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"Quand on parle d'enfant, il n'y a jamais de consentement": au moins deux victimes d'inceste dans chaque classe de Belgique

Dans les pays occidents, entre 5% des garçons et environ 20% des filles de moins de 18 ans sont victimes de violences sexuelles. Une foule de manifestants a défilé dans le centre de Bruxelles pour la journée internationale de lutte contre les violences de genre. ce dimanche. 

Tous ensemble pour trouver la force de se faire entendre. Ils étaient environ 2.500, selon la police, à être rassemblés ce dimanche depuis la place Poelaert, à Bruxelles. Les manifestants ont répondu à l'appel de la plateforme Mirabal, comptant une centaine d'organisations de la société à l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. 

"L'idée c'est de mettre en avant le fait que quand on parle d'enfants, il peut jamais y avoir de consentement et donc parfois ça fait débat mais ça devrait pas", souligne une des manifestantes présente dans la capitale. "On n'a pas souvent l'occasion de rappeler ce qui se passe et de témoigner de la solidarité envers toutes les victimes", ajoute un autre participant. "Il faut être nombreux." Nombreux pour briser le tabou autour des violences sexuelles subies par les enfants - l'inceste concernerait entre 2 et 4 enfants de chaque classe de chaque école de notre pays selon l'OMS.

Les enfants victimes de violences sexuelles n'arrivent souvent à s'exprimer que des années plus tard voire jamais. "Parfois c'est malheureusement celui d'une amnésie traumatique, ils ont leur vécu qui ressort, ils ont le moment en fait de poser des mots sur leur vécu, sur leur ressenti", indique Marie-Anne Ellis, thérapeuthe qui accueille des dizaines de patients concernés par jour dans son cabinet, principalement des adultes entre 30 et 60 ans. 

Trop de féminicides 

Cette manifestation avait également pour but de dénoncer les violences de genre. "On en est à au moins 21 féminicides en 2024 en Belgique. Ça fait 231 féminicides depuis 2017. On estime que les féminicides sont invisibilisés à 25% dans les médias, on ne peut que s’imaginer le chiffre réel", alerte ainsi Aline Dirkx, coordinatrice de la plateforme contre les violences faites aux femmes. 

"Les deux sujets qu’on souhaite vraiment mettre en lumière cette année, c’est la lutte contre les violences à caractère sexuels contre les enfants, dont l’inceste. La deuxième thématique est la solidarité nationale. On demande à la Belgique d’avoir une position ferme contre toute attaque qui vise les populations civiles. On veut montrer notre solidarité à toutes les femmes, les enfants et les minorités de genre qui sont victimes des conflits armés", a-t-elle ajouté. 

Plusieurs discours ont insisté sur l'urgence d'un cessez-le-feu à Gaza, tandis que d'autres ont pointé le caractère spécifique des violences de genre propres aux métiers du soin, à l'instar des aide-soignantes.

"Femme, vie, liberté, de l'Iran à la Palestine !", arborait une pancarte. "Quand il y a un progrès féministe dans un pays, c'est une victoire pour les femmes du monde entier", soutient Shima Silavi, venue manifester.  

Intersectionnalité 

"Il est primordial de se mobiliser en solidarité internationale avec les femmes, minorités de genre et enfants victimes de conflits armés - en Palestine, au Soudan ou encore au Burkina Faso - et les femmes migrantes", a souligné Aline Dirkx, coordinatrice de la Plateforme féministe contre les violences faites aux femmes.  Les femmes et minorités de genre vivant au croisement de plusieurs oppressions (qu'elles soient réfugiées, racisées, etc.)  subissent des "violences démultipliées", a insisté Aline Dirkx.  

Mirabal exhorte le gouvernement belge à "prendre une position ferme contre toute attaque qui vise des populations civiles - et donc ces femmes", a continué Aline Dirkx. Selon elle, une politique transversale contre les violences de genre comprenant cette "grille de lecture intersectionnelle" doit être adoptée à chaque niveau de pouvoir.  

"Selon l’Organisation mondiale de la santé, les violences sexuelles concernent 20 à 24 % des filles et 5 à 11 % des garçons de moins de 18 ans dans les pays occidentaux", explique Margot Foubert, chargée de missions chez Sofélia, une fédération de centres de planning familial membre de la plateforme Mirabal. L'inceste toucherait ainsi "entre deux et quatre enfants dans chaque classe de chaque école de notre pays", illustre-t-elle.

Un plan d'action national réclamé

Mirabal réclame l’élaboration d’un plan d’action national pour lutter contre ces violences sexuelles faites aux enfants. La plateforme plaide également pour une meilleure formation des professionnels impliqués dans la protection de l’enfance, afin d’éviter l’utilisation de théories controversées, telles que le Syndrome d’aliénation parentale. Ce concept, critiqué par les féministes, peut être utilisé comme argument par un conjoint violent pour revendiquer la garde des enfants devant la justice.

Une autre thématique mise en lumière ce dimanche est la solidarité internationale. Mirabal rappelle que la Convention d’Istanbul, ratifiée par la Belgique, prévoit la protection des femmes migrantes, demandeuses d’asile ou réfugiées, victimes de violences de genre, ainsi que celle des enfants. "La situation des femmes dans le monde est très inquiétante", alerte Margot Foubert. "En Afghanistan, elles n’ont même plus le droit à la parole. À Gaza, 80 % des victimes du génocide en cours sont des femmes et des enfants. Que font la Belgique et l’Union européenne pour leur venir en aide?", s’interroge-t-elle.

Plus globalement, Mirabal demande l’adoption "d’une politique intégrée et globale de prévention primaire des violences de genre". Selon la plateforme, "les violences sexistes et sexuelles nous concernent toutes et tous" et prennent place "dans tous les espaces de la vie des femmes, des minorités sexuelles et de genre, et des enfants : dans la rue, dans la famille, au travail ainsi que dans les sphères juridiques et politiques".

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