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Des centaines de bunkers sont laissés à l'abandon en Belgique: "Il n'y a pas de plan pour les rénover" en cas d'attaque

Sous nos pieds se trouve peut-être l’un des nombreux abris anti-aériens disséminés à travers le pays. Mais en cas d’attaque, ces infrastructures seraient-elles réellement opérationnelles ?

Sous la Grand-place de Tubize, un secret bien enfoui dort depuis plusieurs décennies. À trois mètres de profondeur, un abri anti-aérien construit pendant la Seconde Guerre mondiale se dissimule, invisible aux regards. Ce lieu clandestin, creusé à la force des bras, avait pour vocation de protéger les citoyens en cas d'alerte aérienne. Il reste un témoin silencieux d'une période marquée par l'incertitude et le danger.

L'abri, capable d'accueillir jusqu'à 130 personnes, est équipé d'une porte blindée et d'un couloir de 33 mètres de long, agrémenté de bancs en bois pour permettre aux occupants de s'asseoir durant l'attente. Sa structure a été pensée pour résister aux vibrations des explosions. "Il faudrait 10 000 euros pour le rénover", avance Jean-Marc Zocastello (Les Engagés), échevin de la l'urbanisme. Une somme pas si colossale au regard de la potentielle utilité du lieu. Cependant, sa restauration ne figure pas parmi les priorités. "On espère qu'il ne reste qu'un monument historique que l'on puisse ouvrir de temps en temps pour montrer. Mais jamais l'utiliser", poursuit-il.

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Le bunker inexploitable de Turbize n'est pas un cas isolé en Belgique. Sous le Parc Royal à Bruxelles, à 12 mètres sous terre, se trouve également un abri de 400 mètres carrés, lui aussi laissé à l'abandon depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce bunker, destiné à abriter la famille royale et les parlementaires en cas d'attaque, n’est plus fonctionnel. Les pièces plongées dans le noir témoignent d'une époque révolue et d'infrastructures désormais inutilisables...

Pas de plan de rénovation 

Le pays recèle de centaines d'abris similaires construits dans les années 1940. Aujourd'hui, une grande majorité des bunkers belges sont donc hors service. "En Belgique, il n'y a pas de plan visant à rénover des bunkers ou en construire de nouveaux pouvant servir d'abri à la population en situation d'urgence", affirme Thomas Gijs, porte-parole du centre de crise national.  

De son côté, le ministre de la Défense Theo Franken a pourtant évoqué un projet de "plan de résilience". Un plan qui reste flou, sans détails concrets concernant des rénovations d'infrastructures ou la construction de nouveaux abris. Le centre de crise national, chargé d'élaborer ce projet, adopte avant tout une posture préventive face à des scénarios divers allant d'une attaque aérienne à un dégagement de fumée toxique, prodiguant des conseils tels que se réfugier chez soi ou dans des bâtiments publics. 

Le bunker sous le Parc Royal: 

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Certains experts expriment leur inquiétude sur ce manque d'abris dans le pays. "Personne ne sait aujourd'hui quelle va être l'issue du conflit", indique Quentin Michel, professeur en sciences politiques à l'ULiège. "Il est de bonne politique de s'interroger: 'Est-ce qu'on ce qu'il faut pour protéger la population en cas d'attaque?" 

Quelles alternatives? 

Les alternatives actuelles, comme les stations de métro ou les parkings souterrains, sont proposées, bien que leur niveau de protection soit nettement inférieur à celui des bunkers construits en période de conflit.

Ce manque d'infrastructures pousse certains citoyens à envisager des solutions individuelles. Depuis le début de la guerre en Ukraine, la demande pour des abris privés a explosé sur le marché européen. Un fabricant suisse rapporte recevoir entre 10 et 15 sollicitations par jour, certaines provenant de Belgique. "On se rend compte que les pays où il n’y a pas de structure réellement existante au niveau de la protection de la population sont des marchés intéressants pour nous", explique-t-il. Ce mouvement traduit une inquiétude croissante parmi les citoyens face aux incertitudes géopolitiques actuelles, mais aussi un besoin perçu de sécurité individuelle dans un contexte où les défenses collectives apparaissent insuffisantes.

Quid des autres pays européens? 

La situation en Belgique contraste avec les initiatives prises dans d'autres pays d'Europe. En Allemagne, par exemple, un plan d'envergure a été mis en place pour recenser tous les bunkers encore existants. Ce recensement a pour objectif de permettre aux citoyens de localiser rapidement un abri en cas d'urgence.

En Suède, fidèle à sa réputation en matière de prévoyance, a distribué un livret intitulé "En cas de crise ou de guerre", détaillant les mesures à adopter en situation de crise. Ces démarches illustrent une approche proactive et une prise de conscience des risques potentiels, mettant en lumière une différence marquée avec la position belge actuelle.

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