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Stefan Liberski et Benoît Poelvoorde nous plongent dans l'univers d'un artiste conceptuel aux ambitions paradoxales dans "L'Art d'être heureux", un film au casting impressionnant où la dérision règne
RTL Info : Stefan Liberski, vous êtes à la réalisation de "L'Art d'être heureux", un film dans lequel vous mettez en scène Benoît Poelvoorde qui interprète Jean-Yves Machond, un artiste conceptuel. Mais ce dernier est tellement dans le concept qu'il ne produit presque rien.
Benoît Poelvoorde : En effet, il ne produit rien, si ce n’est l'art de parler de ce qu’il a fait, de ce qu’il va faire, ou de ce qu’il pense avoir fait. En réalité, il ne fait rien, et c’est là toute sa douleur.
Stefan Liberski : Il produit du concept.
Au cours du film, Jean-Yves Machond croise une série de personnages, allant des plus bienveillants aux plus pervers. Qu'est-ce qui vous a donné envie de raconter cette histoire ?
Stefan Liberski : Tout d’abord, c’est un livre que Benoît et moi avions beaucoup aimé. Cela nous a semblé naturel de l’adapter en scénario, car Benoît adorait le personnage. En fait, ce personnage lui collait parfaitement. C’est surtout lui qui nous a donné l’envie de faire ce film.
Vous dites que ce personnage vous correspond bien ? Il est très bavard, il parle beaucoup, il ne fait pas grand-chose, il a du mal à s’ouvrir aux autres. Est-ce que l’on peut justifier une certaine médiocrité humaine ?
Benoît Poelvoorde : Oui, je pense qu’on peut le faire, mais cela demande tout de même beaucoup d’efforts, ce qui n’est pas le cas de ce personnage. Il n’est pas médiocre, mais il est insupportable parce qu’il se croit moins médiocre que les autres.
Stefan Liberski : Je ne suis pas sûr qu’on puisse le qualifier de médiocre. Ou alors, il s’invente une réalité. Est-ce que c’est de la médiocrité ? Je ne sais pas. Il y a beaucoup de gens qui se vantent d’idées qu’ils inventent. Lui, il semble se sentir enfermé dans ses propres conceptions. Mais il y a quelque chose en lui, une pulsion qui le pousse à vouloir changer. Mais changer pour lui, qu’est-ce que cela signifie ? Au final, tout cela va se disloquer, s'effriter et quelque chose va se passer, mais ça le public le découvrira dans le film.
Vous avez un casting impressionnant, avec Benoît, mais aussi Camille Cottin, qui travaille aux États-Unis, et qui joue dans les plus grandes productions. Comment l’avez-vous contactée et comment a-t-elle accepté de participer ?
Stefan Liberski : Très simplement. C’est quelque chose qui ne m’était jamais arrivé auparavant. Je lui ai envoyé le scénario par l’intermédiaire de son agent, et en l’espace de deux jours, elle a répondu positivement. C’était magique.
Il y a aussi François Damiens, qui dans le film vous explique qu’il pense que sa femme le trompe, tout en étant assez proche de cette dernière. D’où vient cette scène ? Était-elle déjà écrite ? Comment l’avez-vous travaillée ?
Stefan Liberski : Dans le scénario, il était question du fait qu’il est Belge et qu’il a un accent, mais le fameux "bam bam" était improvisé.
Benoît Poelvoorde : On ne sait jamais vraiment ce que François Damiens va faire.
Comment ça se passe, gérer deux personnalités comme celles de François et et Benoit ? Vous avez une idée précise de ce que vous voulez, surtout quand vous travaillez en tant que réalisateur. Comment cela fonctionne ?
Stefan Liberski : C’est en effet nécessaire d’avoir une vision précise, car cela peut partir dans beaucoup de sens. Mais Benoît et moi, on se connaît depuis longtemps, tout comme François. Nous sommes avant tout amis, et ça fonctionne bien parce qu’ils s’impliquent énormément dans leur jeu.
Benoît Poelvoorde : On rigole beaucoup, mais je me souviens qu’on prenait toujours le même accent, François et moi en dehors des scènes. À un moment, Camille Cottin n’en pouvait plus. Elle nous a dit : "Changez d’accent, j’en peux plus !".
Stefan Liberski : Je ne sais pas comment elle faisait pour s’y retrouver dans son rôle avec eux deux, mais c’est une grande professionnelle.
Pourquoi avoir choisi ce titre "L'Art d'être heureux" ?
Benoît Poelvoorde : Oui, au départ, le titre était 'L'Art de rien'. Mais des gens nous ont dit qu’un titre avec "rien" ferait fuir les spectateurs. Je ne peux pas croire que le mot "heureux" les attirera non plus.