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Des millions de téléspectateurs l'ont vu être écrasé par les joueurs, se relever, le tout sans perdre le sourire. Mais ce n'est que lorsque ses images en gros plans des joueurs ont commencé à être diffusées que son histoire s'est emparée des réseaux sociaux.
Lorsque Mandzukic a envoyé dans les filets anglais le ballon qui qualifiait la Croatie pour la finale de cette coupe du monde de football en Russie, il a couru vers la ligne du fond pour hurler sa joie vers les supporters croates, juste devant la position assignée aux photographes.
"Tout à coup ils étaient quatre ou cinq, et moi j'étais sur mon siège, prenant des photos. Là, d'autres joueurs commencent à arriver, y compris ceux du banc, et tout à coup la pression est trop forte et je me retrouve pris dans cette avalanche avec la barrière et le siège et eux tous par-dessus", raconte Cortez.
Mais cette marée humaine qui l'a submergé n'a pas empêché le reporter de continuer à prendre des photos.
"J'ai commencé à apppuyer sur le bouton alors que je tombais, et j'ai continué, tout en étant pris sous cette montagne de joueurs, j'avais en gros plan leurs visages, leur euphorie, leur émotion, vus d'en-dessous", se souvient-il.
Ces 40 secondes de participation involontaire à un événement mondial résume d'une certaine façon la carrière de ce Salvadorien de 53 ans, basé à Mexico.
Il a débuté dans les années 1980 en couvrant la guerre qui déchirait son pays, et continuera à couvrir des guerres, des catastrophes naturelles, des coups d'Etat ou des crises humanitaires.
Parmi de nombreux souvenirs de situation exceptionnelle, il raconte notamment une attaque surprise alors qu'il se trouvait avec l'armée américaine en Irak, ou l'explosion d'une voiture piégée à Lima en 1992 - deux occasions parmi d'autres où ses réflexes de photographe ont pris systématiquement le pas sur les risques.
"Quand j'étais en situation de guerre, je me disais toujours ça, il se passera ce qui se passera, mais moi, je photographie", dit-il.
Après avoir souvent risqué sa vie dans des zones de guerre, il n'a toujours pas vraiment enregistré le fait d'arriver brusquement à la célébrité pour une barrière qui cède.
"Un grand moment"
Question : Qu'as-tu ressenti lorsque tu t'es retrouvé sous tous ces joueurs croates?
Réponse : "C'était totalement inattendu. Tout s'est passé si vite, de façon tellement rapide, tellement suprenante, et en même temps c'était tellement émouvant, que je n'ai pas eu le temps de penser à quoi que ce soit d'autre que d'essayer de capturer ces visages pleins de joie et cette célébration".
Q: Comment se sont comporté les joueurs croates avec toi à ce moment-là ?
R: "Quand ils ont réalisé la situation, les joueurs ont été très aimables avec moi, me demandant si j'allais bien, il y en a même eu un qui au milieu de tout ce chaos a ramassé mes lunettes et me les a remises. Et puis il y a eu le moment où (le joueur Domagoj) Vida m'a pris la main, m'a embrassé et, dans l'émotion, m'a donné un baiser".
"En fait, ça a été un bon moment, j'ai partagé à fond leur joie d'être qualifiés pour la finale et de pouvoir espérer remporter la coupe. Ç'a été un grand moment".
Q: Après la fin du match, comme c'était prévu, tu as repris l'avion. A quel moment as-tu réalisé le phénomène que tout ça avait déclenché?
R: "Il m'a fallu à peu près une heure et demie, le temps d'arriver à l'aéroport, et là, j'ai commencé à avoir des appels et des appels et le téléphone n'arrêtait pas de sonner.
Je l'ai arrêté le temps de m'enregistrer pour le vol, et quand ça a été fait j'ai regardé mon téléphone et j'avais des centaines d'appels ratés, des gens qui avaient appelé 10, 15 fois, insistant, il y avait même quelqu'un qui avait appelé 50 fois. C'est là que j'ai commencé à comprendre que le phénomène était passé sur les réseaux sociaux".
Q: Qu'y a-t-il de commun entre une situation comme celle-ci et une couverture de guerre?
R: "En commun, il y a l'adrénaline qui monte à mille, à dix mille, et en cela c'est similaire. Mais quand tu es en même temps en train de risquer ta vie, c'est quand même une adrénaline différente".
"Là évidement, c'était différent, je ne me suis jamais senti en danger, même si j'ai bien quelques bleus. Je crois que c'est aussi pour ça qu'il y avait ce sourire. C'est ça qui fait la différence entre une situation de guerre et ce qui s'est passé lors du match".
Q: Et pour la finale, tu es pour la Croatie?
R : "Oui, maintenant je me sens proche d'eux, je m'identifie à eux. Oui, je vais soutenir la Croatie, sans aucun doute (rire). Allez!".