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Thierry, un habitant de Rhode-Saint-Genèse, s'est fait flasher à plusieurs reprises par un nouveau radar tronçon placé dans une zone 30 située près de son domicile. Après s'être fait surprendre alors qu'il connaît bien les lieux, il dénonce le manque de communication autour de l'installation de cet appareil. La commune, qui annonce que quelque 3.500 PV ont été dressés en décembre, explique comment l'arrivée de ce radar a été communiquée.
Thierry habite Rhode-Saint-Genèse (province du Brabant flamand) depuis sept ans, et depuis le mois de décembre dernier, il doit encore davantage adapter sa vitesse quand il circule aux abords de son quartier. Un nouveau radar tronçon a été installé sur la Chaussée de la Grande Espinette jusqu'à Rue du Hameau. Cet appareil l'a surpris et il a reçu plusieurs PV en peu de temps. De nombreux autres automobilistes ont également reçu une amende.
"Si vous connaissez un peu Rhode-Saint-Genèse, il y a un tronçon important qui s’appelle l’Avenue de la Forêt de Soignes, et il y a un autre tronçon qui est la Chaussée de Waterloo. Ma rue est un raccourci entre les deux. C’est un tronçon qui est utilisé par beaucoup de gens, qui roulent souvent très vite. Je suis ainsi le premier à être favorable à ce que l’intégralité du quartier soit en zone 30", souligne-t-il.
Il y a quelques années, une zone 30 a été aménagée notamment aux abords de l'école De Hoek. Une zone de contrôle de vitesse qui a été étendue en fin d'année 2024. Si un feu intelligent a été installé pour amener davantage de sécurité, la commune a donc décidé d'ajouter un radar tronçon afin de rendre ce tronçon plus sûr.
"Mais il y a eu peu de communication autour de l'élargissement de cette zone 30 et du nouveau radar", selon Thierry. "Ils ont beau vous dire qu’il y a eu une remorque de la police pour l'annoncer, mais personne n’y fait attention, on conduit. Il était très certainement écrit attention, nouvelle zone aménagée. Pourtant, je prends ce trajet 4 à 6 fois par jour. Et donc très rapidement, le radar tronçon a été enclenché début décembre. Sauf que je n’avais pas vu qu’il était actif. J’ai continué durant tout le mois de décembre à rouler à maximum 50km/h et à freiner à la zone 30 telle qu’elle était avant. Mais si vous roulez à 50km/h, jusqu’au début de l’ancienne zone 30, vous êtes dedans."
Thierry estime avoir été "pris au piège" et regrette un "manque de communication" autour de ce projet.
"A mon avis, on doit en être à 4.000 PV aujourd’hui, après l'arrivée de ce radar. Je trouve que les automobilistes ont été pris au piège, car nous n'avons pas été avertis. Ils disent que "oui", mais franchement les panneaux sont tous petits. Quand vous avez l’habitude de quelque chose, vous faites attention à la route. Vous ne faites pas attention à un nouveau panneau installé. Il y a des groupes Facebook pour la commune et là aucune communication sur ces radars. On nous dit que ça a été mis dans le magazine de Rhode, mais qui lit cela ? Une partie de mon budget vacances est partie. Ils ont vraiment cherché la rentabilité. Je peux vous dire que le radar est payé", conclut-il.
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Combien d'automobilistes ont déjà été flashés par ce radar dans cette rue?
Pierre Rolin, le bourgmestre de Rhode-Saint-Genèse, confirme que durant le mois de décembre 2024, quelque 3.500 procès-verbaux ont été dressés. "Sur un mois de contrôles, il y a à peu près 75.000 véhicules qui sont passés dans les deux sens. Cela veut dire que 95% des véhicules ne sont pas en infraction", déclare-t-il. "Je sais qu’il y a beaucoup de réactions sur les réseaux sociaux, entre autres des personnes qui ont été flashées à plusieurs reprises. Une personne m’a dit avoir été flashée 22 fois, et j’en ai rencontré une autre qui a été flashée à 6 reprises. Cela veut dire qu’en tenant compte du fait que certaines personnes ont été flashées plusieurs fois, en termes de conducteurs, on est encore en-dessous des 5%."
Ce radar tronçon a rapidement provoqué des changements de comportement chez les automobilistes, selon les premières observations des autorités.
"De moins en moins de véhicules se font prendre. Mais il y a aussi des changements d’itinéraire. On voit que le nombre de véhicules passant par cet endroit diminue dans le temps. Ce qui est aussi bon en termes de sécurité", ajoute Pierre Rolin.
Perdre ce temps sur une journée, ça n’est pas dramatique
Pour le maïeur, installer un premier radar tronçon à Rhode-Saint-Genèse dans cette zone était "une évidence".
"Le tronçon de 300 mètres sur lequel il y a ce radar est un tronçon où deux écoles sont desservies. Il y a également un centre sportif et une crèche à côté. Il y a également un lieu de restauration solidaire à cet endroit. Cette zone est très fréquentée par des piétons, par des enfants. Donc, nous sommes ravis de voir que des personnes changent leur comportement et changent leur itinéraire", se réjouit-il. "En termes de sécurité, il était évident qu’il fallait installer un radar là, pour absolument faire réduire la vitesse. Il y a eu des accidents par le passé, mais il faut aussi agir de façon préventive. Il vaut mieux anticiper et prendre toutes les mesures avant. Il faut aussi se rendre compte que sur ce tronçon, la différence entre un automobiliste qui roule à 50km/h, et un automobiliste qui roulerait à 30, est à peu près de 14 secondes. Perdre ce temps sur une journée, ça n’est pas dramatique."
Pour la commune, le coût pour le placement de ce radar sera "faible voire quasi inexistant à termes".
"Une société externe a placé le radar. La police fait aussi partie de cette équipe, ainsi qu’une Intercommunale. Au départ, la société externe doit bien sûr rentabiliser son investissement. Mais sur base d’autres communes que nous avons suivies, on voit que le nombre d’infractions chute très vite. Il faut savoir qu'au départ, il faut parfois attendre 10 à 13 jours avant de recevoir le premier PV. Des personnes se font ainsi parfois prendre plusieurs fois, car elles n’ont pas adapté leur comportement."
L’information a circulé à toute vitesse sur les réseaux sociaux
Quant aux reproches formulés notamment par Thierry sur la communication faite autour de l'installation du radar, Pierre Rolin explique ce que la commune a mis en place.
"Dans un premier temps, le radar a été placé, mais n'a pas été mis en fonctionnement tout de suite. On a attendu d’avoir les panneaux signalétiques correspondants pour avertir les automobilistes de la présence d’un radar tronçon avant de le mettre en route. (...) On a communiqué sur place en l’indiquant au sol, en mettant des panneaux utiles pour avertir. Et les réseaux sociaux font très vite le travail. Ils sont très rapides dans la transmission de l’information, qui dans ce cas-ci a circulé à toute vitesse", conclut-il.
Peut-on localiser tous les radars de vitesse?
A partir de la situation vécue par Thierry, nous avons voulu répondre à la question suivante: peut-on localiser tous les radars de vitesse, fixes ou tronçons? Voici la réponse de Benoît Godart, le porte-parole de Vias (l'Institut pour la sécurité routière):
"Il est très difficile de connaître avec précision le nombre et l’emplacement des radars. Pour les radars tronçons en Flandre, c’est possible. Il existe une carte qui reprend tous ceux situés sur une nationale ou une autoroute. A cela, s’ajouteront toutefois les radars tronçons gérés par les communes et pour lesquelles il n’existe pas de carte", indique-t-il.
Pour les radars en Wallonie, quelques sites existent, mais ceux-ci ne sont pas à jour. Selon des chiffres récents recueillis par Vias, il y a 506 radars fixes, 75 radars tronçons et 31 radars feux en Wallonie, mais tous ne fonctionnent pas. "Il n’est pas possible de savoir combien seront installés à l’avenir, car cela dépend d’une concertation entre la Région, la Police et les Parquets. La Région a reçu 250 demandes d’installation en 2024, mais tous ne pourront pas être installés", précise Benoît Godart.
Tout le monde veut un radar en face de chez soi
L'Institut pour la sécurité routière indique par ailleurs qu'un radar tronçon fait baisser le nombre d’accidents graves de 50% environ (chiffres récents basés notamment sur les radars tronçons de l’E42 en Wallonie) et les radars fixes de 30% environ en fonction de leur emplacement. "Le paradoxe est que tout le monde veut un radar en face de chez soi (on reçoit de très nombreuses demandes à ce sujet) mais que les conducteurs râlent quand il se font flasher ailleurs", poursuit Benoît Godart.
Quel est l’impact des radars sur le comportement des conducteurs ? Vias a mené une enquête en avril 2024, qui montre que 2 conducteurs flashés sur 3 adaptent leur comportement. "Une amende porte ses fruits si elle induit un changement de comportement de la part du conducteur qui a commis l’infraction. Après avoir reçu un P-V pour excès de vitesse, 2 Belges sur 3 (66%) disent avoir respecté les limitations de vitesse de manière plus scrupuleuse. Bien entendu, l'aspect financier joue un rôle dans l'incitation à changer de comportement. Ainsi, 1 personne sur 3 (34%) a payé entre 101 et 300 euros d'amende. Près de 7% ont dû débourser plus de 300 euros l'année dernière pour leur(s) amende(s)."
L'étude réalisée par Vias a également montré que 7 Belges sur 10 n’ont pas reçu d’amende en 2024."Au total, 30% des Belges se sont vu infliger une amende de roulage au cours de l’année écoulée, toutes infractions confondues. La grande majorité des usagers de la route n’a donc pas reçu de contravention. Notons que les hommes (33%) reçoivent plus souvent des amendes que les femmes (26%). Des différences sont également observées au niveau régional. Un tiers des usagers en Flandre (32%) et à Bruxelles (33%) ont reçu une amende, contre 25% seulement en Wallonie. 96% des usagers ayant reçu une contravention étaient des automobilistes, 4% des cyclistes, même si ces derniers ne sont évidemment pas concernés par les excès de vitesse."
L'Institut pour la sécurité routière livre enfin d'autres chiffres concernant les procès-verbaux: 60% des contrevenants ont reçu une seule amende, 27% en ont reçu au moins deux et 13% en ont reçu 3 ou plus.
Objectif de 0 tué sur les routes d’ici 2050
La vitesse excessive étant l’un des trois "grands tueurs" sur la route, avec la distraction et la conduite sous influence, elle fait donc l’objet d’une attention particulière pour diminuer l’insécurité routière en Belgique. Au niveau fédéral, Georges Gilkinet (Ecolo), ministre sortant de la Mobilité, a ainsi encouragé ces dernières années à poursuivre les marathons de contrôle de la vitesse avec la police. Des mesures pour mieux lutter contre la récidive (formation de réintégration) ont été également été mises en place.
"Les statistiques de la sécurité routière indiquent que nous allons dans le bon sens (les personnes décédées au cours d’un accident de la route ou des suites de blessures dans les 30 jours suivant l’accident : 644 en 2019, 540 en 2022, 501 en 2023 (le nombre de victimes de la route le plus bas jamais atteint en Belgique, hors période Covid))", précise Benjamin Bergiers, le porte-parole de Georges Gilkinet. "Il faut poursuivre les efforts pour hisser la Belgique dans le peloton de tête de la sécurité routière en Europe et atteindre l’objectif de 0 tué sur les routes d’ici 2050, et ainsi permettre à tous les usagers de se déplacer de façon sûre."
Combien de nouveaux radars seront placés en 2025 en Wallonie ?
Le SPW Mobilité et Infrastructures dit avoir reçu 250 demandes de placement de radars de la part des communes wallonnes et des zones de police. "Actuellement, nous sommes dans la possibilité d’en placer 150 par année (environ 40 radars tronçons par an ; 100 radars fixes par an ; 10 radars feux par an) car il faut noter que beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte pour l’installation d’un radar et sa mise en fonctionnement : électricité, télécommunication, homologation, protection des données, génie civile, protocole d’accord,…"
Combien de radars ont été installés jusqu’à présent en Région wallonne ?"Actuellement, 349 radars ont été installés par le SPW (68 radars tronçons, 261 radars fixes et 20 radars feux), auxquels 81 radars fixes appartenant aux zones de police peuvent être ajoutés", précise le SPW.
Pourquoi placer de plus en plus de radars sur les routes wallonnes ? Stéphanie Gomins, la porte-parole du ministre wallon de la Mobilité, François Desquesnes, répond: "Les radars sont installés pour dissuader les conducteurs de dépasser les limites de vitesse et ainsi réduire les accidents graves. L’objectif est de sauver des vies, pas de flasher. Nous plaçons des radars fixes là où des problèmes de vitesse sont objectivés et des radars mobiles selon les besoins des zones de police. La Wallonie finance par ailleurs la location de Lidar pour des contrôles aléatoires par les polices locales, ce qui permet d’augmenter le nombre de contrôles de vitesse. La vitesse est une priorité pour les futurs États Généraux de la Sécurité Routière que le Ministre Desquesnes lancera le 18 février."
Pourquoi faudrait-il communiquer la position des radars ? "Indiquer les radars aide à respecter les limitations de vitesse. En informant les conducteurs de la présence de radars, on les encourage à ralentir et à conduire prudemment, plutôt que de les punir après coup. Cela les fait ralentir dans les zones à risques. Par ailleurs, en annonçant les emplacements des radars fixes montre que l’objectif est la sécurité. Les radars mobiles, eux, ne sont pas annoncés pour encourager à un respect global des limitations de vitesse", conclut Stéphanie Gomins.