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Au "Passetto", à Cortina d'Ampezzo, les convives dégustent leurs canederli devant des torches olympiques fixées au mur, remontant pour la plus ancienne aux Jeux de 1936, en attendant le retour de la flamme dans la célèbre station italienne en 2026.
Londres 1948, Melbourne 1956, Münich 1972, Salt Lake 2002, Pékin 2022 et bien sûr... Cortina 1956. Au gré des tables, on retrace l'histoire du sport dans ce restaurant-pizzeria à l'intérieur tapissé de bois, qui sera encore plein ce week-end à l'occasion de l'étape de Coupe du monde masculine de ski alpin.
"Les torches sont malgré tout assez rares, surtout les plus anciennes", explique à l'AFP le patron, yeux rieurs derrière ses lunettes aux montures rouges, devenu un spécialiste de cet objet emblématique de chaque Olympiade, au fil de recherches sur internet et de négociations avec des brocanteurs partout dans le monde.
Giorgio Ghedina, 63 ans, est l'oncle de l'ex-champion italien Kristian Ghedina, cinq participations aux Jeux et 13 victoires en Coupe du monde jusqu'à sa retraite en 2010.
- De tous les prix -
"Pour les Jeux modernes, il y a généralement de 7.000 à 10.000 exemplaires, en fonction du nombre de lieux et de relayeurs (pour le parcours de la flamme, ndlr). Mais il n'y en avait pas autant avant," reprend-il, en attrapant sa plus ancienne pièce, une torche tout en acier inoxydable: celle de Berlin 1936.
Elancées ou évasées, futuristes ou classiques, les trente-et-une torches exposées sont toutes originales, assure le patron de ce "musée" informel qui se visite en dégustant une pizza ou des canederli, spécialité locale à base de pain et de speck.
"Comme souvent, ça a commencé par hasard, il y a une vingtaine d'années. Un forgeron de Cortina, à qui on avait commandé des lampes en forme des torches des JO-1956, m'en a offerte une. Et je me suis dit, pourquoi pas continuer?", décrit Giorgio Ghedina, qui a lui-même porté la flamme lors des JO d'hiver de Turin en 2006.
"Je m'offre celle que je peux me permettre. Leur valeur est très relative, ce n’est pas comme un bijou où on se base sur des caractéristiques objectives", souligne le propriétaire.
Leur prix est généralement de quelques milliers d'euros, selon lui, mais certaines atteignent des montants dont la hauteur rivalise avec les sommets des Dolomites.
- Signées par les médaillés -
Des torches d'Helsinki (1952), qui n'existent qu'en vingt-deux exemplaires, se sont vendues ces dernières années entre 350.000 et 475.000 euros aux enchères.
Un des trente-trois exemplaires de Grenoble (1968) a lui été adjugé à 182.000 euros (frais compris) en février 2022 à Paris, selon la maison de ventes Million.
"J'avais trouvé celle d'Albertville, mais ils en voulaient 80.000 euros, une folie, alors bon...", soupire Giorgio Ghedina.
Au "Passetto", il n'est pas rare de croiser d'ex-héros des Jeux, venus se remémorer leurs exploits. A ceux qui ont été médaillés, le patron n'oublie jamais de leur demander de signer les torches.
Ce soir-là, c'est l'ex-championne italienne de ski alpin Deborah Compagnoni, trois fois médaillée d'or sur trois Jeux différents (1992, 1994 et 1998) qui franchit la porte. Elle n'échappe pas à la traditionnelle signature sur la torche de Nagano: "C'étaient mes derniers Jeux, mais aussi les plus beaux parce que j’y avais aussi gagné une médaille d'argent", sourit l'ex-skieuse de 52 ans.
Une signature de plus, aux côtés de Sofia Goggia ou Lindsey Vonn, dans la collection du patron, qui attend maintenant impatiemment de voir le flambeau de Milan/Cortina 2026: "Moi, je le ferais en verre de Murano, ce serait magnifique!"