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Au lendemain d'une audition chahutée aux Etats-Unis sur sa politique de modération, et quelques heures après un attentat en France, Twitter a supprimé jeudi, après un temps d'hésitation, un message incendiaire de l'ex-Premier ministre malaisien, Mahathir Mohamad.
"Au cours de leur histoire, les Français ont tué des millions de gens. Beaucoup étaient musulmans. Les musulmans ont le droit d'être en colère et de tuer des millions de Français pour les massacres du passé", a écrit Mahathir Mohamad, peu après un attentat survenu à Nice, sans y faire référence.
La plateforme a réagi en deux temps, maintenant d'abord le tweet avec un message d'avertissement, invoquant un "intérêt pour le public", avant de le gommer, mais sans suivre le gouvernement français qui a réclamé la suspension du compte.
Trois personnes ont été tuées jeudi, dont au moins une égorgée, dans une église de la ville du sud de la France, lors d'une attaque considérée par les autorités françaises comme terroriste.
Facebook, où le message avait aussi été publié, l'a également supprimé. "Nous n'autorisons pas les discours de haine sur Facebook et condamnons fermement tout soutien ou appel à la violence, au meurtre ou aux atteintes physiques", a indiqué la filiale française du réseau social.
Cet épisode intervient au lendemain d'une audition mouvementée des patrons des réseaux sociaux dominants, Facebook, Twitter et Google (YouTube), devant le Sénat américain.
Leur politique de régulation des contenus publiés par des tiers y a été critiquée de toutes parts, les Républicains leur reprochant d'en faire trop, et les Démocrates pas assez, alors qu'approche l'élection présidentielle.
Twitter et Facebook, notamment, qui se sont longtemps défendu avec virulence d'être des "arbitres de la vérité", se montrent de plus en plus interventionnistes sur leurs contenus. Mais ils ne veulent pas être tenus légalement responsables des publications, comme le seraient des journaux par exemple.
- La France "exige" la suspension du compte -
Se référant à la décapitation le 16 octobre d'un enseignant français qui avait montré des caricatures du prophète Mahomet à ses élèves, M. Mahathir a par ailleurs déclaré dans une série de messages incendiaires sur son compte Twitter qu'il n'approuvait pas l'attentat mais que la liberté d'expression n'incluait pas "les insultes à l'égard d'autrui".
"Quelle que soit la religion mise en cause, les gens qui sont en colère tuent", a affirmé l'ex-dirigeant, âgé de 95 ans, auteur dans le passé de déclarations controversées sur les juifs et les homosexuels.
Celui qui fut Premier ministre de Malaisie, pays à majorité musulmane, jusqu'à la chute de son gouvernement en février, a jugé que le président français Emmanuel Macron était "très primitif".
"Les Français devraient enseigner à leurs citoyens le respect des sentiments d'autrui. Puisqu'on accuse tous les musulmans et la religion des musulmans pour ce qu'une personne en colère a fait, les musulmans ont le droit de punir les Français", a-t-il poursuivi.
Le secrétaire d'Etat français au numérique Cédric O a appelé la plateforme américaine à suspendre le compte.
- "Complice d'un appel au crime" -
"Je viens de m'entretenir avec le Directeur Général de Twitter France. J'ai exigé que le compte de (Mahathir Mohamad) soit immédiatement suspendu. Twitter ne saurait se rendre complice d'un appel au crime", a-t-il indiqué sur son compte personnel, en français et en anglais.
Twitter a maintenu, dans un premier temps, le message en y ajoutant la mention suivante: "Ce tweet a enfreint les règles relatives à la glorification de la violence. Toutefois, Twitter a déterminé que sa disponibilité peut présenter un intérêt pour le public".
Puis le tweet en question a finalement été retiré quelques minutes après. Contacté par l'AFP en France, Twitter a indiqué que ce tweet a été supprimé "pour avoir violé (sa) politique en matière d'apologie de la violence".
Les autres propos mis en ligne par Mahathir Mohamad restaient eux visibles.
Après la décapitation de l'enseignant français Samuel Paty par un jeune Russe tchétchène de 18 ans, Emmanuel Macron a promis que la France ne renoncerait pas aux caricatures, au nom de la liberté d'expression.
Des propos qui ont entraîné de vives tensions dans plusieurs pays musulmans, allant de manifestations jusqu'au boycott de produits français.