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Mon père est "sans doute l'un des plus grands criminels sexuels des 20 dernières années", a affirmé vendredi la fille de Dominique Pelicot, cet homme jugé à Avignon pour avoir drogué sa femme et l'avoir fait violer par des dizaines d'inconnus recrutés sur internet.
"Comment on fait pour se reconstruire quand on sait" ça, a demandé Caroline Darian, 45 ans, fille du principal accusé, qui se présente désormais publiquement sous son nom de plume, avec lequel elle a publié un livre en avril, "Et j'ai cessé de t'appeler papa", afin de protéger son couple et son enfant.
Entendue vendredi matin pendant une vingtaine de minutes par la cour criminelle de Vaucluse, où sont jugés depuis lundi et pour quatre mois son père et 50 autres hommes, âgés de 26 à 74 ans, la fille du principal accusé est revenue sur ce jour où elle a tout appris.
"Ce 2 novembre 2020, à 20h35, ma vie a littéralement basculé", a-t-elle expliqué, racontant ce moment où sa mère, après avoir elle aussi tout appris des policiers de Carpentras (Vaucluse), l'a appelée pour l'informer.
"Ma maman me dit, +j'ai passé une bonne partie de la journée au commissariat, ton père me droguait pour me violer avec des inconnus. J'ai dû voir des photos+", déroule-t-elle.
"C'est ce qu'on appelle un point de bascule, ce glissement où l'on ne sait pas du tout jusqu'où on va descendre", explique-t-elle, touchée, retenant difficilement ses sanglots: "J'appelle mes frères, on est démunis, on pleure, on ne comprend pas ce qui nous arrive. On a mal, une douleur que je ne souhaite à personne".
Le lendemain, 3 novembre 2020, les trois enfants se retrouvent à Carpentras, devant les policiers.
"Je reverrai toujours David, blanc, stoïque, et mon petit frère Florian s'affaisser", décrit-elle, revenant sur ce moment où un policier estime à "entre 30 et 50" le nombre d'agresseurs de sa mère.
Au terme de l'enquête, 72 hommes ont finalement été recensés comme ayant abusé de Mme Pelicot, entre juillet 2011 et octobre 2020, dont 50 seulement ont été identifiés et sont jugés à Avignon.
Ce même 3 novembre 2020, les policiers lui montrent deux photos d'une femme nue, apparemment endormie: "On voit ses fesses en gros plan, cette femme dort en position foetale, je ne la reconnais pas", explique Caroline Darian.
Il s'agit pourtant bien d'elle, lui explique l'enquêteur: "Mais madame, c'est bien vous qui avez une tache sur la joue droite".
"Je découvre que mon père m'a photographiée, à mon insu, dénudée, pourquoi?", s'interroge sa fille, persuadée désormais que son père l'avait également droguée, comme il l'avait fait avec sa mère.