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Laurent, un habitant d’Anderlecht, roule en voiture électrique depuis 2019. Habitué à utiliser des bornes publiques pour recharger son véhicule, il a constaté une différence de prix qu’il juge "incompréhensible". Les tarifs de deux bornes de recharge électrique près de chez lui diffèrent considérablement alors qu’elles sont situées dans des rues très proches l’une de l’autre. Comment l'expliquer?
Près de chez Laurent, deux bornes de recharge pour voitures électriques affichent des prix fort différents. L’une facture 32 centimes par kilowattheure, tandis que l’autre atteint les 87 centimes.
Pour l'Anderlechtois, cette découverte dans une "même zone" de la commune est difficilement compréhensible. "La borne la moins chère se trouve dans la rue à côté de mon domcile, à 50 mètres, alors que celle à 87 centimes est à seulement 200 mètres, dans une rue parallèle. C’est difficile de justifier un tel écart de prix pour un même service", déplore-t-il.
Expérimenté, Laurent s'est montré vigilant ce jour-là. En voyant cette nouvelle borne, il raconte avoir pris soin de vérifier le prix de la recharge via une application. "Heureusement, j’ai été regarder le prix car il s’agissait d’une toute nouvelle borne. J'ai voulu la tester car la borne près de chez moi est souvent occupée, vu qu’on est en ville et qu’il y a beaucoup de voitures électriques."
Selon lui, de nombreux usagers ne prennent pas cette précaution. "Beaucoup de gens se brancheraient directement, pensant que le tarif est similaire à celui des bornes voisines. C’est un peu normal. Tout le monde ne va pas commencer à essayer d’éplucher les détails de la borne avant de se brancher. Cela devrait être théoriquement comme pour l’essence et le diesel ou n’importe quel autre carburant. Les prix devraient être un minimum réglementé. Et ne pas changer du simple au double, voire plus, d’une borne à l’autre, quand c’est dans la même ville. C’est presque une escroquerie."
Pour Laurent, la différence de prix observée à Anderlecht "dépasse l’entendement", car la borne "la plus onéreuse se trouve en pleine ville, pour une charge lente". "On paye plus cher que pour un superchargeur d’autoroute, où la recharge est bien plus rapide", assure-t-il. "Je vis dans un appartement, donc je charge mon véhicule la plupart du temps via une borne publique, et le prix se situe généralement entre 30 et 50 cents."
L’objectif est d’informer l’utilisateur, pas de fixer des prix
Philippe Vangeel, directeur d'EV Belgium (la fédération qui travaille au développement de la mobilité zéro émission dans notre pays), explique que le marché des bornes de recharge en Europe fonctionne actuellement selon un principe de concurrence libre.
Aujourd'hui, la réglementation impose la transparence des prix, sans pour autant fixer de limites. Les opérateurs sont ainsi libres de déterminer leurs tarifs tant qu’ils sont consultables via un QR code pour les bornes lentes ou un écran d’affichage pour les bornes rapides.
"L’objectif est d’informer l’utilisateur, mais pas de fixer de limite au niveau du prix", précise-t-il. "Les utilisateurs doivent avoir la possibilité de pouvoir se renseigner sur les tarifs. Sur des bornes lentes, cela peut être via un QR code ou un autre système sécurisé. Sur les bornes rapides, cela doit être avec un dispositif où des prix doivent être affichés." Une règle qui se met progressivement en place en Belgique.
À Bruxelles, certaines bornes sont installées, avec un tarif imposé par la Région pour offrir un prix compétitif aux usagers. Pour ces bornes, le tarif est fixé à 30 centimes, ce qui garantit un coût fixe aux automobilistes, mais toutes les bornes de la capitale ne bénéficient pas de cet encadrement. Certaines bornes sont installées par des opérateurs qui peuvent fixer librement leurs tarifs. "Malheureusement, la Commission européenne n’a pas considéré de plafond de prix", regrette Philippe Vangeel. "Elle considère que le marché doit se développer lui-même, avec une compétition entre les prix. Avec la garantie d’une transparence au niveau des prix, l’utilisateur va probablement vérifier les prix et chercher les bornes les moins chères. On informe sans régler le prix."
Le directeur d'EV Belgium conseille de vérifier les prix et de comparer. "Comme on peut le faire, faisons-le, pour avoir une idée du prix avant de faire l’achat. Cela permettra d’éviter les surprises. Cette différence de prix observée par cet habitant d’Anderlecht, ce n’est pas nouveau. Il y a quelques années, on voyait des différences de prix encore plus élevées."
Les tarifs pourraient-ils être régulés ? "J’espère qui le seront. C’est le secteur qui va devoir le faire. Pour l’instant, la Commission dit que le secteur doit le faire, via la compétition. Peut-être que ça arrivera un jour. La meilleure solution, c’est la charge lente, chez soi ou chez l’employeur. Ils ont des autres tarifs. 30 centimes c’est très compétitif, car c’est le tarif qu’on paie à la maison", conclut Philippe Vangeel.