Partager:
Le prestigieux FBI, cette police fédérale accusée d'abus de pouvoir par le président Donald Trump dans l'enquête russe, est devenue une institution servant de défouloir pour certains élus, selon les constats d'experts ou d'anciens agents.
S'étant ces deux dernières années retrouvé immergé au coeur du chaudron politique --enquêtant en 2016 à la fois sur Hillary Clinton et sur l'équipe de campagne de Donald Trump-- le FBI doit désormais redorer son blason, soulignent-ils aussi.
"Il y a des choses préoccupantes à propos desquelles moi-même, de nombreux anciens agents et également des employés actuels, aimerions avoir une explication complète", confie à l'AFP James Gagliano, un ex-enquêteur fédéral.
Ces dernières années, des décisions prises par la haute direction policière "ont eu un effet délétère sur la réputation du FBI", ajoute celui qui enseigne désormais à la St John's University de New York.
Le FBI s'est en effet vu reprocher d'avoir favorisé Hillary Clinton puis d'avoir causé sa défaite électorale, en interrompant et en rouvrant l'enquête sur ses emails envoyés d'un serveur privé.
A l'opposé, le FBI est également accusé par Donald Trump de mener une cabale visant à le déposséder de sa victoire électorale de 2016, en cherchant à prouver que celle-ci a été obtenue grâce à des manoeuvres déloyales et concertées avec Moscou.
Le président américain a encore dénoncé samedi une "chasse aux sorcières russe (qui) continue indéfiniment". Il a aussi assuré samedi qu'une note très controversée et critique du FBI, rédigée et publiée par des républicains du Congrès, l'innocentait dans l'enquête russe.
La poursuite de ces investigations "est une honte pour l'Amérique", a conclu M. Trump, continuant par ces mots à mettre en cause l'intégrité des plus hauts échelons du ministère de la Justice et du FBI.
La note confidentielle en question, déclassifiée par le président, décrit un abus de pouvoir présumé du FBI lors de la mise sur écoute d'un ancien membre de l'équipe de campagne du républicain avant l'élection de novembre 2016.
- Limogeages et départs -
M. Trump avait limogé l'an dernier le chef du FBI, James Comey, et lui avait choisi son remplaçant, Christopher Wray. Ce dernier s'est placé en position délicate ces derniers jours, en défendant l'honneur du FBI et en prônant la non-publication de la note.
"C'est facile de parler", a écrit M. Wray à destination des 35.000 salariés du FBI, dans une lettre interne consultée par l'AFP.
Les tensions actuelles en évoquent d'autres. Le premier directeur du Federal Bureau of Investigation (FBI), John Edgar Hoover, a transformé cet organisme, qu'il a dirigé pendant quarante-huit ans, en une institution redoutée aussi bien par les malfaiteurs que par les responsables politiques.
De Harry Truman à Richard Nixon, des présidents américains ont envisagé de limoger Hoover mais y ont renoncé vu l'influence qu'on lui prêtait.
La police fédérale américaine dépend du ministère de la Justice et son chef est désormais nommé pour un mandat de 10 ans, une durée inhabituelle censée prémunir le détenteur du poste des pressions extérieures. Mais certains disent que cet objectif n'est pas rempli.
- Image écornée -
Et James Comey, malgré tous ses efforts pour tenter de convaincre que ses actes d'enquête sur les emails de Hillary Clinton étaient apolitiques, s'est retrouvé dans la tourmente.
"L'enquête sur Clinton a placé le FBI au centre d'une bataille politique", souligne Jeffrey Ringel, du cabinet d'étude Soufan Group. "Quelle que soit l'issue, le FBI ne pouvait qu'y laisser des plumes".
La semaine dernière le directeur-adjoint du FBI, Andrew McCabe, devenu la bête noire de M. Trump, a été poussé au départ. Trump lui reprochait pêle-mêle sa proximité avec Comey, ses sympathies démocrates présumées, ainsi que les liens supposés de son épouse avec un proche de Hillary Clinton.
Les critiques de M. Trump contre le FBI se sont intensifiées en décembre quand il est apparu qu'une juriste du Bureau entretenait une liaison avec un enquêteur, les deux amants affichant leurs sympathies pro-Clinton et anti-Trump.
Tout ceci "est perturbant", admet M. Gagliano, en assurant toutefois que l'immense majorité des agents, jaloux de leur indépendance, mettent de côté leurs convictions politiques dans leur travail. "Leur impartialité, leur absence de but politique, ont été compromises par simplement quelques personnes", affirme-t-il.