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L'ancien PDG de Volkswagen Martin Winterkorn a balayé mercredi les accusations pesant contre lui dans le procès pour fraude massive du "dieselgate", "inconcevables" selon lui car il n'était "ni spécialiste des moteurs, ni expert en logiciels".
Au deuxième jour de sa comparution au pénal, il a contre-attaqué au fil d'une longue déclaration lue au tribunal de Brunswick (nord), se disant blessé dans son honneur.
M. Winterkorn risque une lourde peine de prison.
Son procès, qui a sévèrement terni l'image de Volkswagen, se tient en outre au moment où le constructeur traverse une grave crise et envisage pour la première fois de fermer des usines en Allemagne. Une usine Audi de 3.000 salariés est aussi menacée en Belgique.
Les accusations selon lesquelles il aurait trompé et lésé clients et actionnaires "me frappent très durement au terme de ma carrière", a déclaré à l'adresse des juges M. Winterkorn, aujourd'hui âgé de 77 ans.
En raison d'une santé fragilisée par plusieurs interventions chirurgicales, certaines parties de sa longue déposition ont été lues par ses avocats.
Sa carrière dans l'automobile a pris fin brutalement en septembre 2015, quand Volkswagen a admis avoir truqué un logiciel équipant 11 millions de voitures pour qu'elles affichent des niveaux de pollution en émissions d'oxydes d'azote bien inférieurs à la réalité.
- Pas un "technicien" -
S'il admet avoir été "étroitement lié" au dieselgate de part ses fonctions de direction, l'ancien patron assure qu'il n'a "pas été impliqué dans les décisions concernant le développement et l'utilisation (d'une) fonction logicielle irrégulière sur les nouveaux moteurs diesel de VW".
A son poste, il était "ni spécialiste des moteurs, ni expert en logiciels", s'est-il défendu.
Par conséquent, il n'a "pas compris à l'époque en quoi consistaient les problèmes techniques" des moteurs, a-t-il tenté de convaincre.
M. Winterkorn affirme ne pas s'être davantage rendu compte que "VW utilisait, depuis quelques années déjà, des systèmes de contrôle des émissions non conformes sur le marché américain".
"Je ne suis pas un spécialiste en informatique et il n'y a de toute façon rien à voir dans un logiciel", a encore déclaré l'ancien dirigeant, connu du temps de sa vie active pour inspecter avec son stylo-torche les détails des moteurs et autres éléments visibles des véhicules lors de ses visites sur les stands des salons automobiles.
A l'audience, il a aussi mis en avant ses bons états de service.
Comme patron du groupe de Wolfsbourg comptant 12 marques à son apogée en 2015, M. Winterkorn estime avoir "rempli ses nombreuses tâches avec succès" pour bâtir un des constructeurs automobiles les plus prospères.
Sous sa direction, le groupe et ses marques VW, Audi, Skoda, Porsche et Bentley, entre autres, est passé de 330.000 à plus de 600.000 employés, et les ventes ont grimpé de 6,2 à 9,1 millions de véhicules dans le monde.
Il a affirmé s'être toujours efforcé d'être un "bon chef d’entreprise" et un modèle pour ses employés.
- Arrangement avec le tribunal? -
M. Winterkorn a bénéficié pour raison de santé de plusieurs reports de son procès qui se tient neuf ans après la révélation du scandale et prévu pour durer un an.
Seul haut dirigeant de Volkswagen jugé au pénal à ce jour, l'ancien PDG d'Audi Rupert Stadler a été condamné en juin 2023 à Munich à une peine de prison avec sursis et à une amende de 1,1 million d'euros.
Son procès a été écourté en échange d'aveux complets sur le délit de "fraude par omission" qui lui était reproché. Depuis, il a fait appel du jugement.
Le même arrangement est-il envisageable pour M. Winterkorn ? Le juge du tribunal de Brunswick, Johannes Mühle, a mentionné mardi des discussions entre l'accusation, la défense et le tribunal avant le procès. A ce stade cependant, aucun accord n'a encore été conclu.