Sergio Agüero, Gonzalo Higuain, Javier Mascherano, Lionel Messi... Les stars de l'Argentine, toutes trentenaires, ont sans doute disputé en Russie leur dernière Coupe du monde. Achevée en 8e, elle ouvre une période d'incertitudes à tous les niveaux du football argentin.
Adios 'Leo', adios 'Kun', adios 'Pipita', adios 'Masche'... Avec encore peut-être Angel Di Maria et Lucas Biglia, ils pourraient être nombreux à annoncer leur retraite internationale dans les prochains jours. Ils seront en tout cas trop vieux pour tenter d'offrir à l'Argentine une troisième étoile en 2022, lors du Mondial au Qatar.
"C'est limite une génération sacrifiée", déplore le spécialiste du football sud-américain Nicolas Cougot, responsable du site Lucarne Opposée. "Bien sûr, ils ont atteint trois finales, ce n'est pas négligeable mais on a presque l'impression que c'est un gâchis. Individuellement, cette Argentine n'est pas moins bonne qu'en 1986", date de son dernier sacre mondial avec Diego Maradona. "Elle est sans doute même meilleure".
Les successeurs ne sont pas au niveau, pour le moment. Hormis la star de la 'Juve' Paulo Dybala, 24 ans et des qualités qui lui ont déjà valu des comparaisons avec Messi, les jeunes manquent. Les autres Argentins de cette génération ne sont pas nombreux à être installés dans un grand club européen. Et Mauro Icardi, rayonnant capitaine de l'Inter Milan, est blacklisté en Argentine depuis qu'il a "piqué" la compagne d'un autre international, Maxi Lopez.
Le cas épineux du sélectionneur
Il va falloir un architecte de talent pour procéder à cette mission reconstruction. Mais qui? Jorge Sampaoli a perdu des plumes dans ce parcours raté en Russie, entre choix tactiques largement contestés et rumeurs de fractures avec les cadres du vestiaires. Ceux-ci vont s'en aller, mais le management sous tension de Sampaoli peut-il convenir à une Argentine aux abois?
Il pourrait quand même rester, car l'ancien entraîneur de Séville s'était vu offrir un contrat de 5 ans à son arrivée à la tête de l'Albiceleste, en juin 2017. Le rompre unilatéralement pourrait coûter à la Fédération argentine, l'AFA, entre 15 et 20 millions d'euros selon les sources, alors que l'instance est depuis plusieurs années en proie à des difficultés financières...
Même si 'Sampa' prenait sur lui la responsabilité de l'échec et acceptait de démissionner de son poste, qui voudrait prendre la tête de cette sélection malade? L'Albiceleste a déjà éreinté trois sélectionneurs en deux ans, Tata Martino, Edgardo Bauza et donc Sampaoli. Et les grands noms du banc argentin, Mauricio Pochettino, Diego Simeone, Marcelo Gallardo, Marcelo Bielsa, sont tous sous contrats avec un club.
La fédération, l'heure d'une refondation?
La réflexion ne peut toutefois s'arrêter à la question du sélectionneur. Elu président en mars 2017, après trois ans de chaos à l'AFA, l'inexpérimenté Claudio Tapia échappera-t-il à la remise en cause?
"L'organisation change, les joueurs changent, les entraîneurs depuis quelques années n'arrêtent pas de changer...", observe l'ancien entraîneur de Nantes et de la Real Sociedad Raynald Denoueix. "Ils ont voulu privilégier le résultat mais sans s'interroger sur comment l'obtenir. Or, le résultat, c'est la conséquence, pas l'objectif. On s'y prend à l'envers parce que, sans repères, on n'a pas de résultats".
Nécessité de cadrer la détection des talents, de privilégier une organisation collective valable à tous les niveaux, en A comme dans les équipes de jeunes, de construire pour le long-terme... Les solutions existent pour l'AFA.
"Quand on voit les joueurs qu'ils arrivent à sortir malgré un contexte global qui ne fait rien pour le favoriser", conclut Nicolas Cougot: "S'ils s'y mettaient vraiment ils seraient intouchables". Dans le cas contraire, l'Argentine pourrait rester longtemps orpheline de son Messi et de sa belle génération.
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