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Ce n'est pas la première fois qu'un responsable politique propose de mettre en place ce genre de "procédure accélérée" pour certains délits. Alors, pourquoi ce projet n'a-t-il jamais abouti ? Est-ce vraiment réalisable ? Eléments de réponse.
2000: année de l'Euro de football coorganisé par la Belgique et les Pays-Bas. Pour réprimer les actes de délinquance, le ministre de la Justice propose une procédure de comparution immédiate. "Pour la victime, l'insécurité devient très très grande et chez l'auteur, c'est l'inverse, c'est impunité qui règne. Il faut essayer de briser cette spirale négative", avait déclaré Marc Verwilghen, l'ancien ministre de la Justice.
Inapplicable diront les magistrats du parquet. La Cour constitutionnelle a annulé partiellement la loi. En cause: une différence de traitement entre les citoyens.
Année 2007: de nouveau sur la table dans l'accord de gouvernement d'Yves Leterme.
Année 2018: deux députés font une proposition de loi dans ce sens, mais aucune proposition de loi n'aboutit.
Alors pourquoi de telles difficultés? "Car vous avez une personne qui comparaît, si elle comparaît immédiatement après les faits, n'a pas la même possibilité de se défendre qu'une personne qui comparaît un mois après. Elle peut difficilement demander des devoirs d'enquête. Elle peut difficilement confronter ses versions avec celles d'autres protagonistes au dossier", explique Denis Goeman, juge au tribunal de première instance francophone de Bruxelles.
Pour l'avocat Pierre Sculier, il faut une procédure accélérée mais pas trop. "Je pense qu'il faut permettre aux gens poursuivis d'assurer leur défense et de prendre un peu de recul par rapport aux faits infractionnels commis pour avoir une meilleure défense et une meilleure réflexion à leur propos. Il faut trouver une équilibre entre une justice complète mais qui ne soit pas une justice expéditive", précise-t-il.
Autre difficulté: le manque de moyens pour traiter ces dossiers, mais aussi la collecte de preuves suffisantes pour justifier un placement en détention. Alors la proposition du ministre de la Justice actuel n'est-elle qu'un effet d'annonce? "Il faut un délai raisonnable pour juger les gens. Dans la déclaration gouvernementale, il est prévu qu'on doit juger les personnes endéans l'année de l'introduction d'une affaire. Juger quelqu'un dans les 8 jours, ça ne passera jamais le cap de la Cour constitutionnelle. Cela me parait discriminant", conclut l'avocat Jean-Pierre Buyle.
Reste à attendre le projet de loi du ministre. Le Parlement devrait pouvoir se prononcer sur cette proposition à partir de l'an prochain.