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Les réseaux sociaux officiellement interdits aux moins de 16 ans en Australie: une "bonne idée", selon la mère d'une ado ayant connu une descente aux enfers

Le Parlement australien a approuvé jeudi une législation interdisant l'accès aux réseaux sociaux pour les moins de 16 ans, l'une des mesures les plus strictes au monde en la matière pour des plateformes comme X, Tik Tok, Instagram ou Facebook.

Le texte, qui a obtenu le feu vert des deux chambres du Parlement et un soutien des principaux partis, devrait obliger prochainement ces plateformes à prendre "des mesures raisonnables" pour empêcher ces adolescents d'avoir un compte. En cas de non-respect de cette obligation, des amendes pouvant aller jusqu'à 50 millions de dollars australiens (30,7 millions d'euros) s'appliqueront. Le texte, dénoncé comme "précipité", "flou" et "problématique" par plusieurs plateformes, a obtenu le feu vert du Sénat australien jeudi, par 34 voix pour et 19 contre, après celui de la Chambre basse australienne la veille, et son entrée en vigueur ne fait guère de doute.

Certains parents trouvent l'idée géniale

"Quelle bonne idée!": mère française d'une adolescente de 15 ans qui a connu "une descente aux enfers", Gaëlle salue l'adoption par l'Australie de cette loi. Si d'autres parents français plaident davantage pour l'avènement de réseaux sociaux plus "éthiques", Gaëlle semble convaincue par l'exemple australien. Sa fille, sortie de l'hôpital il y a quelques mois, a tenté de mettre fin à ses jours et a souffert d'anorexie.

Morgane, une autre mère de famille française de 50 ans, a découvert les contenus macabres qui proliféraient sur le fil TikTok de sa fille plusieurs mois après que celle-ci a commencé à enchaîner les séjours à l'hôpital pour des risques suicidaires. Cette dernière, aujourd'hui âgée de 17 ans, se souvient avoir vu défiler sur son écran de smartphone "des conseils sur comment faire des scarifications profondes, quel médicament utiliser pour en finir, quel aliment était sain pour perdre du poids rapidement". "Je ne me rendais pas compte que quand je 'likais' (ces publications), j'alimentais l'algorithme", regrette-t-elle.

Accompagnées par l'avocate Laure Boutron-Marmion, Gaëlle et Morgane ont pris part à l'assignation en justice en France de TikTok, qu'elles accusent d'avoir mis en avant des contenus pouvant pousser leurs filles au suicide. Au total, sept familles réunies au sein du collectif Algos Victima veulent faire reconnaître la responsabilité du réseau social et de son algorithme. L'application indique, de son côté, supprimer les contenus qui évoquent un acte ou une tentative de suicide, interdits.

Le Premier ministre australien veut que les ados lâchent les écrans

Le Premier ministre de centre-gauche, Anthony Albanese, qui se prépare à des élections en début d'année, s'est fait le champion de ce texte, et appelé les parents d'enfants à faire bloc avec cette loi. Avant le vote, il a accusé les réseaux sociaux d'être "une plateforme favorisant la pression sociale, une source d'anxiété, un canal pour les escrocs et, pire que tout, un outil pour les prédateurs en ligne" et souhaité que les jeunes Australiens "lâchent leurs téléphones et se retrouvent plutôt sur les terrains de foot, de cricket, de tennis, de volley ou à la piscine". La loi ne rendra pas "les réseaux sociaux plus sûrs pour la jeunesse", a estimé au contraire une élue écologiste australienne Sarah Hanson-Young lors du débat au Sénat, qui s'est dite "dévastée" de voir les jeunes "drogués à ces dangereux algorithmes".

"Je trouverai un moyen"

De jeunes Australiens disent déjà leur intention de contourner cette interdiction. "Je trouverai un moyen, et mes amis feront pareil", a confié Angus Lydom, 12 ans, qui souhaite continuer à être sur les réseaux sociaux : "Ce serait bizarre de ne pas les avoir et de ne pas pouvoir parler à mes amis quand je suis à la maison", dit-il. De même pour Elsie Arkinstall, 11 ans, pour qui les réseaux sociaux ont toute leur place, même pour les enfants, pour regarder par exemple des tutoriels de pâtisserie ou d'art. "On ne peut pas apprendre tout ça dans les livres", dit-elle.

L'une des législations les plus strictes au monde

Sur le papier, l'interdiction australienne est l'une des plus strictes du monde. Mais le texte ne fournit quasiment aucun détail sur ses modalités d'application, si bien que certains experts ont exprimé des doutes sur la faisabilité technique de cette interdiction et se demandent s'il ne s'agit pas d'un texte à la portée symbolique mais inapplicable. Il faudra compter au moins un an avant que la loi n'entre en vigueur, le temps pour les régulateurs australiens d'éclaircir les détails relatifs à son application. Certaines plateformes comme WhatsApp et Youtube, dont les adolescents ont besoin pour faire leurs devoirs, devraient par ailleurs être exemptées.

Des amendements ont été apportés au texte pour empêcher que les utilisateurs ne doivent produire leur carte d'identité pour attester de leur âge. Des programmes enseignant aux enfants à réfléchir "de manière critique" à ce qu'ils voient en ligne devraient être adoptés, à l'instar de la Finlande, a indiqué Susan Grantham, experte en réseaux sociaux. 

Plusieurs pays envisagent de suivre

L'entrée en vigueur de cette nouvelle législation sera suivie de près à l'étranger, plusieurs pays envisageant également de mettre en oeuvre des restrictions similaires, comme l'Espagne. Dans l'État américain de Floride, une loi doit entrer en vigueur en janvier pour interdire l'ouverture d'un compte aux moins de 14 ans, mais les modalités pratiques n'ont pas été fixées. La Chine restreint l'accès pour les mineurs depuis 2021 et exige l'identification via un document d'identité. Les moins de 14 ans ne peuvent passer plus de 40 minutes par jour sur Douyin, la version chinoise de TikTok, et le temps de jeu en ligne des enfants et adolescents est limité.

 

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