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Le ministre démissionnaire de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, est monté une dernière fois au front lundi pour défendre sa politique budgétaire devant des parlementaires, estimant que la France pouvait tenir ses objectifs de déficit public malgré des menaces de dérapages.
Lors d'une ultime audition devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale, l'hôte de Bercy depuis plus de sept ans a insisté, devant des députés parfois très critiques sur sa gestion, sur l'assainissement indispensable des finances publiques, dont il a attribué la forte dégradation à des années de crises (gilets jaunes, Covid, envolée de l'inflation...)
"Tous ici! - tous! - pendant la crise du Covid, pendant la crise de l'inflation, vous m'avez demandé de dépenser beaucoup plus. Tous, sans exception", a lancé le ministre. "Vous ne pouvez pas, pendant trois ans, tympaniser le ministre des Finances (...) puis revenir deux ans plus tard en disant +Mais vous n'avez pas suffisamment bien tenu les comptes+".
"Moi je suis fier (des mesures de) protection", a-t-il ajouté, tout en soulignant que la France ne pouvait rester sur cette voie. "On ne peut pas se permettre d'être dans deux ans ou dans trois ans la lanterne rouge de l'Union européenne et de la zone euro", a-t-il lancé, alors que Paris est déjà visé par une procédure pour déficit excessif par la Commission européenne après un dérapage du déficit public à 5,5% en 2023.
- "Défi le plus urgent" -
Malgré de nouveaux risques de décrochage de la trajectoire budgétaire fixée, Bruno Le Maire a jugé que la France pouvait tenir son objectif de déficit public à 5,1% du PIB en 2024 et 3% en 2027, seuil maximal fixé par les règles budgétaires européennes. Tout en renvoyant cette tâche délicate au prochain gouvernement.
"La situation des finances publiques (...) est le premier défi que devra relever le gouvernement de Michel Barnier", a-t-il estimé: "C'est le défi le plus urgent. C'est le défi le plus difficile. C'est le défi le plus politique. C'est le défi dont tout dépend, car rien n'est possible sans des finances publiques bien tenues."
A défaut, les taux d'intérêt payés par la France pour ses emprunts sur les marchés risquent d'augmenter, renchérissant le coût de sa lourde dette et réduisant d'autant les marges de manoeuvre de l'Etat, a-t-il prévenu.
Cette mise en garde intervient alors que les délais deviennent serrés pour la préparation du budget pour 2025, qui doit être présenté au Parlement au plus tard le 1er octobre, une échéance que Bruno Le Maire a estimé tenable.
Entre-temps, la France a demandé à Bruxelles une prolongation du délai pour l'envoi de son plan de réduction du déficit public, qui devait initialement être transmis d'ici au 20 septembre. Sans se prononcer sur cette demande, la Commission a indiqué lundi à l'AFP qu'il lui était possible de s'entendre avec un pays membre sur "un délai raisonnable" après la date limite.
Bruno Le Maire avait annoncé 25 milliards d'euros d'économies dès 2024, mais seuls 10 milliards ont été concrétisés avant les élections législatives anticipées, par des annulations de crédits.
- "Choix politiques" -
Une note du Trésor communiquée début septembre à des parlementaires par le ministère de l'Economie et des Finances faisait état d'un possible nouveau dérapage à 5,6% en 2024 sans mesure d'économie supplémentaire, l'imputant à des recettes fiscales décevantes et une envolée des dépenses des collectivités locales.
Ces dernières pourraient atteindre "un niveau historique de -20 milliards d'euros", selon le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave, auditionné lui aussi par les députés.
Ensuite, le déficit pourrait atteindre 6,2% en 2025 à politique inchangée, selon le même document daté de juillet, qui souligne qu'un retour dès 2027 du déficit sous les 3% "supposerait de réaliser environ 110 milliards d'économies d'ici à 2027".
Michel Barnier avait promis, dans sa première interview télévisée comme Premier ministre, de "s'efforcer (...) de mieux utiliser l'argent public" pour ne plus faire "des chèques en blanc sur les générations futures".
Pour Bruno Le Maire, cela implique "des choix politiques", comme annuler tout ou partie des 16,5 milliards d'euros de crédits gelés préventivement par le gouvernement sortant. Il a plaidé aussi pour une loi de finances rectificative pour 2024 "qui permettrait d'avoir des recettes complémentaires" en taxant les rachats d'actions et les énergéticiens. Pas question pour autant d'augmenter les impôts, sa ligne rouge.
Toutefois, "ces choix ne m'appartiennent pas", a concédé le ministre sur le départ.