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La France connaîtra ce lundi une journée de deuil national, suite du cyclone qui a ravagé l'île de Mayotte et fait au moins 35 morts. Or, l'entourage du Premier ministre François Bayrou a déclaré dimanche soir qu'il pourrait annoncer dans les prochaines heures la composition de son gouvernement. Si jamais c'était le cas, est-ce que les Français ne prendraient pas cette annonce un jour de deuil comme une maladresse ?
François Bayrou s'est imposé un agenda qu'il ne parvient pas à respecter. On évoquait un gouvernement à la fin de la semaine dernière, puis ce week-end, et maintenant la formule consacrée serait "avant Noël", ce qui ne laisse plus que 48 heures. Cette situation nous montre une fois de plus à quel point le monde politique français a perdu la logique d'un gouvernement issu de longues négociations, mais qui débouche sur un compromis et une stabilité. Michel Barnier a formé son équipe en 15 jours seulement, sans passer vraiment d'accord avec les partis présentés au Parlement. Majorité comme opposition. On connaît le résultat, il a été renversé au bout de trois mois.
François Bayrou est en train de commettre la même erreur. Alors, je ne doute pas qu'il soit soumis à une forte pression, notamment de la part du président de la République. Quand on a pris l'habitude, depuis 1958, de nommer les gouvernements en quelques jours, on a du mal comme le préconisait François Mitterrand, à laisser du temps au temps. Bref, aux dernières rumeurs, le maire de Pau pourrait donc, dès aujourd'hui, présenter ses ministres. Un mixte de sortants reconduits, comme le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, ou celui des armées, Sébastien Lecornu. Un groupe de revenants, avec Gérald Darmanin et l'ancienne locataire de Matignon, Elisabeth Borne. On avance même le nom d'un ancien ministre de François Hollande, l'ex-socialiste François Rebsamen, qui serait en quelque sorte la caution de gauche. Ça risque de faire un peu bricolage.
Comme l'a dit récemment la chef des écologistes, la méthode Bayrou est aussi claire qu'une notice Ikea. Ce qui n'est pas très gentil. Je ne dis pas qu'il faudrait suivre l'exemple belge, parce que là, ça commence à durer, mais enfin, se donner le temps de la réflexion n'est pas forcément une mauvaise chose.
Maintenant, la coïncidence avec la journée de deuil national va-t-elle être mal perçue ? À Mayotte, sûrement. En métropole, c'est moins sûr. Interrogé, le Premier ministre a affirmé que ça ne poserait pas de problème, à condition que le deuil soit respecté. A mon avis, ce ne sera pas si facile. Comme l'écrivait l'ecclésiaste dans l'Ancien Testament, il y a un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux, un temps pour naître, un temps pour mourir, un temps pour planter et un temps pour récolter. On pourrait ajouter un temps pour agir et un autre, pour se recueillir.