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Paris-Photo, plus grand rendez-vous annuel de la photographie d'art, a choisi de braquer son projecteur sur les jeunes créateurs émergents et les sujets d'inquiétude contemporains comme la destruction et l'exploitation de la nature, de l'Amazonie au Congo.
Réunissant plus de 200 exposants --180 galeries (38 pour la 1ère fois) de 30 pays, et 31 éditeurs--, cette 23e édition au Grand Palais présente de jeudi à dimanche plus de mille photographies, allant de la photo ancienne --par exemple de très anciens clichés de Notre-Dame-- ou de mode à des sujets documentaires en passant par des séries abstraites.
L'événement, qui connaît un grand engouement du public, avait réuni 68.000 participants l'an dernier.
"Le public ici est très large: des professionnels, directeurs de musées, collectionneurs mais aussi amateurs. Le spectre des œuvres présentées est très large. Les prix vont de 600 euros à plusieurs centaines de milliers", a expliqué à l'AFP la directrice Florence Bourgeois.
Paris Photo tient à distinguer des "projets au long cours, aboutis" d'artistes qui "ne sont pas dans l'instantanéité de l'image" comme le sont par exemple les photos sur Instagram, a souligné Mme Bourgeois.
"Le travail sur le médium de la photo", note-t-elle, fascine les jeunes créateurs qui aiment à "réutiliser des techniques anciennes, comme le daguerréotype et le cyonotype, recourent à des techniques de collage, de découpe au lazer, etc, souvent pour des œuvres uniques".
- Emergents et chantres de la nature -
L'écrivain britannico-ghanéen Osei Bonsu a été choisi comme commissaire du secteur "Curiosa", qui s'était consacré pour la première fois l'an dernier à la photo érotique.
Bonsu a sélectionné 14 solos d'artistes ayant bénéficié récemment d'une première exposition. La préoccupation sociale et environnementale est très prégnante chez ces jeunes photographes.
Le secteur noble du 1er étage, "Prismes", expose des séries de grand format, très remarquables, dont celles du Ghanéen Zora Opoku, de la Belge Marie Cloquet, ou du Français Jérémie Lenoir. Ce dernier, à 500 mètres d'altitude à partir d'un petit avion, photographie en plein midi. Et, sous son objectif, un parking à Gennevilliers est réduit à une série de traits.
Le thème de la nature menacée est traité avec poésie et puissance. "Carbon casualties", série célèbre de Josh Haner, Prix Pulitzer et photographe du New York Times, dénonce les ravages pour l'homme sur les cinq continents des catastrophes écologiques.
Un colossal "photogramme", "Amazogramas" de l'artiste péruvien Roberto Huarcaya, sur la forêt amazonienne, s'est imprimé de nuit pendant la pleine lune avec les silhouettes de feuillages. Magique!
Deux séries en noir et blanc sur la silencieuse destruction à l’œuvre dans la forêt (Eric Guglielmi, "Paradis perdu") et au fond de la mer (Nicolas Floc'h) sont présentées par la galerie Maubert.
Elsa Leydier, Française vivant à Rio de Janeiro, évoque la forêt amazonienne, avec autant de taches rouges que de crimes perpétrés contre les indigènes.
La Malgache Malala Andrialavidrazana, chez Caroline Smulders, livre une des œuvres les plus originales. Elle restitue les éléments et les visions (coloniales, etc) des voyages d'autrefois, partant des atlas et des cartes du XIXe siècle, et y ajoutant des détails très agrandis de billets de banque ou de timbres.
Une série de photos et une vidéo ironique de l'Américaine Nancy Burston montre Trump dans des couleurs différentes ("Trump as five different races", 2016) et se transformant en Poutine (Trump/Putin, couverture du Time Magazine en 2018).
Gagosian et la Galerie 1900-2000 proposent un "Solo Show" Man Ray, illustrant l’intérêt grandissant des galeries contemporaines pour les artistes historiques.
Côté photo d'actualité, BMW, partenaire fidèle de Paris Photo, expose la carte blanche d'Emeric Lhuisset, avec des photos très fortes de combattants kurdes.
"Paris Photo" est soumis à forte concurrence, avec plusieurs foires off en même moment à Paris. Selon le dernier rapport d'Artprice, qui recense les enchères d'art contemporain dans le monde, la photo, par le volume de son chiffre d'affaires, n'en génère que 3%, contre 68% à la peinture.
Cette foire se veut un moment de rencontre entre public et artistes. 330 signatures d'artistes permettront pendant les trois jours aux visiteurs de repartir avec une dédicace.