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Le "Fattah" iranien pour la première fois dans le ciel israélien: comment fonctionnent les missiles balistiques?

La tention monte au Moyen-Orient entre Israël, la Palestine, le Liban et l'Iran. Pour la première fois, l'Iran a employé des missiles hypersoniques lors de cette opération, baptisée "Promesse honnête 2", selon les médias iraniens. Que sont les missiles balistiques exactement, et quels pays les utilisent ?

Des missiles Fattah ont, pour la toute première fois, transpercé le ciel israélien, venus tout droit d’Iran, alors que le pays se trouve à plus de 1000 kilomètres de l’État hébreu. Entre 30 et 32 pays dans le monde sont en possession d’un ou plusieurs types de missiles balistiques. Comment fonctionnent-ils et quelle est leur place dans l’armement mondial ?

Que sont les missiles balistiques ?

Pour bien comprendre, il est nécessaire de comprendre ce qu’est un missile balistique. Fonctionnant un peu comme une fusée, cette arme permet de parcourir de très longues distances, utilisant la trajectoire balistique. 

Concrètement, le missile est tout d’abord propulsé à très haute vitesse dans le ciel (entre Mach 5 et Mach 20), sous l’effet d’un moteur-fusée. Il vole ensuite, souvent jusque dans l’espace, avant de retomber, sous l’effet de la gravité, en suivant une trajectoire en arc. Un missile balistique transporte généralement une ogive explosive, qui peut être conventionnelle ou nucléaire, libérée avant la rentrée atmosphérique, s'écrasant sur la cible.

Les missiles balistiques modernes utilisent une combinaison de systèmes de guidage pour améliorer leur précision et ainsi atteindre une précision de l'ordre de quelques mètres, même sur des distances intercontinentales.

Les missiles balistiques à travers le monde diffèrent, mais sont souvent classés en quatre catégories, basées sur la distance qu’ils peuvent parcourir.

  • SRBM (courte portée) : jusqu’à 1 000 km
  • MRBM (moyenne portée) : entre 1 000-3 000 km
  • IRBM (portée intermédiaire) : entre 3 000-5 500 km
  • ICBM (intercontinental) : supérieur à 5 500 km

En fonction de leur charge explosive, qui peut être nucléaire, les missiles balistiques peuvent faire des dégâts très importants : un ou plusieurs bâtiments, nous l’avons vu au Liban, ou des villes entières dans le pire scénario.

Une place "majeure" dans les conflits

Aujourd’hui, ces armes occupent une place "majeure" pour de nombreux États, confirme Alain De Neve, chercheur au centre d'études de sécurité et de défense : "Ça dépend un peu des cultures stratégiques et des politiques militaires et de défense des Etats. Mais par exemple, pour un Etat comme l'Iran, le vecteur balistique de différentes portées permet de frapper loin, de frapper fort, tout en se maintenant à distance de l'adversaire", justifie-t-il.

"Les Etats qui investissent fortement dans leurs capacités balistiques, cherchent à exercer un chantage efficace en faisant peser sur leurs adversaires, déclarés ou potentiels, une menace persistante à moindres frais, même si, évidemment, ça suppose quand même des investissements assez lourds", complète Alain de Neve.

Les missiles balistiques, d'autant plus s'ils portent une ogive nucléaire, sont souvent des armes dissuasives.

Quels missiles utilise l'Iran ?

L'Iran développe des missiles balistiques depuis de nombreuses plus de 40 ans et son programme est l'un des plus actifs au Moyen-Orient.
Les missiles balistiques iraniens font particulièrement entendre parler d'eux, en ce moment. Près de 200 missiles ont été lancés sur Israël en une seule nuit. Il s'agit, vraisemblablement, de missiles balistiques hypersoniques récemment dévoilés, les Fattah. De portée moyenne, ces missiles peuvent atteindre des cibles situées à plus de 1400 kilomètres.

En plus de sa vitesse importante de Mach 15, le missile Fattah a une autre particularité : "Il a des capacités, hyper manœuvrantes, jusqu'au dernier moment. Il peut, malgré sa trajectoire balistique, changer de cap et donc déjouer les systèmes de défense antimissile", décrit Alain de Neve.

Teheran dispose également d'autres missiles balistiques connus, à courte et moyenne portée, comme le Shahab-3 (entre 1300 et 2000 km de portée), le Ghadr (la version améliorée, avec une portée estimée entre 1600 et 1950km) ou le Sejjil (entre 2000 et 25000km).

Le pays affirme que son programme est purement défensif, mais il suscite des inquiétudes internationales, notamment concernant sa possible utilisation pour des armes nucléaires. L'Iran continue d'investir dans ce domaine malgré les sanctions internationales.

Israël

L'État hébreu a une politique d'ambiguïté nucléaire, ne confirmant ni ne niant officiellement la possession d'armes nucléaires. Israël posséderait, d'après des sources étrangères, une triade nucléaire, c'est-à-dire la capacité de lancer une attaque nucléaire depuis les airs, la terre et la mer.

Le programme israélien inclut les missiles Jericho-2 et 3, l'un pouvant atteindre sa cible entre 1,500 et 3,500 km, l'autre entre 4,800 et 6,500 km.

Israël possède également des capacités de lancement spatial, potentiellement adaptables à des fins militaires.

Etats-Unis

Les Etats-Unis disposent de la triade nucléaire. En 2023, le gouvernement américain dévoilait son arsenal stratégique de dissuasion nucléaire, qui était de 662 missiles intercontinentaux, dotés de 1419 ogives nucléaires et de 800 lanceurs.

Parmi les missiles balistiques nucléaires, il y a le Minuteman III (entre 9,650 et 13,000 km) et les Trident-II (entre 7,400-12,000 km), qui sont lancés depuis des sous-marins.

L'armée américaine dispose également de missiles balistiques à courte portée, le MGM-140 ATACMS, pour des frappes de précision avec une portée d'environ 300km.

Russie

La Russie possède l'un des arsenaux de missiles balistiques les plus importants et diversifiés au monde. Notons le missile intercontinental RS-24 Yars, ou le nouveau RS-28 Sarmat, pouvant atteindre 18000 km, aussi surnommé Satan II. Ce dernier serait, selon Alain de Neve, "un missile intercontinental qui doit être, je dirais, le fleuron de sa modernisation, de sa dissuasion nucléaire".

"La raison pour laquelle la Russie investit tellement dans ses capacités balistiques, dans la modernisation de son arsenal de vecteurs balistiques, que ce soit avec des charges nucléaires ou des charges conventionnelles, c'est parce que, justement, ses forces conventionnelles classiques en hommes ou en chars sont peut-être le talon d'Achille de la Russie", analyse le chercheur.

La modernisation continue de cet arsenal est une priorité pour la Russie, qui le considère comme un élément essentiel de sa puissance militaire et de sa position géopolitique, notamment face à l'OTAN.

Chine

Tout comme la Russie, la Chine dispose d'un arsenal balistique varié. Le pays a des missiles de courte portée, comme le DF-11, ou intercontinental, comme le DF-41.

Bien que son arsenal soit plus petit que celui des États-Unis ou de la Russie, la Chine cherche à établir une force de dissuasion nucléaire crédible et à projeter sa puissance militaire dans la région indo-pacifique.

Corée du Nord

Ces dernières années, la Corée du Nord a réalisé des progrès significatifs dans son arsenal balistique, qui constitue un élément central de sa stratégie militaire. Elle dispose désormais d'une grande gamme de missiles à portée variée, allant de courte, comme le KN 23, KN 24 et KN 25, à intercontinentale, comme le nouveau Hwasong-17 dévoilé en 2020.

D'autres pays qui possèdent des armes balistiques sont l'Inde, le Pakistan, le Royaume-uni ou encore la France. La Belgique n'en possède pas.

La faiblesse des armes balistiques

Le point faible des armes balistiques reste la capacité des systèmes de défense antimissiles à les intercepter. Le dôme de fer israélien est connu pour être particulièrement efficace pour y arriver. Premier outil du dispositif: un radar capable de repérer un missile à 100 km de distance. Une fois repéré, sa trajectoire est analysée par un puissant ordinateur qui évalue son point d'impact. S'il s'agit d'une zone habitée la réaction est immédiate et le missile est détruit. Chacune de ces unités peut tirer 20 missiles.

Selon les Israéliens, l'efficacité du dispositif atteint 95%. Pour le contrer, le Hamas et le Hezbollah utilisent une stratégie simple: envoyer un nombre énorme de missiles en même temps (jusqu'à 5.000 par heure), pour saturer la capacité du dôme de fer israélien.

Pour faire face à cette faiblesse, les armes balistiques continuent d'évoluer en direction de "l'hyper manœuvrabilité", comme l'explique Alain de Neve : "Il s'agit de faire en sorte que lorsque les missiles balistiques lâchent leur charge militaire, (qui peut être multiple), l'idée est de faire en sorte que cette tête parvienne à supporter des facteurs de charge très intenses pour réaliser des hyper manœuvre de diversion de dernière minute afin de déjouer les systèmes de défense antimissile", décrit le chercheur.

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