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"Ils veulent juste un cachet": Amélie n'en peut plus des chômeurs qui postulent chez elle mais "ne cherchent pas de travail"

Le phénomène des chômeurs qui postulent à des offres d'emploi sans envie d'y être pris est-il une réalité ? Un sociologue veut déconstruire cette idée reçue dans "un système un peu pervers".

Amélie est la co-gérante d'une société de dépannage. Forte d'une équipe d'une quarantaine de personnes, l'équipe manque pourtant de personnel. Un vide qu'Amélie ne parvient pas à combler, malgré les CV qui arrivent sur son bureau. 

"On a énormément de peintres, de maçons. On a beaucoup de candidats qui postulent, mais pas pour les postes qu’on recherche. On demande des connaissances en mécanique et je pense que huit à neuf CV sur dix n’en ont pas". 

Des candidatures sans compétences

Pour devenir dépanneur, il faut avoir le permis C afin de conduire une dépanneuse à plateau, qui est indispensable, ainsi que des compétences en mécanique. Mais des profils qui combinent ces deux exigences sont "de plus en plus rares". "Souvent, ils ont le permis C, mais pas les connaissances", désespère Amélie. 

Et encore faut-il que les candidats répondent après avoir postulé. Certains candidats ne répondent plus, d'autres viennent aux rendez-vous, mais pas pour du travail... "Certains nous disent qu’ils viennent postuler, mais qu'ils ne cherchent pas de travail. Ils veulent juste un cachet pour justifier leurs recherches au chômage."

À ces personnes, l'entreprise répond "que nous, on cherche réellement des travailleurs et que s'ils ont le profil recherché, ils peuvent envoyer un CV et là, ils s'en vont en disant : 'non ,non je ne cherche pas de travail'".

Pas assez de travail

L'analyse d'un expert

Pour le sociologue Jean-François Orianne, "ce n’est pas un comportement insensé ou incompréhensible". "Ce n’est pas non plus un effet pervers du système. Je dirais que c’est plutôt un effet normal d’un système un peu pervers", ajoute le spécialiste.

Pour le professeur de l'Université de Liège, le plus grand problème pour les chômeurs, c'est qu'il n'y a pas assez de travail. Du moins dans leurs champs de compétences. "On parle chaque année de fonctions critiques et de métiers en pénurie, mais je pense que c’est aussi une façon de ne pas parler de cette pénurie structurelle d’emploi."

"La qualité de L’emploi n’est pas toujours au rendez-vous. Ce qu’on présente au chômeur ne fait pas forcément sens pour la personne et ne correspond pas forcément à ses attentes, à ses compétences ou à son profil. Donc dans ces conditions de pénurie, développer des stratégies pour maintenir ses droits sociaux et garder un revenu de remplacement me semble plutôt sensé, normal, compréhensible", conclut le sociologue.

45.000 contrôles

Le Forem (l’Office wallon de la formation professionnelle et de l’emploi) contrôle chaque demandeur d'emploi. Sur le premier semestre de cette année, 45.000 évaluations ont été réalisées et 7.000 ont donné lieu à une sanction, soit 15,5 %.

Le système de contrôle ne se limite pas à vérifier que les demandeurs d'emploi collectent des cachets, un plan d'action doit être respecté. "Est-ce que les gens ont postulé de manière spontanée, est-ce qu'ils ont suivi des formations, est-ce qu'ils se sont inscrits auprès d'une entreprise d'intérim ? Toutes ces démarches sont évaluées et il n'y a pas un seul cachet qui va faire basculer l'évaluation de négative à positive", détaille Thierry Ney, le porte-parole du Forem. 

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