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Fin de l'ère Marchionne: le changement dans la continuité pour Fiat Chrysler ?

La transition était préparée, mais le départ précipité de Sergio Marchionne laisse planer le doute sur l'avenir de Fiat Chrysler (FCA) et sur les capacités du dauphin désigné, le Britannique Mike Manley, à diriger cette multinationale encore très italienne.

"L'inquiétude pour la vie même d'un des managers les plus estimés au monde se mêle aux interrogations légitimes sur l'avenir du 7e groupe automobile du globe, qui a incarné dans l'histoire de notre pays l'idée même d'industrie moderne", écrivait ainsi dimanche matin Dario Di Vico, éditorialiste du Corriere della Sera, le premier quotidien italien.

Tout en titrant sur "la fin d'une époque", la presse italienne relevait d'une manière générale la continuité de la succession: les quatre dirigeants nommés pour reprendre les multiples casquettes de ce bourreau de travail à FCA, Ferrari et CNH Industrial étaient déjà tous engagés dans ces groupes contrôlés par la famille Agnelli.

A commencer par Mike Manley, le patron de Jeep, qui reprend les rênes de FCA. Ce Britannique discret arrivé à la tête de Jeep en pleine crise en 2009 en a fait le joyau du groupe: Jeep devrait selon Morgan Stanley représenter à lui seul près de 70% des profits de FCA cette année.

Dans une lettre adressée dimanche à tous les salariés de FCA, son président John Elkann, petit-fils d'Umberto Agnelli, a exprimé sa confiance en M. Manley.

"Nous avons commencé il y a des années à travailler à un plan de succession qui garantisse la continuité et préserve la culture unique de FCA", a-t-il assuré. "Mike a été l'un des principaux contributeurs du succès de FCA et il a derrière lui une longue liste de prouesses".

- "Une terrible nouvelle" -

Pour Florian Delègue, chasseur de têtes de Heidrick & Struggles spécialisé dans l'automobile, cette nomination est "une bonne surprise".

M. Manley "n'est pas un nouveau venu, c'est l'homme à succès du groupe Fiat". Et même s'il n'est pas Italien, "c'est un étranger très acculturé à Fiat".

Cependant, Mike Manley n'est pas Sergio Marchionne, l'enfant des Abruzzes devenu Canadien, diplômé en droit, en management mais aussi en philosophie, qui a réussi à conquérir politiciens, médias et syndicalistes, en particulier en Italie.

En 14 ans, il a profondément remodelé Fiat, d'abord en la redressant puis en l'alliant en 2009 à l'américain Chrysler.

"Sans Sergio Marchionne, Chrysler et Fiat n'auraient pas survécu", affirme Davide Cole, président émérite du Center for Automotive Research du Michigan, dans un entretien dimanche au journal La Stampa, proche de la famille Agnelli.

"Son charisme, son énergie, sa détermination, ses qualités de communication et sa vision stratégique ont été essentiels", ajoute-t-il.

Un avis partagé par plusieurs représentants syndicaux en Italie. "C'est une terrible nouvelle", a ainsi réagi le Cisl. "Nous avons eu des divergences (...) mais ensemble nous avons défié la petite Italie paresseuse qui préfère fermer les usines plutôt que se retrousser les manches".

- "Rendez-vous importants" -

Silence pour l'instant de la CGIL et de la Fiom, qui se sont durement opposées à M. Marchionne, mais même son de cloche à l'UIL et à l'Uilm.

"On a souvent évoqué l'extraordinaire capacité de Marchionne à créer de la valeur et à faire des profits, mais il en a été de même pour sa capacité à sauvegarder le patrimoine industriel et l'emploi", ont noté les deux syndicats.

Si le groupe FCA compte 159 usines à travers le monde, 27% de ses 236.000 salariés travaillent en Italie. Or, "des rendez-vous importants nous attendent, comme l'assignation des modèles aux usines italiennes et le renouveau du contrat collectif", ont prévenu l'UIL et l'Uilm.

Pour Ferdinand Dudenhöffer, chercheur spécialiste de l'automobile à l'université de Duisbourg Essen, M. Manley est "un homme de voitures, et pour diriger Fiat Chrysler, ça ne suffit pas".

En Italie, il va devoir "négocier avec les syndicats, les politiques, la famille Agnelli". "Il va devoir faire beaucoup de compromis" et "il ne sera pas capable de prendre des décisions audacieuses".

Or, c'est bien d'audace et de vision que FCA aura besoin pour faire face aux défis qui l'attendent, à commencer par les menaces du président américain Donald Trump sur le commerce et la stratégie pour développer l'électrique, pour laquelle nombre d'experts évoquent la nécessité de nouvelles alliances.

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