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Après l'attaque d'un fourgon pénitentiaire en France qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, la sécurité lors des transports de détenus est pointée du doigt. Comment les transports de détenus sont-ils organisés en Belgique ? Existe-t-il des mesures de sécurité particulière pour les agents de police ?
Tout d'abord, les transports en fourgon sont répartis en fonction du niveau de menace. Il y a d'abord le premier niveau, soit un transfert de détenus en groupe qui ne représente pas de danger, que ce soit pour eux-mêmes ou pour autrui. Ensuite, le niveau deux concerne les détenus qui représentent un danger interne, autrement dit des personnes qui ont l'habitude de refuser les ordres et qui présentent un risque de rébellion. Vient enfin le niveau trois, lorsqu'une personne est dangereuse en interne et/ou susceptible d'être aidée à l'extérieur.
Cours et Tribunaux, prisons et hôpitaux
Lors des transferts en fourgon, les détenus sont accompagnés par des policiers de la "DAB", soit la direction de la sécurisation, un service qui dépend de la Police Fédérale. Parmi les missions de ces agents, il y a le transport vers les Cours et Tribunaux, autrement dit, le transport des détenus entre une prison et un palais de justice pour y comparaître devant un tribunal. Les personnes en détention peuvent aussi faire l'objet d'un transfert entre deux prisons. Enfin, il arrive parfois que les détenus soient également transférés dans des hôpitaux pour y être soignés. "Les agents de la DAB s'occupent également d'autres types de transports, comme les personnes mineures et les personnes internées. Ce ne sont donc pas toujours des détenus" indique An Berger, porte-parole de la Police Fédérale. Ce travail était auparavant assuré par le SPF Justice jusqu'en 2017, avant de passer aux mains de la Police Fédérale.
Outre les opérations de sécurisation assurées par la "DAB", il existe des opérations de protection assurées par la "DAP", soit la direction de la protection. Les agents du "DAP" s'occupent des transferts de détenus lorsque la menace est plus élevée, à l'image d'un transfert d'un terroriste par exemple. Pour chaque transfert, rien n'est laissé au hasard puisqu'une analyse des risques est systématiquement prévue en amont par la Police Fédérale, en fonction de la situation, du contexte ou encore de la nature du détenu. "Si le transfert est considéré comme étant trop à risque, alors il ne sera pas réalisé" précise la porte-parole.
Dès lors, les fourgons bénéficient-ils d'escortes policières extérieures, comme des motards ? Encore une fois, ces escortes ne concernent que les cas où la menace est plus élevée. Les attaques de fourgon quant à elles sont "très rares" précise la porte-parole. Les fourgons ont par ailleurs le droit de circuler en priorité si cela est nécessaire, et, à l'image d'une ambulance, peuvent passer au feu rouge ou forcer les usagers de la route à céder le passage. Mais alors, quid des mesures de sécurité particulières pour les agents lors du transport en fourgon ? Sur ce sujet, la porte-parole ne peut y répondre par souci de discrétion.
Manque de considération
Pour autant, la réalité du terrain est parfois difficile, comme on nous le confirme du côté du syndicat de police Sypol-EPI (Syndicat de la Police belge, de la Sûreté de l'Etat et des Établissement Pénitentiaires). "En France, il y a une reconnaissance de la fonction, ils ont un vrai statut ce qui n'est pas le cas chez nous" déplore d'emblée Daniel Delbart, responsable du syndicat Sypol-EPI. "Là-bas, il existe une brigade spéciale d'intervention (ÉRIS), soit une vraie police pénitentiaire. Ils sont mieux formés et ont d'autres moyens que nous ici en Belgique. En Belgique, on dépend uniquement de la police DAB" explique le responsable qui s'inquiète du "danger de la profession qu'ils exercent."
Si les agents de la DAB sont aujourd'hui armés, "ce n'était pas le cas auparavant lorsque c'était le corps de sécurité du SPF Justice qui assurait la mission." Selon lui, les agents de la DAB ne sont pas suffisamment formés par rapport à un policier qui a dû faire un an d'école de police. "Quand on voit le nombre de fusillades aujourd'hui en Belgique, il est temps de revoir notre système pénitentiaire" explique par ailleurs celui qui déplore que "le grand banditisme n'est plus ce que c'était à l'époque", les bandits avaient d'après lui un certain "code d'honneur", là où de nos jours, "ils n'hésitent pas appuyer sur la gâchette pour un rien."
Afin de minimiser les risques d'incident, un travail de proximité en amont est primordial. La première sécurité d'un agent, c'est la "sécurité dynamique", autrement dit tout ce qui passe par "le contact et le dialogue avec la population des détenus." De cette manière, l'agent qui travaille au quotidien avec les détenus peut "obtenir certains renseignements qui peuvent être essentiels pour éviter ce genre de problèmes" conclut le responsable du syndicat Sypol-EPI. Pour rappel, en 2023, ce sont plus de 94 000 transferts qui ont été réalisés par la direction de la sécurisation (DAB).