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La 29e conférence des Nations unies sur le changement climatique, ou COP29, s'ouvre ce lundi à Bakou (Azerbaïdjan). Plusieurs dizaines de milliers de participants (négociateurs, responsables politiques, experts, scientifiques, membres d'ONG, lobbyistes, journalistes...) y sont attendus jusqu'au 22 novembre, dans un monde en ébullition et sur fond de "come-back" du climato-sceptique Donald Trump à la fonction suprême des Etats-Unis.
Le menu de cette COP climat, qui se tient quelques jours après la COP16 biodiversité en Colombie, est à nouveau copieux. Certains diront indigeste tant les sommets sur le climat ont pris la fâcheuse habitude de décevoir les attentes. Le financement climat sera au centre de toutes les discussions à Bakou.
Les 198 pays représentés à la COP29 et l'Union européenne doivent se mettre d'accord sur un nouveau montant collectif de financement pour aider les pays en développement à lutter contre le dérèglement climatique et à y faire face. "NCQG", dans l'obscur jargon onusien ou "Nouvel objectif collectif quantifié".
"Cela fait trois ans que l'on discute au niveau technique et c'est l'impasse totale au niveau politique", résume Rebecca Thissen, du réseau Climate Action Network (CAN), qui représente près de 2.000 ONG. "Qui paie? Combien? Qui reçoit? Quel type de financement? A quoi cela va servir? Autant de questions qui ne sont pas encore tranchées. En deux semaines, les négociateurs vont devoir abattre un boulot colossal pour trouver un accord juste et équitable, qui s'attelle à restaurer la confiance entre les parties, mise à rude épreuve dans le climat actuel."
L'accord de Paris prévoit en effet que les Etats parties au traité s'entendent pour 2025 sur ce nouveau montant, à partir du plancher de 100 milliards de dollars par an en vigueur en principe depuis 2020. L'objectif actuel (2020-2024) n'a été atteint qu'en 2022, avec deux ans de retard. Les pays en développement veulent démultiplier le futur objectif.
Certains montants ont déjà été évoqués ces derniers mois: 1.000, 1.100, 1.300 milliards de dollars et même davantage... Des estimations évaluent les besoins pour l'atténuation du changement climatique, l'adaptation à ses conséquences néfastes et les pertes et préjudices liés à celui-ci à quelque 1.000 milliards de dollars annuels! Du côté des pays développés, c'est le silence: aucun montant n'a encore été avancé, sans doute par tactique.
Contenir la hausse du mercure
Les négociations du sommet de Bakou porteront aussi sur les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre, toujours largement insuffisants pour contenir la hausse du mercure bien en-deça de +2°C et si possible à +1,5°C, comme l'ambitionne l'accord de Paris. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre continuent toujours d'augmenter, certes moins rapidement, alors qu'il faudrait pratiquement les diviser par deux d'ici à 2030.
L'urgence climatique est plus que jamais prégnante: catastrophes naturelles en cascade, températures des océans sans précédent et records de chaleur successifs sont là pour en témoigner. Les engagements pris par les Etats et l'Union européenne en vertu de l'accord de Paris, les "contributions déterminées au niveau national" (CDN ou NDC en angais) sont insuffisantes à ce stade et conduisent le monde vers un réchauffement de +2,6°C, si tant est qu'elles soient pleinement mises en oeuvre.
L'accord de Paris prévoit toutefois que les pays adoptent tous les cinq ans de nouvelles CDN. Ces engagements renforcés doivent être déposés pour début 2025, au milieu d'une décennie jugée, par les scientifiques, critique pour le climat. Mais certains pays profiteront sans doute du sommet organisé dans la capitale azérie pour avancer leurs ambitions.
Le Brésil, qui accueillera la COP30 l'an prochain, vient d'ailleurs d'annoncer sa nouvelle CDN qui prévoit désormais des réductions d'émissions de gaz à effet de serre de 59% à 67% d'ici à 2035 par rapport à 2005. La COP29 se déroulera aussi alors que le fonds pour les pertes et préjudices dus au changement climatique, dont le principe avait été décidé à la COP27 de Charm el-Cheikh il y a deux ans, et dont l'adoption avait été entérinée à Dubaï (COP28) l'an dernier, devient opérationnel.
Ce fonds reste cependant largement désargenté (il est pourvu à hauteur d'un peu plus de 700 millions de dollars), malgré les contributions de la Belgique et de la Wallonie, qui ont été précurseurs en la matière. La COP29 permettra-t-elle d'abonder davantage ce fonds? Deuxième COP climat consécutive à se dérouler dans un Etat pétrolier, la COP29 revêtira à n'en point douter une forte dimension énergétique.
Les observateurs ne manqueront pas de scruter les conclusions, fruits d'âpres négociations, du sommet et le sort qu'il y sera réservé aux énergies fossiles, dont la combustion est la principale cause du réchauffement climatique.
Délégation belge
À Bakou, la Belgique sera représentée par une délégation d'environ 140 personnes, emmenée en début de sommet par le Premier ministre en affaires courantes, Alexander De Croo, dont le discours est attendu mardi. Les ministres fédérales Zakia Khattabi et Tinne Van der Straeten se rendront aussi à Bakou, de même que le ministre bruxellois du Climat Alain Maron et son homologue flamande, Melissa Depraetere qui rompt avec la politique de la chaise vide pratiquée depuis plusieurs sommets climat par sa prédécesseure, Zuhal Demir. En revanche, aucun ministre wallon ne fera le déplacement, une première depuis 10 ans pour une COP climat.