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L'avocat général a requis jeudi à Paris 15 ans de réclusion criminelle à l'encontre de Thierry Ascione, soupçonné d'avoir été complice d'un double assassinat en 1991 au Guatemala et jugé après plus de 20 ans de cavale.
L'ex-fugitif français a été condamné à la perpétuité par contumace en 2001 pour complicité des assassinats, le 28 décembre 1991, d'un couple de restaurateurs, Bernard Béreaud et Marie-Antoinette Perriard, dont les corps affreusement mutilés et partiellement brûlés avaient été découverts plusieurs jours après à Guatemala City.
Lors de ce procès qui s'est ouvert le 30 septembre, l'accusé a reconnu le délit d'escroquerie dont il est aussi poursuivi, mais continué à nier farouchement toute participation au crime. Un "huitième d'aveux" pour l'avocat général Rémi Crosson du Cormier qui s'est adressé à l'accusé: "M. Ascione, je ne vous crois pas".
"En dehors des nombreux revirements, retours, falsifications de l'accusé", il existe selon lui des "éléments qui, rassemblés, fondent (sa) culpabilité".
L'avocat général a notamment cité le témoignage "cohérent" à la barre de l'ancien légionnaire Philippe Biret, qui a affirmé que les assassinats avaient été "planifiés" par Thierry Ascione.
Comme Jean-Philippe Bernard, neveu du restaurateur assassiné, Philippe Biret a été condamné pour ce crime à 30 ans de prison au Guatemala - il en a purgé 15.
Le représentant de l'accusation a évoqué des conversations au dossier et les déclarations d'un autre témoin selon lesquelles l'accusé avait fait tuer les Béreaud "pour s'approprier de l'argent", ou encore ses relevés du compte en banque.
Les victimes "ne sont pas mortes du fait du fumeux trafic de stupéfiants inventé par Thierry Ascione mais par l'action positive et résolue, en connaissance de cause, pour recruter et payer des tueurs faciles à convaincre dans un pays alors totalement déstructuré", a-t-il ajouté.
Avant lui, les avocats des parties civiles ont décrit "33 ans de souffrance" et "d'attente" pour la famille des victimes, face à un suspect en fuite et qui, pendant le procès, "s'est caché derrière des murs de poussière".
Les proches sont des "survivants" qui se "questionnent chaque jour" et "avaient l'espoir que des choses seraient dites, mais ils sont laissés avec des affabulations sans fin et la mémoire salie des morts", a plaidé Me Ménya Arab-Tigrine. "Ce questionnement est un mal qui ne cessera qu'avec les réponses que vous allez donnez", a-t-elle poursuivi en s'adressant à la cour.
La défense a plaidé l'acquittement. Témoins aux "versions multiples" ou en "contradiction" avec le dossier, mobile qui ne tient pas, chronologie "à décharge"... Me Margaux Durand-Poincloux s'est appliquée à détricoter le dossier, parlant aussi d'un accusé à la personnalité construite autour du "mensonge" et de "l'escroquerie", sans que cela ne dise "rien, ni de sa culpabilité ni de son innocence".
"Bien sûr, ça doit être absolument insupportable quand on attend une réponse après 33 ans. Mais je ne sais pas qui a tué les victimes et vous devez admettre que vous non plus", a-t-elle conclu.
Le verdict est attendu vendredi.