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L'une, non voyante, n'avait jamais fait de vélo à haut niveau avant 2022, l'autre a rejoint le monde du para cyclisme après une carrière en pro: aux Jeux paralympiques, Anne-Sophie Centis et sa pilote Élise Delzenne formeront le seul tandem féminin français.
Les deux partenaires se souviennent de leur rencontre, il y a deux ans au Vélodrome de Roubaix, où l'AFP les a retrouvées lors d'un stage avec l'Équipe de France début juillet:
"On a fait tout de suite un essai sur piste...", se remémore Elise Delzenne, 35 ans.
"Ici, sur le central ! avec un vélo de route!", rajoute Anne-Sophie Centis, 40 ans, qui pointe la grande aire qui les accueille pour préparer les Jeux paralympiques (28 août-8 septembre) où elles s'aligneront sur la poursuite (piste), le contre-la-montre (route) et la course en ligne (route).
Jusqu'au début des Jeux, l'AFP s'intéresse au parcours d'athlètes non voyants et de leur(s) guide(s), des spécificités de leur association, aux liens créés au quotidien.
Au début de cette collaboration, "je n'avais jamais piloté de tandem et Anne-So n'avait jamais fait de vélo avec des cales automatiques, ni de piste", rappelle Élise Delzenne.
- "investissement à 1000%" -
La Nordiste, professionnelle entre 2013 et 2017, a notamment été sacrée championne de France sur route (2013) et a obtenu plusieurs titres sur piste.
A l'automne 2021, elle est contactée par le manager de la performance de Bleus, Laurent Thirionet, qui veut former un nouveau tandem pour Paris-2024 et connaissait Élise de par son palmarès. "Elle a été pro, c'est la meilleure cycliste régionale", explique l'ancien coureur.
Il l'associe alors à Anne-Sophie Centis, sportive douée en para athlétisme qui a perdu la vue à 20 ans, atteinte d'un glaucome et d'une cataracte congénitale.
Et si elle faisait aussi du cyclisme, "cela n'avait rien à voir avec ce qu'on me demandait là. J'avais un bonne condition physique, des résultats en para-athlé, mais pas en vélo. C'était un pari".
Cette kinésithérapeute découvre aussi le sport de haut niveau, qui "impacte tous les pans de la vie. C'est un investissement à 1000%. J'ai pu bénéficier de l'expertise d'Elise par rapport à ça".
- comme un couple -
Près de trois ans plus tard, les automatismes sont plus naturels. Sur la piste, elles viennent d'enchaîner trois efforts d'entre 10 et 12 tours. Élise Delzenne est positionnée à l'avant, tandis qu'Anne-Sophie pédale juste derrière.
"Les deux pédaliers sont joints, donc la cadence sera la même" explique Anne-Sophie Centis, "par contre les puissances se cumulent donc l'enjeu est de vivre l'effort ensemble. Il faut arriver le plus possible à la symbiose et à la cohésion pour que le tandem reste efficace".
Et pour cela, "c'est beaucoup de sensations, il n'y a pas besoin de se parler", ajoute la coureuse qui sur la piste - contrairement à la route - n'a pas forcément besoin de guidage.
Le duo compte à son palmarès deux médailles de bronze aux championnats du monde de Saint-Quentin-en-Yvelines dès 2022 puis une encore, un an plus tard à Glasgow sur route.
"Mes premières médailles mondiales", se souvient Élise Delzenne.
"Cela décuple le bonheur" de travailler en tandem, dit Anne-Sophie Centis. Mais l'inverse est aussi vrai dans l'échec.
"C'est difficile aussi des fois, cela se passe moins bien et on n'a pas les résultats souhaités. Il faut l'accepter, ce n'est pas la faute de l'une ou de l'autre", dit Delzenne.
"C'est comme dans un couple, il y a des compromis, des discussions, des débriefs à froid mais je pense qu'à chaque fois on a réussi à se relever de ça", abonde Centis.
Aux derniers championnats du monde sur piste en mars à Rio, le tandem n'était pas parvenu à remonter sur le podium.
Mais désormais, le guidon est tourné vers Paris où les deux coéquipières vivront leurs premiers Jeux.