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Multiple championne de France et désormais championne d'Europe, Mathilde Lamolle est à 24 ans l'un des plus grands talents du tir sportif français et a déjà l'expérience des Jeux olympiques après avoir participé en 2016 à ceux de Rio.
Jusqu'aux JO de Paris en 2024, en passant par ceux de Tokyo cet été, la jeune tireuse aubagnaise raconte son parcours à l'AFP. Dans ce troisième épisode de son carnet de bord, les sensations d'un retour réussi à la haute compétition et le poids des JO dans son parcours de sportive.
"Disputer les Championnats d'Europe début juin, ça a été beaucoup de plaisir. Le simple fait de refaire sa valise, de prendre l'avion pour aller en compétition... Avant on faisait ça tous les 15 jours et là ça faisait un an et demi. Il y avait un protocole Covid-19, quelque chose qu'on ne connaissait pas, une nouveauté à gérer. On entrait au dernier moment sur le pas de tir, pour notre série. D'habitude on pouvait entrer avant, regarder un peu la lumière."
"Mais finalement, j'ai trouvé qu'entre les +compet+ de préparation en France et ce Championnat d'Europe, il n'y avait pas tellement de différence. Je me disais, +c'est des 'Europe', il va y avoir du stress+. Mais je n'ai pas été trop déstabilisée. J'ai bien géré la pression, les adversaires, les émotions. A aucun moment, je ne me suis sentie perdue. Au contraire, il y avait le plaisir d'être là, le sentiment d'avoir ma place et de savoir ce que j'avais à faire."
"Le retour à la compétition a aussi permis de s'évaluer. L'objectif était clairement de performer, mais il y avait énormément d'incertitudes, puisque ça faisait presque deux ans sans compétition internationale à cause du Covid. J'ai vu les choses travaillées à l'entraînement qui avaient bien fonctionné et les leviers que je peux encore activer."
- Submergée à Rio -
"Je suis contente d'avoir gagné, bien sûr. C'est très encourageant mais ça ne joue pas énormément sur la confiance. Le but est d'être la meilleure le jour J. Ca a été le cas ici mais rien n'est fait. Ca fait deux médailles de suite en championnat d'Europe, ça confirme ma place dans le +Top continental+. Mais à Tokyo, il y aura des Chinoises, des Indiennes qui sont fortes..."
"A Rio j'étais jeune, encore junior. J'avais été un peu submergée par mes émotions. Je manquais de maturité, de bagage technique. En quatre ans, presque cinq, j'ai énormément évolué. J'ai travaillé en fonction des faiblesses identifiées à Rio. Je sais à quoi m'attendre, je sais ce que sont les Jeux, ce qu'il y a autour. Je pense que j'arriverai plus forte, mieux armée pour gérer ça."
"Les JO c'est la référence. Même si au tir les Mondiaux sont aussi tous les quatre ans, il n'y pas le côté médiatique, le village, l'ambiance olympique avec tous les autres sports."
- "Je m'en fous des conditions" -
"On sait que ça va être des Jeux particuliers. C'est un peu décevant, il y aura peu de spectateurs, on ne pourra pas aller visiter ou voir d'autres sports. Mais au point où j'en suis, franchement, je suis surtout contente que ça ait lieu. Je me dis que je m'en fous des conditions. Ce que je veux c'est tirer ce match des JO, enfin."
"Ca a été une année particulière. Normalement, tout dans notre vie est millimétré, préparé. On nous donne un planning en septembre et on sait ce qu'on fait chaque jour jusqu'en juillet. Là il y a d'abord eu l'incertitude, compliquée à gérer, puis le report, qui a été dur parce que c'est énormément d'investissement. Moi je pense aux Jeux tout le temps, je compte les jours quand je me lève le matin. Le soir je me dis +Ah j'ai bien travaillé, un jour de préparation en plus+. C'est omniprésent."
"Ma préparation a commencé dès le retour de Rio. Donc le report signifie faire durer ça un an de plus, maintenir la qualité de travail un an de plus. Je l'ai peut-être mieux vécu que d'autres parce que je suis jeune et qu'en un an, je peux progresser énormément. D'une certaine façon, un an de plus de travail, pour moi c'est +jackpot+ !"
Propos recueillis par Stanislas TOUCHOT