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Pourquoi le gouvernement veut chasser les malades de longue durée après sa chasse au chômeurs?

Chaque matin sur les ondes de Bel RTL, Bruno Wattenbergh, expert en économie, évoque différentes thématiques liées à la consommation mais aussi à l'économie. Ce lundi matin, Bruno Wattenbergh évoquait la volonté du Ministre des Affaires Sociales Frank Vandenbroucke de pénaliser employeurs et travailleurs malades de longue durée qui ne s’investissent pas dans la remise au travail.

Bruno, en quoi est-ce un enjeu de remettre au travail les malades de longue durée?

Pour plusieurs raisons qui se rejoignent.

Première raison, la pression mise sur les chômeurs sous les gouvernements précédents a provoqué un transfert important de travailleurs au chômage vers ce qu’on appelle le congé maladie. Certains travailleurs inaptes pour des raisons de santé restaient sous statut de demandeurs d’emplois, alors qu’ils ne souhaitaient pas revenir sur le marché du travail. Résultats, les statistiques du nombre de demandeurs d’emplois se sont améliorées, mais le nombre de citoyens en congé maladie a explosé. Une sorte de principe de vases communicants. Aujourd’hui, 500.000 travailleurs sont en congé maladie de plus d’un an, soit plus que le nombre de chômeurs.

La deuxième raison, c’est que les offres d’emplois qui ne trouvent pas de travailleurs sont en forte croissance. La tentation est donc grande, si le nombre de demandeurs d’emploi baisse, d’aller voir qui pourrait retravailler parmi ce demi-million de citoyens.

La troisième raison est budgétaire. La Belgique s’est engagée à atteindre 80 % de taux d’activité des citoyens vers 2030. Aujourd’hui, ce taux d’activité est de 74 % en Belgique aujourd’hui, 62 % à Bruxelles, 65 % en Wallonie, contre plus de 80 % aux Pays-Bas ou en Allemagne.

Pourquoi est-ce si important d’atteindre ces 80%?

700.000 personnes en plus au travail, cela représente un gain budgétaire de 14 milliards d’€ par an. C’est aussi une garantie de financement durable de la sécurité sociale. Une partie significative de cette sécurité sociale est financée par le travail. Son existence ne peut qu’être menacée si de moins en moins de gens travaillent et la financent. Alors que le nombre de bénéficiaires augmente.

Mais comment faire retravailler ces gens de manière humaine?

C’est tout le débat qui anime actuellement la majorité fédérale et les syndicats. La réflexion est la suivante et elle porte sur la conception même de travail : certains malades de longue durée sont à la maison depuis 6, 7 ou 8 ans parce qu’ils ne pouvaient plus exercer un travail spécifique dans un contexte spécifique, par exemple restant debout longuement; mais ne pourraient-ils pas retrouver un job différent, adapté à leur état de santé actuel ? Le télétravail est une piste par exemple ? Avec des formations appropriées aux chômeurs de longue durée afin qu’ils soient armés pour occuper les jobs en pénurie.

Pourquoi parler de remise en cause de la question même du statut du travail?

Une partie des enjeux sociétaux repose sur la conception que lorsqu’on commence un job, on va et on peut le garder toute sa vie. Que si on ne peut plus l’exercer c’est à la société de prendre le travailleur en charge. Certains métiers pénibles devraient être un tremplin vers d’autres métiers moins pénibles. Et les pouvoirs publics devraient aider ces travailleurs à se former pour évoluer. La question sociétale pouvant être par exemple : faut-il s’acharner à créer un statut stable pour un coursier à vélo, quitte à en faire disparaitre une bonne partie, alors que la majorité d’entre eux feront ce mini-job pendant un temps assez limité avant de passer à autre chose ? Idem pour certains jobs très lourds dans la logistique … Fait-on vraiment un cadeau à ces travailleurs en tentant de les fixer dans ces secteurs jusqu’à un âge avancé en se gardant bien de les former, quitte à les faire dépendre de la solidarité ? Je n’ai pas la réponse. Mais il faut se poser la question … Et c’est sans doute le bon moment.

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