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Philippe Etchebest, le chef cuisinier bordelais vedette de TV, interpelle le gouvernement pour "maintenir en survie tous les établissements, de la crêperie aux 3 étoiles" qui ne pourront pas rouvrir avant l’été en raison des mesures de confinement, "cauchemar national" pour les restaurateurs.
Mais "avant de penser à la réouverture, pensons à sauver les entreprises qui sont sous perfusion, c’est la priorité", affirme-il mardi dans un entretien avec l’AFP depuis sa résidence en Dordogne.
Membre du Collectif des restaurateurs du sud-ouest, un "groupe de réflexion de cinq professionnels" avec notamment le patron des Bistrot Régent, Marc Vanhove, ou des responsables aquitains de l’Union des métiers et industries de l’hôtellerie (UMIH), le chef du restaurant "Le 4e mur", au centre de Bordeaux, dit avoir été "approché pour essayer de trouver des solutions".
Sa priorité: "que nos entreprises puissent hiberner pendant ce confinement", sans faire faillite, "car aujourd’hui la grande majorité des restaurants n’ont pas de trésorerie" après les "mouvements sociaux depuis un an et demi", dit le chef étoilé.
"Les gens qui étaient au bord du gouffre, se retrouvent au fond du gouffre", lance-t-il avec l'une de ces formules qui font le succès de son émission "Cauchemar en cuisine" sur M6.
Auprès de Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics, puis encore lundi de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, il milite pour que "l’Etat prenne très rapidement des dispositions pour que les assurances puissent trouver des fonds et aider les entreprises, et que les banques prennent leur part à l’effort".
Une piste a été soumise à M. Le Maire "qui a été intéressé", dit-il: la prise en charge des pertes d’exploitation des restaurateurs un tiers par l’Etat, un tiers par les assurances, le tiers par les propriétaires.
"Les assurances disent qu’elles n’ont pas d’argent, plus d’argent ou pas assez, peu importe. Nous, on fait des emprunts pour survivre à cette crise, alors pourquoi les assurances n’en feraient-elles pas pour nous avancer cet argent? On rembourserait via des surprimes échelonnées sur une vingtaine d’années", dit-il.
Il dit aussi penser à "tout le système économique" autour des restaurants, "artisans, producteurs, débits de boisson", rappelant que les 229.000 cafés et restaurants de France génèrent 1 million d’emplois directs et un million indirects. "On est un gros maillon d’une chaîne et si ce maillon éclate, tout se casse la gueule, c’est l’effet domino".
- "Il y aura des dégâts" -
"Une 2e chose sera de rouvrir rapidement" mais "sous conditions" car "la santé est prioritaire", ajoute M. Etchebest, qui reconnaît que "les moyens financiers ou techniques manquent pour une réouverture sans mettre en danger salariés et clients".
Il indique travailler sur le sujet avec "un cabinet d’analyse sur un cahier des charges" mais laisse entendre que les implications sont colossales. Dans la restauration "nous savons travailler sur des mesures d’hygiène, on est formés pour ça mais on n’est pas formés pour tenir des Ehpad, car c’est ce qu’on va devenir si on fait ça", lance-t-il.
Par ailleurs, selon lui, une réouverture avec 50% de tables en moins pour respecter la distanciation sociale implique "50% de personnel en moins", en plus d'une reprise qui "ne se fera pas de suite", faute de clients.
"Aujourd’hui, on a le choix entre la peste et le choléra en plus du coronavirus. Y a pas de petits, de moyens, de gros, on est tous dans la merde", peste-t-il, réfutant toutefois "tenir un discours alarmiste et pessimiste".
"Il faut être réaliste face à la situation actuelle. A nous de trouver des solutions ensemble, et on va en trouver", dit-il en s'affirmant "optimiste".
"La reprise sera progressive et difficile. Il y aura des dégâts mais si on ne fait rien, 40% de nos établissements vont fermer, peut-être plus", prévient-il.