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"Mati n'existe plus": silence désolé, carcasses de voitures ou d'animaux calcinées, la petite ville côtière à l'est d'Athènes était réduite en cendres mardi, après l'incendie qui a tué plus de 50 personnes dans la zone, dont 26 regroupées sur un même terrain.
Les corps calcinés de ces dernières victimes ont été retrouvés "par groupes de 4 ou 5 personnes, peut-être des familles, des amis ou des inconnus qui s'étaient enlacés dans une dernière tentative de se protéger, alors qu'ils tentaient de gagner la mer, à 30 ou 40 mètres de là", témoigne Vassilis Andriopoulos, un des sauveteurs de la Croix-Rouge qui a découvert l'horrible spectacle mardi matin.
Il déplore la présence de "petits enfants" dans ce groupe.
Fuyant les flammes, ils ont semble-t-il été piégés entre le feu et la falaise qui dégringole vers la mer sur une trentaine de mètres.
Une jeune fille ayant tenté de sauter un peu plus loin est morte, assurait sur place un voisin.
Dans la nuit, un photographe de l'AFP avait également trouvé non loin quatre corps de personnes cherchant sans doute à fuir, trois sous une voiture, un sous une moto.
Mardi matin, les habitants évacués revenaient constater les dégâts. Certains étaient encore à la recherche de proches disparus: une femme cherche sa fille, une autre son mari et son fils, faisant craindre un bilan plus lourd encore.
Sur la rue principale, tout est noir, en particulier les grands pins qui entourent les maisons. La mer est grise, l'odeur de brûlé omniprésente.
Les canadairs traversent le ciel par intermittence, une mare de voitures calcinées jonche la chaussée. On voit des cadavres de chiens.
Stella Petridi, une retraitée de 65 ans, en avait six. Elle était à l'église quand, sentant le feu venir, elle s'est précipitée chez elle où ils étaient enfermés. Mais elle n'a même pas pu ouvrir la porte de sa maison qui brûlait déjà.
"En cinq ou dix minutes"
Elle n'a eu d'autre choix que de courir à la plage, où un patrouilleur l'a récupérée, avec d'autres, vers 04h00 du matin, pour les mettre à l'abri un peu plus loin dans la ville portuaire de Rafina, dont le maire Evangelos Bournous témoigne que "Mati n'existe plus".
Raffi Zeronnian, le responsable du gymnase de Rafina, a pour sa part fait demi-tour sur la route de ses vacances pour venir ouvrir le bâtiment à quelques dizaines de rescapés.
Athanasia Oktapodi, 60 ans, le visage noirci et les yeux rougis, y témoigne de la vitesse des flammes, qualifiée de "foudroyante" par les pompiers.
"J'ai vu le feu descendre la colline vers 18h00, en cinq ou dix minutes il était dans mon jardin". Comme beaucoup de maisons de Mati, la sienne est environnée de hauts pins.
"Ils ont pris feu. Je suis sortie comme une folle et j'ai couru à la plage, je me suis mis la tête dans l'eau. Puis les patrouilleurs sont venus".
La plupart des rescapés sont restés ainsi dans la mer en regardant les flammes pendant plusieurs heures.
Lela Demertzi, 53 ans, a été sauvée elle aussi en se rendant à la plage, portant sa mère souffrante sur son dos. "Mon mari est resté, il a tout fait pour sauver notre maison secondaire, et il a réussi", se félicite-t-elle.
Le Premier ministre Alexis Tsipras a pourtant enjoint les habitants à délaisser leurs biens pour protéger leurs vies.
Outre les pins, particulièrement inflammables, plusieurs voisins expliquent avoir entendu aussi de nombreuses explosions: les bouteilles de gaz souvent présentes dans ces nombreuses résidences de vacances.
Alina Marzin et sa famille, des touristes allemands de Wuppertal en pension à l'hôtel pieds dans l'eau Cabo Verde, ont attendu les secours jusqu'à 01h30 dans le restaurant de l'hôtel, n'ayant avec eux que les sacs à main, avec la peur de voir les fenêtres exploser à tout moment.
Ils devaient embarquer à Rafina pour l'île de Naxos, mais ont tout annulé. "Des vacances horribles", souffle sa mère.