Partager:
On le dit chaque année, mais de nombreux citoyens belges (et européens) manquent encore de vigilance lorsqu'ils voyagent en voiture à travers l'Europe : il faut couper les "données mobiles" dans certains pays de notre continent.
Pour beaucoup, effectivement, les frais de roaming (donc les suppléments de facture dus à l'utilisation du réseau d'un opérateur d'un autre pays) ont disparu en Europe en 2017. C'est vrai, mais pas tout à fait : il y a des "pays proches" qui ne font pas partie de l'Union européenne (ou qui n'ont pas rejoint le groupe élargi concerné par la suppression des frais de roaming).
On vient de recevoir une facture exagérément mirobolante de 12.178€
Taner et sa famille viennent d'en faire les frais. Et quand on parle de frais... "On vient de recevoir une facture exagérément mirobolante de 12.178€", nous a-t-il écrit via le bouton orange Alertez-nous.
Vers la Turquie en voiture
Notre témoin raconte la mésaventure qui est advenue à sa famille. "Mon frère est atteint d'un handicap mental. Il vit sous la tutelle de mes parents et est âgé de 40 ans. Ils ont pris la route au début du mois de juillet vers la Turquie", commence-t-il.
Un périple assez long, suscitant l'envie d'utiliser son smartphone. Et comme la plupart des applications/fonctionnalités sont désormais connectées (nécessitant un accès à internet via Wi-Fi ou via l'internet mobile), Engin, le frère de Taner, a activé l'option "données mobiles en itinérance", c'est-à-dire, la possibilité d'aller sur l'internet mobile en dehors des frontières de la Belgique.
En théorie, pas de danger tant qu'on est en Europe. Mais comme nous le disions en début d'article, la fin des frais de roaming concerne les 28 pays membres de l'Union européenne, ainsi que la Norvège, le Liechtenstein et l'Islande (voir les détails plus bas).
Deux gros problèmes
Et donc, quand on part en vacances en Turquie, plusieurs problèmes se posent. Tout d'abord, le trajet: celui emprunté par la famille de Taner passait par la Serbie, qui ne fait pas partie de l'Union européenne. Ensuite, la destination: la Turquie non plus ne fait pas partie de l'UE.
Les données mobiles étant activées tant pour le trajet que pour les vacances, la facture du frère de Taner a explosé. "On vient de recevoir une facture, à notre grande surprise, elle est exagérément mirobolante: 12.178 euros pour le mois de juillet. Pour 1 GB utilisé en Serbie et 2 GB en Turquie".
Si Engin, handicapé mental, ignorait sans doute l'existence de frais de roaming ("il ne sait pas vraiment ce qu'il fait"), ce n'était pas le cas de ses parents. "Mais ils ignoraient que mon frère utilisait son abonnement Orange. Ils n'étaient même pas au courant qu'il avait remis sa carte SIM de Belgique dans son GSM".
La famille de Taner est "désespérée: mes parents sont en état de choc, car d'après l'opérateur, il faut payer. Nous ne savons plus quoi faire: mon frère est sous la Vierge Noire (il reçoit des indemnités spécifiques de la sécurité sociale, NDLR) et mon papa est pensionné".
Comment peut-on en arriver là ?
Même s'il espère trouver un arrangement à l'amiable, Taner n'en revient pas des sommes demandées. "Nous ne comprenons pas comment c'est possible de demander une somme pareille pour seulement 3 GB. C'est de l'escroquerie. Si nous ne trouvons pas de solution, je compte bien aller en justice".
Les calculs sont pourtant rapides: en dehors de l'Union européenne, les frais de roaming sont colossaux (voir le site d'Orange) : 14 euros par MB pour la Serbie, 6 euros par MB pour la Turquie. Cela devrait faire 12.000 euros + 14.000 euros (26.000 euros), mais la facture se "limite" à 12.178 euros.
Les clients reçoivent à chaque entrée dans un pays étranger les tarifs roaming en vigueur
Les opérateurs ont des garde-fous
La plupart des voyageurs deviennent prudents, mais il arrive encore très souvent que certains se fassent avoir, surtout en traversant la Suisse, qui est une enclave payante au sein du continent. Les opérateurs sont donc moins souvent confrontés qu'auparavant à des problèmes de ce genre.
Car il existe des garde-fous, nous rappelle l'opérateur Orange. "Tout d'abord, il y a ce qu'on appelle le Welcome SMS: les clients reçoivent à chaque entrée dans un pays étranger les tarifs roaming en vigueur", nous explique Younes Al Bouchouari, porte-parole. "Nous avons également instauré un SMS pour les clients quittant la zone 1 (Union européenne), afin de les avertir qu'ils commencent donc à être facturé en hors-forfait".
Viennent ensuite les SMS qui préviennent des suppléments de facture. "Les clients sont avertis lorsqu'ils ont consommé 80% et 95% de leur abonnement mobile Go (les nouveaux noms de l'opérateur). Ensuite, ils reçoivent un SMS leur indiquant qu’ils commencent à être facturés en hors-forfait puis ils reçoivent un nouvel SMS lorsqu’ils atteignent 10€, 25€, 50€, 100€, 150€, 200€, 250, 300€ de hors-forfait".
Orange nous confirme que le frère de Taner a reçu ces SMS. De toute façon, ces SMS d'avertissement "ne sont pas désactivables".
Il n'y a pas de blocage par défaut d'un abonnement lorsque des montants faramineux sont atteints en dehors de l'Union européenne. "A 300€ de hors-forfait, les clients sont bloqués et doivent acheter un top-up en Belgique ou dans l'Union européenne (mécanisme pour nos nouveaux abonnements mobiles Go). En dehors de l’UE, ils peuvent continuer à surfer mais ils ont déjà reçu une dizaine de SMS les alertant de leur hors-forfait."
Il existe cependant, pour les clients prévoyants, le 'Travel Data Control'. "Les clients peuvent paramétrer le Travel Data Control (TDC) du montant de leur choix (de 0€ = blocage total, à 500€). Le TDC leur permet de définir le montant maximum qu’ils sont prêts à payer pour leurs usages data en roaming".
Orange va tenter de trouver une solution avec la famille de Taner, mais ce n'est pas aussi simple. Car le principe du roaming, c'est que l'opérateur étranger facture des frais très importants à Orange, et que Orange répercute ces frais (tout en se faisant une commission, bien entendu). Les répartitions des suppléments sont un secret de polichinelle, et varient de pays en pays, mais une chose est sûre: Orange a déjà payé, ou va payer, les opérateurs serbe et turc. Donc s'il efface l'ardoise du frère de Taner, il perdra de l'argent...
Rappel : où pouvez-vous utiliser votre smartphone en Europe sans supplément ?
La mésaventure de Tanner doit vous servir de leçon, et de piqûre de rappel : où peut-on réellement utiliser son smartphone en dehors de la Belgique, sans craindre des suppléments de facture ?
Il y a 31 états qui participent à une Europe sans frais de roaming. Ces pays forment une zone où les abonnements peuvent être utilisés comme si on se trouvait dans son propre pays.
Il s’agit des 28 pays membres de l’Union européenne :
Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne (et Iles Canaries), Estonie, Finlande, France (et Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, la Réunion, Saint-Martin), Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal (et Açores, Madère), Royaume-Uni (jusque fin 2020), République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suède.
A ces 28 pays membres, 3 états européens se sont ajoutés : Norvège, Islande et Liechtenstein.
Quels sont les pièges à éviter ? Le premier, c’est la Suisse, îles payante au milieu de tout. On y passe pour se rendre en Italie, notamment. Il y a ensuite certains pays des Balkans comme la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro, le Kosovo, l’Albanie, la Macédoine du Nord. S’ajoutent quelques pays de l’Est : Moldavie, Ukraine, Biélorussie. Et bien entendu, il faut se rappeler que la Turquie ne fait pas partie de l’Union européenne, ni la Russie.