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"Les collectivités n'ont plus le droit aux pesticides sur la voie publique, alors pourquoi en mettrait-on dans les assiettes des enfants": Éric Boisnard, maire de Courtonne-la-Meurdrac, affiche une cantine 100% bio comme une évidence.
La petite commune normande n'est pas la seule en France à avoir pris de l'avance sur la loi Alimentation en cours d'examen et ses 20% de bio d'ici à 2022 mais rares sont celles qui mettent la barre si haut.
"C'est une question de volonté politique", pense le premier magistrat du coquet village d'environ 700 habitants, interrogé quelques jours avant l'examen mardi de ce texte par le Sénat.
Depuis la rentrée, la cantine, où le bio a progressivement été introduit depuis 2002, sert donc des menus sans produits chimiques. Ce lundi de septembre, dans ce lieu tout en couleurs, 87 bambins semblent manger avec appétit et pleine conscience des enjeux.
Avant "c'était (déjà) vraiment très bon mais là comme c'est bio c'est beaucoup mieux pour nous", résume Élisa Gicquel, une élève de CM2. Au menu: salade de tomates, pâtes, porc et compote de poires. "Il n'y a pas de produit pour faire fuir les insectes, c'est du naturel", renchérit sa camarade de CM1 Yelina Viger.
Quant aux institutrices, elles "s'éclatent à la cantine", lance l'une d'elle, tout sourire.
Le prix du repas pour les parents est resté stable à 3,55 euros, la commune déboursant 4.000 euros pour compenser les 40 centimes de surcoût du passage de 51% à 100% bio, assure le maire.
Le bio n'est pas arrivé en un coup de baguette magique. Il a fallu trouver des producteurs labellisés, qui fassent de la vente directe, aient l'équipement et le temps pour livrer.
Au final "les légumes viennent d'un maraîcher à 10 km, le bœuf à environ 20 km et le sec de la Biocoop. Le porc, on est obligé de le faire venir de Bretagne et on a pour l'instant renoncé au lapin", résume le maire.
- "le 100% bio est rare" -
"Je livre 25 kg de viande une fois par mois à Courtonne-la-Meurdrac. C'est plus une opportunité pour que ça fasse boule de neige. Quand je tue une bête (300 kg), il faut trouver des clients pour tous les morceaux", explique Didier Pellerin aux Monceaux. L'éleveur vient de commencer à livrer aussi une autre cantine voisine, à Ouilly-le-Vicomte qui monte à 25% de bio à la demande des parents.
A Courtonne, Dominique Coquin, la cantinière, adapte les menus, travaille à la diversité des repas, avec notamment des plats végétariens. "Les pâtes complètes, ça passe pas. Mais les semi-complètes, les enfants aiment", explique la cuisinière.
La mairie admet avoir eu la chance d'avoir Mme Coquin et de disposer d'une cuisine. D'autres communes ont rouvert la leur, comme Langouet (600 habitants), en Ille-et-Vilaine, qui affiche une cantine 100% bio et locale depuis 15 ans.
"Notre très très grande surprise c'est que ça nous coûte moins cher. Le pain bio est plus consistant, la viande bio ne réduit pas de volume à la cuisson, donc on en achète moins. Et puis on mixe protéines végétales et animales", explique son maire Daniel Cueff. Le repas est à 3,50 euros pour les familles hors aide sociale pour un coût réel de 5,89 euros.
"Le 100% bio est rare, et les collectivités au delà de 20% pas très très courantes", témoigne Sophie Jeannin de Manger Bio 35 qui aide agriculteurs et collectivités à mettre en adéquation offre et demande.
Parmi les grandes villes, Saint-Étienne affiche 80% de bio et 70% de local. Le coût du repas y est de 5 euros pour les parents (hors aide sociale). Il est facturé 5,40 euros par Elior à la ville qui a délégué les repas à cette entreprise.
Et Lyon, avec ses 24.000 repas par jour, est monté en septembre à 40% de bio et 55% de produits locaux, via Elior également.