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Brieuc s'étonne de la présence de nids de frelons actifs "de plus en plus tard dans l'année": faut-il s'en inquiéter?

"Encore des nids de frelons asiatiques actifs en décembre?". Brieuc, gérant d'une société de désinsectisation, est "étonné" de devoir encore réaliser ce type d'intervention à ce moment de l'année. Comment expliquer que ces nids soient actifs de plus en plus tard dans l'année ? Quelles sont les conséquences ?

Le frelon asiatique, appelé aussi le frelon à pattes jaunes, est bien implanté en Belgique. Depuis que le premier nid a été découvert en Wallonie en 2016, l'espèce s'est installée, au point que les autorités doivent présenter des plans afin de pouvoir gérer la situation. Le frelon asiatique représente essentiellement une menace pour les abeilles et d'autres insectes pollinisateurs. 

Si vous repérez la présence d’un nid de frelons asiatiques, un rappel, il faut faire appel à un professionnel, car vous risquez d'être piqués à de nombreuses reprises, avec les conséquences dramatiques qui peuvent en découler.  

Il faut les traiter jusqu’au bout

Ce qui étonne quelque peu Brieuc, un ancien sapeur-pompier, qui est à présent à la tête d'une société de désinsectisation, c'est le nombre d'appels reçus pour détruire des nids au début du mois de décembre.

"Malgré les températures qui diminuent, il y a encore des nids actifs. Ça s’annonce mal pour les années prochaines", estime-t-il. "Il y a un message à faire passer aux gens, car ils pensent que le frelon meurt en hiver. Mais ce n’est pas le cas. Les gens m’appellent à cette période de l’année, car les gens se rendent compte avec l’automne, et les feuilles qui tombent, que des nids apparaissent dans les arbres. Il faut les traiter jusqu’au bout. Je suis récemment tombé sur un nid intact, qui devait absolument être traité, car il était toujours en activité. On a déjà eu des températures froides, il a déjà gelé, et pourtant, j’avais déjà fait 5 nids au début du mois de décembre. La période d'intervention se prolonge pour moi."

Il y aura des colonies encore actives au début de l’hiver

Comment expliquer que les nids de frelons asiatiques soient encore "actifs" à cette période de l'année? Grégoire Noël, docteur au laboratoire d’entomologie fonctionnelle et évolutive à Gembloux Agro-Bio Tech, livre son analyse.

"On voit encore des nids actifs de frelons asiatiques au début du mois de décembre étant donné que, sur ces 20 dernières années, il y a un changement climatique. Le climat est de plus en plus chaud en Belgique, ce qui crée un ralentissement du dépérissement des colonies de frelons asiatiques. Le frelon asiatique a été introduit en Europe depuis une vingtaine d’années. Il est arrivé dans le sud de la France, et il est ensuite remonté petit à petit vers nos contrées."

Les frelons asiatiques vont-ils rester actifs de plus en plus tard dans l’hiver ?

"Oui, certainement. Il y aura des colonies encore actives au début de l’hiver, voire au milieu de l’hiver. Au début de l’hiver, ce qui se passe pour une colonie de frelons asiatiques, c’est qu’elle va péricliter. La reine de la colonie va décéder, ce qui va induire le décès de l’ensemble de ses ouvrières et de ses mâles. Néanmoins, la colonie aura produit toute une série de nouvelles reines, qu’on appelle à ce moment-là des gynes. Ces dernières vont alors sortir de la colonie, vont trouver un endroit où passer l’hiver, et vont rentrer dans une phase de dormance du mois de janvier jusqu’au retour des conditions favorables début mars. La phase qui va se rallonger à cause du réchauffement climatique, c’est donc le dépérissement d’une colonie. Elle va apparaître de plus en plus tard (ce qu'a observé Brieuc, notre témoin)."

Il est ainsi probable que les services d'extermination des nuisibles, qui éradiquent les colonies de frelons asiatiques, ont et auront un surplus de travail durant les périodes hivernales. "Le travail risque d’augmenter. Cela va occasionner un allongement des appels de ces professionnels", ajoute Grégoire Noël. 

Des nids de frelons asiatiques actifs plus tard cette année : quelles sont les conséquences ? Louis Hautier, attaché scientifique au Centre wallon de Recherches agronomique (CRA-W), a répondu à différentes questions.

Êtes-vous étonné de retrouver des nids actifs début décembre ?

"Je ne suis pas étonné qu’il y ait encore quelques nids actifs actuellement. Il faut savoir que ceux-ci sont en déclin, mais tant qu’il n’y a pas une période de gel prolongé, il peut toujours y avoir quelques individus présents dans le nid. Il peut encore y avoir des dizaines d’individus dans le nid, mais la plus grosse partie des individus ont quitté ce nid. Le nid ne représente plus une menace, à part s’il est encore dans un endroit accessible pour l’homme, car il y a un risque d’attaque. Mais ça semble limité. Normalement, on ne préconise pas la neutralisation systématique de ces nids, vu le faible danger que représentent les nids à cette époque."

Dans les prochaines années, les nids seront-ils actifs de plus en plus tard ?

"Cela va dépendre de l’année. Il y a des années où vous avez des printemps humides, froids, et qui vont limiter le développement des nids primaires (aussi appelés nids de printemps). En 2021, on avait eu un été qui avait été très pluvieux avec les inondations catastrophiques. Des climats humides vont entraver le développement des nids, car les frelons n’arrivent pas à sortir pour aller s’alimenter et développer le nid secondaire. Actuellement, on pourrait avoir une activité un peu plus longue. Mais ça va vraiment varier d’une année à l’autre. Le climat va conditionner la dynamique de population du frelon asiatique."
 
Et d'ajouter: "Cette année, les nids ont mis plus de temps à se développer et on a eu des nids moins gros. En 2022 et 2023, on avait eu un développement, avec un été chaud et sec, assez impressionnant. 2024 n’a pas été une année favorable au frelon asiatique, mais il continue son expansion. Dès qu’il retrouve les ressources pour se développer, les nids sont présents."

Faut-il s’inquiéter de la présence plus importante des frelons asiatiques en Belgique ?

"Au niveau des menaces, on va devoir de toute façon cohabiter avec ce frelon. Il est impossible de l’éradiquer. L’impact que peut avoir ce frelon est principalement pour le secteur apicole, avec de la prédation au niveau des ruches. Outre cela, il y a aussi un danger pour la population. Il est important d’informer sans arriver dans une psychose. Il faut informer sur le risque des nids qui sont à portée d’homme. Les nids qui se trouvent à 20-25 mètres de haut, ce sont des nids qui présentent peu de danger, mais d’autres se retrouvent dans des endroits parfois inattendus." 

"Quant à la biodiversité, on a à faire à une espèce invasive, qui est un prédateur généraliste et opportuniste, qui va se nourrir des proies les plus abondantes. Cela peut être des mouches, des abeilles, un nid de guêpes... Il n’est pas focalisé sur une espèce qui serait en voie de disparition. La menace pour la biodiversité semble limitée d’après les informations qu’on a actuellement. A priori, il ne présent pas un danger pour la biodiversité." 

Se dirige-t-on vers des plans frelons de plus en plus élaborés en Wallonie ?

"Dans la gestion du frelon asiatique, il faut comprendre que, pour cohabiter avec ce frelon, on va devoir utiliser différentes méthodes, différentes techniques. On peut utiliser du piégeage de printemps qu’il faut encadrer, car on peut impacter la biodiversité en faisant un piégeage non-sélectif. On doit également aider les apiculteurs à pouvoir intervenir sur les nids de frelons asiatiques. Ils ont été équipés pour neutraliser les nids qui posaient un problème aux ruches. En 2025, il faut les encadrer. Avec également une information vers les citoyens et les communes. Vu que c’est à cette échelle-là que la gestion se passe, avec des nids qui seraient problématiques pour la population." 

Selon Louis Hautier, environ un millier de nids de frelons asiatiques a été répertorié en Région wallonne en 2024.

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