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La Chine "triche" mais "nous n'allons pas (la) laisser inonder notre marché", a affirmé mardi le président américain Joe Biden pour justifier le quadruplement des droits de douane sur les véhicules électriques chinois annoncé plus tôt dans la journée, la concurrence économique avec la Chine étant au coeur de la campagne pour la présidentielle.
"Nous ne laisserons jamais la Chine contrôler le marché pour ce type de véhicules", a insisté M. Biden lors d'une conférence de presse à la Maison-Blanche. Il a égratigné au passage son concurrent républicain Donald Trump avec qui il va rivaliser notamment dans les Etats industriels décisifs pour l'élection, comme la Pennsylvanie ou le Michigan.
Il est "impossible pour (nos) constructeurs automobiles de la concurrencer honnêtement", a jugé Joe Biden.
Via son grand plan vert (IRA) et un soutien aux organisations syndicales du secteur, le président américain a cherché à montrer à plusieurs reprises son soutien à l'industrie automobile américaine, en l'aidant à accélérer son virage électrique.
"C'est un signal aux constructeurs américains que l'administration Biden cherche à (les) protéger", a estimé pour l'AFP Paul Triolo, chercheur spécialisé sur la Chine pour Albright Stonebridge Group.
Un pari également, qui vise aussi à recréer des emplois industriels dans des Etats historiquement touchés par la désindustrialisation et qui pourraient s'avérer décisifs dans la course à la Maison-Blanche, tout spécialement le Michigan et la Pennsylvanie.
Le syndicat des ouvriers de la métallurgie (USW) a d'ailleurs salué, dans un communiqué, la décision de la Maison Blanche, la jugeant nécessaire pour "soutenir notre production intérieure et nos ouvriers".
Mais son rival républicain Donald Trump, en marge de son procès à New York, n'a pas manqué d'ironiser sur une décision qu'il juge dans la droite ligne de celles que lui-même a pu prendre en tant que locataire de la Maison Blanche.
Le président américain "veut mettre d'importants droits de douanes sur la Chine, ce qui est ce que j'ai proposé. Où étiez-vous pendant trois ans et demi ?" a-t-il ainsi fait mine d'interroger son successeur.
"Mon prédécesseur a échoué à protéger les Etats-Unis", lui a répondu Joe Biden, ajoutant que M. Trump "veut augmenter tous les droits de douane, il n'a tout simplement pas compris".
Le candidat républicain a en effet fait de la hausse généralisée des droits de douanes un des axes majeurs de son programme économique en cas de réélection, assurant qu'il contrebalancerait les effets pour les consommateurs américains par une baisse d'impôts, qui sera justement financée par ces nouvelles rentrées fiscales.
- "Actions erronées" pour Pékin -
Cette nouvelle série de taxes supplémentaires vient néanmoins s'inscrire dans la continuité de celles mises en place l'ancien président Trump, en se focalisant cependant sur des secteurs jugés "stratégiques", tels que les semi-conducteurs, les batteries pour véhicules ou encore l'acier et l'aluminium.
Ces hausses ou nouveaux droits concernent au total 18 milliards de dollars d'importations chinoises.
Une partie représente d'ailleurs une simple hausse des droits déjà existants dans le cadre d'une revue des droits de douane instaurés par l'ancien président, que M. Biden avait promis de réexaminer.
Au final, l'ensemble des droits de douane restent en place, a confirmé un responsable américain à l'AFP, appliqué sur plus de 200 milliards de dollars d'importations.
Pékin n'a pas tardé à réagir par la voix de son ministère du Commerce qui, dans un communiqué, a dénoncé une décision qui "affectera gravement l'atmosphère de la coopération bilatérale", appelant les Etats-Unis "à revenir immédiatement sur leurs actions erronées et à annuler les mesures tarifaires supplémentaires contre la Chine".
Exprimant sa "forte désapprobation", la Chine a souligné que "l'OMC a depuis longtemps conclu" que les tarifs américains "violent ses règles" mais "les Etats-Unis persistent dans leurs erreurs encore et encore".
La veille, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait souligné la nécessité, pour la Maison Blanche, de "s'assurer que le stimulus apporté par l'IRA (le grand plan vert voté il y a un an, NDLR) pour soutenir ces industries, que ces investissements soient protégés".
Le gouvernement américain a investi plus de 860 milliards de dollars, via l'IRA, afin d'accélérer la production de voitures électriques, batteries pour véhicules mais aussi panneaux solaires ou éoliennes "made in America".
Mais Washington accuse Pékin de soutenir fortement ses industries dans ces secteurs stratégiques avec d'importantes subventions entraînant une surproduction écoulée à prix cassés sur le marché mondial, empêchant le développement d'industries concurrentes dans d'autres pays.
Une crainte partagée par l'Union européenne et d'autres nations, telles que la Turquie, le Brésil ou l'Inde, a souligné un responsable américain.