre comment ils prenaient cette décision et sur base de quoi."

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Jointe par notre rédaction, AG Insurance reconnaît une erreur sur la forme dans la réponse administrée à Mike. Laurence Gijs est la porte-parole du groupe AG: "Cette communication, on la regrette. Elle manquait d'explication et d'empathie. On sait qu'il y a une marge d'amélioration pour ce genre de communication. On est dans une situation humaine qui demande plus d'explications et un caractère plus humain."

Pour ce qui est du refus, AG campe en revanche sur sa position et détaille le processus de décision : "Pour une assurance de type 'incapacité de travail', il faut remplir un questionnaire médical. Nous nous basons ensuite sur des études scientifiques et médicales récentes. Elles nous permettent d'avoir des critères objectifs sur lesquels on se base pour accepter ou non le risque. Le questionnaire est réceptionné par une cellule "acceptation médicale" composée entre autres de médecins. Cette équipe prend une décision sur des critères objectifs", explique la compagnie d'assurance. 

Pas un cas isolé 

L'autre possibilité qui aurait pu s'offrir à Mike aurait été de payer plus, s'acquitter d'une surprime, et pouvoir tout de même être assuré. Une situation pas toujours évidente pour AG Insurance: "Oui, on pourrait donner une surprime en tant qu'assureur quand on accepte un risque. On pourrait aussi dire à l'assuré qu'on l'assure en excluant certaines maladies, mais ça reviendrait à lui donner une fausse protection. Une boite vide. On préfère éviter."

Face à cette mésaventure, le Bruxellois ne compte pas en rester là. Il a pris contact avec UNIA, le service public indépendant de lutte contre la discrimination et de promotion de l'égalité des chances. Nathalie Denis est la cheffe du service protection chez UNIA. Mike ne semble pas être un cas isolé : "Nous recevons chaque année un certain nombre de signalements relatifs à un refus d'assurance pour des personnes atteintes du VIH. Le nombre varie, mais on constate aussi que le nombre de signalements reçus ne correspond pas nécessairement au nombre de refus ou au nombre de surprime. Il y a donc beaucoup plus de situations qui se présentent que de situations que nous recevons chez Unia."

Oui, un refus pur et simple dans certaines situations peut être une discrimination

Comme expliqué précédemment, Mike n'hésite pas à parler de discrimination. Sans évoquer spécifiquement le dossier du Bruxellois, Unia détaille : "En matière d'assurance, il y a des législations adoptées relatives au droit à l'oubli. Ces législations vont permettre aux personnes guéries depuis au moins dix ans de ne pas devoir mentionner à l'assureur le fait qu'elles aient été atteintes de certaines maladies comme le cancer. À côté, il y a des personnes atteintes de VIH qui, elles, moyennant certaines conditions légales énumérées dans des listes légalement précisées vont pouvoir bénéficier des assurances moyennant des surprimes plafonnées. Maximum 100%. Moyennant des durées minimales, etc. Tout est une question d'application de la législation", explique Unia qui enchaîne : "Oui, un refus pur et simple dans certaines situations peut être une discrimination. Une surprime exagérée dans certaines situations va pouvoir être aussi une discrimination sur base de l'état de santé de la personne."

Par ailleurs, le service public indépendant de lutte contre la discrimination milite aussi pour plus d'humanisme sur la forme des refus: "On souhaite que les raisons d'un refus, d'embauche ou d'assurance, soient exprimées de manière assez personnalisée de manière que la personne qui reçoit un refus puisse savoir les raisons du refus et tenir compte de la situation et la charge psychosociale que ce refus va pouvoir engendrer dans le chef de la personne qui a déjà un problème de santé."

En attendant, le résultat de l'analyse d'Unia sur le cas de Mike, le Bruxellois a décidé de médiatiser son cas en s'interrogeant: "Combien avant moi ont essuyé ce refus et se sont renfermés sur eux-mêmes ? Ils ont eu encore une plus mauvaise image d'eux-mêmes. Finalement, c'est très négatif pour ces personnes. Je ne veux plus que cela arrive à présent."

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