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La relation entre les coursiers Deliveroo et la plateforme de livraison de repas ne peut être requalifiée en contrat de travail avec les obligations qui en découlent pour l'employeur, a tranché mercredi le tribunal du travail de Bruxelles , saisi d'une plainte du ministère public.
"Le Tribunal du travail a conclu que les coursiers Deliveroo sont des travailleurs indépendants. Il s'agit d'une reconnaissance importante qui est conforme à l'interprétation juridique que nous avons toujours mise en avant, concernant la manière dont les coursiers veulent travailler avec Deliveroo. C'est une bonne nouvelle pour les coursiers qui apprécient le travail flexible que Deliveroo permet. Le Tribunal a souligné un certain nombre de caractéristiques du modèle Deliveroo qui permettent de conclure à l'existence d'un travail indépendant, notamment la volonté des coursiers d'effectuer des prestations indépendantes, la liberté d'organiser le temps de travail et l'absence d'un pouvoir hiérarchique de la part de Deliveroo", a réagi Rodolphe Van Nuffel, porte-parole de Deliveroo Belgique.
L'entreprise a ainsi salué "une victoire" en ce qui la concerne, tandis que le syndicat chrétien CSC, soutenant une trentaine de coursiers associés à la plainte, a eu une lecture plus nuancée du jugement. Le syndicat a jugé "étonnant" que le tribunal du travail de Bruxelles "ne constate pas de subordination juridique (entre le coursier et l'employeur) malgré une forte subordination économique".
"Ce jugement n'est favorable à personne, certainement pas aux coursiers qui souhaitent bénéficier des droit des autres travailleurs, comme celui d'une protection sociale ou d'une assurance accident du travail avec une vraie couverture digne de son nom", a réagi auprès de l'AFP Martin Willems, un responsable du syndicat CSC.
Choisir entre salarié et indépendant
Selon lui, seuls 15% des coursiers Deliveroo en Belgique travaillent sous le statut d'indépendant (finançant eux-mêmes leur protection sociale), tandis que 85% sont placés sous le régime belge de l'économie collaborative permettant de réaliser des petites prestations pour des compléments de revenus "sans être ni salarié ni indépendant". Et sans couverture sociale garantie.
Or le tribunal dit qu'il faut choisir entre salarié et indépendant, et que ce régime juridique belge n'est "pas applicable" aux prestations des plateformes, a soutenu le responsable syndical. Il a vu dans le jugement un appel à ce que le gouvernement éclaircisse de façon "urgente" la question du statut de ces travailleurs. Le régime de l'économie dite "collaborative" à l'ère des commandes via smartphones a été instauré par une loi de 2016 qui suscite la controverse depuis plusieurs années.
Pour le tribunal, selon une copie du jugement obtenue par l'AFP, "la relation de travail liant Deliveroo aux 115 coursiers dont fait état l'Auditeur du travail (le parquet spécialisé, dans sa plainte, ndlr) et aux (29) autres intervenus dans la procédure ne peut pas être requalifiée en contrat de travail".
A ce titre, les demandes de réparations des plaignants et celle de l'ONSS --la Sécurité sociale belge-- de condamner Deliveroo et d'obtenir le paiement d'arriérés de cotisations sont jugées "non fondées", selon la décision.