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Les jeunes et le suicide: un psychopédagogue donne des conseils pour éviter le pire

Le suicide de nos jeunes est un sujet qui effraie bon nombre de parents. Pour celles et ceux qui se sentent démunis face à cela, il existe des solutions. Le psychopédagogue Bruno Humbeek a livré une série de conseils dans Capital Santé avec Caroline Fontenoy. Il y cite les attitudes à favoriser afin d'instaurer un climat de confiance et encourager nos jeunes à confier leur désarroi.

Le suicide serait la 2e cause de décès chez les jeunes entre 15 et 24 ans. Penser à la mort quand l'avenir s'offre à vous est une réalité chez les adolescents. "Un enfant n'a pas l'idée du suicide, pour lui, la mort est inconcevable. Mais à l'adolescence, il y a un socle vacillant qui est le socle de l'identité : on est en train de devenir quelqu'un", rappelle Bruno Humbeek, psychopédagogue et directeur de recherche au sein du service des Science de la famille de l’Université de Mons. Et pour un certain nombre d'ados, la construction de l'identité se passe difficilement. "Ces jeunes comprennent que le "moi" est en fait un "soi" c’est-à-dire quelque chose qui doit se construire dans une histoire et si cette histoire lui donne l'impression qu'il est inexistant ou insignifiant, il peut rentrer dans le creuset des idées suicidaires, c'est-à-dire la désespérance : avoir l'impression qu'on n'arrivera pas à devenir quelqu'un de suffisamment intéressant". 

La période actuelle est particulière pour les adolescents

Le spécialiste rappelle que, même si l'on a connu des crises par le passé (guerres, etc.), les adolescents d'aujourd'hui grandissent dans un monde particulièrement anxiogène, notamment en raison de la présence des réseaux sociaux. Il explique que nous sommes dotés d'un gyrus frontal qui permet d'éviter que les idées complètement sombres ne pénètrent profondément (par exemple, l'idée que nous allons tous mourir un jour). Problème ? Les réseaux sociaux viennent mettre à mal le rôle de ce gyrus. "Quand vous scrollez, il y a une sorte de bombardement d'informations négatives qui fait que ce gyrus ne joue plus son rôle et qu'on accepte l'idée qu'on est dans un monde morose. Les idées anxiogènes trouvent alors un terrain pour s'installer". 

Quand faut-il s'inquiéter ?

Un adolescent qui manifeste de l'anxiété n'est pas un problème, mais des signes doivent nous alerter. "Quand l'anxiété devient invasive, qu'elle vous empêche de dormir, prend en otage votre corps et votre vie : il n'y a plus d'endroit dans lequel on prend du plaisir", là, c'est un problème et il faut s'inquiéter, rappelle le psychopédagogue.

Certains parents "n'ont rien vu venir" : qu'est-ce que la "délicatesse paradoxale" ?

Certains parents d'enfants ayant mis fin à leurs jours sont envahis par la culpabilité car ils disent n'avoir "rien vu venir". "C'est souvent lié à la délicatesse paradoxale", explique le psychologue qui a lu de nombreuses lettres d'enfants après leur décès. "Dans ces lettres, ils disent à leurs parents qu'ils ne leur ont rien dit de la souffrance qui était la leur pour ne pas leur faire de peine", explique Bruno Humbeek. "Nos enfants veulent nous préserver et ne nous montrent rien et parfois on se retrouve avec un suicide qu'on n'a pas venu venir, c'est pour cela qu'on parle de délicatesse paradoxale". C'est la raison pour laquelle les parents doivent très tôt rappeler à leurs enfants que si quelque chose ne va pas, ils peuvent le leur dire. "Les parents peuvent dire 'Je ne vais pas m'effondrer'", pour encourager leur enfant à se confier.

Comment comprendre le suicide chez les jeunes et comment le prévenir ?

  • Les adolescents peuvent avoir des pensées suicidaires, au contraire des enfants qui n'en n'ont pas.
  • Les adolescents peuvent ressentir une grande pression en entamant leur mission de construction identitaire ce qui peut en mener certains vers un sentiment de désespérance.
  • En raison des réseaux sociaux, les adolescents sont beaucoup plus contaminés par l'idée qu'il y a peu d'intérêt de grandir dans ce monde ou bien qu'il n'a aucun sens.
  • On doit s'alerter quand l'adolescent semble ne plus avoir accès au plaisir de vivre.
  • Les parents doivent accueillir les émotions de leurs enfants et éviter les phrases de type "Tu es trop sensible" ou "Mais voyons ne te mets pas dans un état pareil".
  • Les parents doivent encourager leurs enfants à partager leur mal-être avec eux, en leur rappelant qu'ils peuvent le supporter.
  • Il faut nourrir la capacité d'émerveillement des adolescents.
  • Il faut permettre aux adolescents de passer des bons moments et d'avoir des perspectives réjouissantes.
  • Pour redonner l'impulsion à ces jeunes, les parents doivent parfois faire un pas de côté et demander de l'aide à des professionnels.

Ne restez pas seul(e)! Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe une ligne d'écoute anonyme accessible 24h/24 et 7 jours sur 7, où vous attendent les bénévoles du Centre de prévention du suicide au 0800/32.123

 

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