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La présidente de la cour d'assises du Hainaut, Martine Baes, a interrogé lundi Thomas Lesire, jugé pour le meurtre de Paulette Delpire, 83 ans, dont le corps sans vie a été retrouvé dans son appartement de la Cité Heureuse à Châtelet par son petit-fils, le 31 mai 2019, peu avant 23h. Elle a été frappée d'une cinquantaine de coups de couteau.
Chauve et barbu, l'accusé est âgé de 36 ans et déclare avoir vécu une enfance heureuse malgré la séparation de ses parents. Il a arrêté l'école à l'âge de 17 ans, quand il a appris qu'il allait être père pour la première fois. Cependant, il n'est pas resté avec la mère de l'enfant, car il ne l'aimait pas. Celle-ci parle plutôt d'une rupture en raison d'une consommation d'alcool importante chez l'accusé, qui avoue qu'il aimait bien faire la fête. Ancien ouvrier communal à la Ville de Châtelet, il a quitté le service voirie "où on faisait plus la fête qu'autre chose" pour être adjoint de son père, alors fossoyeur dans la même commune. Il habitait alors chez sa grand-mère, avant l'achat de sa maison et de sa rencontre avec une autre femme. Trois ans après leur rencontre, vers 2017, il a commencé à consommer de la cocaïne dont il est rapidement devenu accro. Il finançait son assuétude par des gains aux jeux ou des prêts, car son salaire partait très vite. "La seule personne que je n'ai pas remboursée est ma sœur", dit-il alors que d'autres ont déclaré, lors de l'enquête, ne pas avoir été remboursé. L'accusé chapardait aussi ses proches. En outre, il continuait à consommer de l'alcool, principalement des bières, et des joints de cannabis. "Je ne me suis jamais remis de la mort de ma grand-mère maternelle, je n'ai pas pu lui dire au revoir et merci de tout ce qu'elle avait fait pour moi. J'étais déprimé", a-t-il déclaré devant la cour. Il a cependant fait le choix de ne pas consulter des médecins. Il a aussi rompu avec sa compagne. "J'ai fui mes responsabilités, je voulais rester seul, car j'étais plus malin que tout le monde".
Toxicomane profond, refusant les aides, il prétend cependant qu'il était sevré au mois de mai 2019. Il a rapidement replongé et il a tué Paulette, qu'il connaissait depuis son enfance, car la victime était proche de sa maman et de sa grand-mère, qui habitaient toutes dans le même quartier. "Nous avions des rapports amicaux", dit-il. L'accusé dit ne pas savoir pourquoi il s'est rendu chez Paulette, le 31 mai 2019 et il ne conteste pas sa culpabilité, même s'il garde peu de souvenirs de cette journée tragique alors qu'il a donné des détails au juge d'instruction et aux experts psychiatres. Lundi, il a déclaré devant la cour qu'il ne se souvenait pas de ce qui s'était passé lors de cet après-midi du 31 mai.
L'accusé a vu quelques photos de la scène de crime. "J'ai arrêté après quelques-unes. Cela me faisait trop de mal. C'est incompréhensible, j'appréciais cette dame."
Elle continuait de crier et j'ai perdu le contrôle de la situation
Paulette a été massacrée d'une cinquantaine de coups de couteau et défigurée. Lors de l'enquête, il a déclaré, "le ton est monté entre nous, mais je ne sais plus exactement ce qu'elle m'a dit. Je me souviens lui avoir crié de se taire. Elle a renversé son verre de mousseux d'un geste délibéré de la main et elle m'a poussé de la main sans que cela ne me fasse tomber et je l'ai repoussée de même. Elle est tombée de sa chaise. Elle s'est mise à crier, mais je ne sais plus vous répéter ses mots. Je pense m'être mis sur elle ou à côté d'elle et lui avoir porté des coups avec mes mains au visage selon moi. Je pense que c'était des coups de poing mais tout cela est vague dans mon esprit. Elle continuait de crier et j'ai perdu le contrôle de la situation. J'ai l'impression que je n'étais plus moi-même, car ma conduite me semble aberrante et inexplicable. Je sais que je me suis emparé d'un couteau qui se trouvait sur la table et que je l'ai frappée à plusieurs reprises sans pouvoir vous donner un chiffre quelconque. Après les coups de couteau, je me suis relevé. Je sais que j'ai laissé le couteau sur place sans pouvoir dire où je l'ai déposé. Elle ne criait plus et j'ignore si elle respirait encore même si je sais avoir été fort violent."
Après avoir lavé ses vêtements, il s'est rendu dans un magasin de nuit pour acheter deux bières et un billet de loterie. "Je ne me souviens de rien", répète l'accusé, confronté aux éléments d'enquête comme des SMS envoyés à des amis dont l'un indiquait: "J'ai fait une connerie. J'ai tué quelqu'un. Tu sais me conduire en France?" Il ne se souvient de rien, se plaignant de ne pas être suivi par un psychologue en prison. "Je n'arrive pas à comprendre comment j'ai pu faire ça", conclut-il. La cour entendra ensuite le juge d'instruction et les policiers chargés de l'enquête.