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Le général Brice Oligui Nguema, qui a renversé Ali Bongo il y a cinq jours au Gabon, a prêté serment lundi comme président d'une "transition" dont il n'a pas fixé la durée mais avec la promesse réitérée de "rendre le pouvoir aux civils" par des "élections crédibles".
Des militaires avaient proclamé le 30 août la "fin du régime" d'Ali Bongo Ondimba, qui dirigeait le Gabon depuis 14 ans, moins d'une heure après la proclamation de sa réélection lors du scrutin contesté du 26 août.
Le lendemain, les chefs des corps de l'armée et de la police réunis dans un Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) avec à leur tête le général Oligui, avait accusé l'entourage du chef de l'Etat en résidence surveillée -notamment son épouse et l'un de ses fils - de "détournement massifs" d'argent public et d'une "gouvernance irresponsable".
Depuis plus de 55 ans, la famille Bongo dirigeait sans partage ce petit Etat d'Afrique centrale, parmi les plus riches du continent grâce à son pétrole, mais sous le joug d'une élite accusée par ses opposants de "corruption massive" et de "mauvaise gouvernance".
"Je jure devant Dieu et le peuple gabonais de préserver en toute fidélité le régime républicain", "de préserver les acquis de la démocratie", a déclaré à la Présidence devant des juges de la Cour constitutionnelle, le général de brigade, en costume d'apparat rouge de la Garde républicaine (GR). C'est l'unité d'élite de l'armée, qu'il commandait depuis 2020, et la garde prétorienne du régime Bongo depuis des décennies.
Devant des centaines de convives dont des ministres déchus d'Ali Bongo et des caciques de son parti, mais aussi des ténors de l'opposition, le général les a exhortés à participer à l'élaboration d'une future Constitution qui sera "adoptée par référendum", de nouveaux codes électoral et pénal "plus démocratiques et respectueux des droits humains". Il s'est aussi "engagé" à "remettre le pouvoir aux civils en organisant des élections libres, transparentes et crédibles".
Il a également annoncé la désignation "dans quelques jours" d'un gouvernement de transition composé de personnes "expérimentées" et "aguerries" à qui il demande la libération "des prisonniers d'opinion" et le retour "des exilés politiques".
Ali Bongo Ondimba, 64 ans, en résidence surveillée depuis le putsch, avait été élu en 2009 à la mort de son père Omar Bongo Ondimba, au pouvoir depuis plus de 41 ans.
Le "patriarche" était aussi l'un des piliers de la "Françafrique", système de cooptation politique, chasses gardées commerciales et corruption entre la France et certaines de ses ex-colonies du continent.
A la sortie du Palais présidentiel, des caciques du pouvoir d'Ali Bongo ont été hués ou salués par une bronca.
- Garde prétorienne -
"Nous ressentons la liberté, la joie, surtout l’espoir d’un avenir meilleur", s'exclame pour l'AFP Lucrèce Mengué, 28 ans, parmi les milliers de personnes massées devant le Palais.
Depuis son coup de force, l'armée, remerciée par la majorité des Gabonais de les avoir "libérés du clan Bongo", refuse de parler de coup d'Etat, préférant évoquer un "acte patriotique" ayant évité un "bain de sang". Aucun mort ni blessé n'a été rapporté.
Le général Oligui a dit lundi son "grand étonnement quand on entend certaines institutions internationales condamner l’acte posé par des soldats qui n’ont fait que respecter leur serment sous le drapeau: sauver la patrie au péril de leur vie".
Selon lui, l'armée a eu "un double choix: soit tuer des Gabonais qui auraient légitimement manifesté, soit mettre fin à un processus électoral manifestement pipé (...), nous avons dit non, plus jamais ça dans notre beau pays, le Gabon".
L'Union africaine, l'Union européenne, l'ONU et beaucoup de capitales occidentales ont condamné le coup d'Etat mais insisté aussi sur une "différence" avec des putschs sur le continent (huit en trois ans) car précédé d'"un coup d'Etat institutionnel", selon le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.
- Corruption -
Le nouvel homme fort de Libreville, qui a rencontré toutes les composantes de la société durant 5 jours, s'est engagé à lutter contre la corruption et la mauvaise gouvernance, redresser l'économie, et redistribuer des richesses aux plus pauvres.
Depuis le coup d'Etat, les télévisions publiques diffusent des images de l'un des fils du président déchu, Noureddin Bongo Valentin, de l'ex-Première dame, sa mère Sylvia, "détenue" arbitrairement et au secret au Gabon selon ses avocats, ainsi que des proches, anciens responsables de la présidence ou du cabinet de Mme Bongo montrés devant des liasses de billets de banque.
Cette "jeune garde" est détenue pour "haute trahison", "détournements massifs de deniers publics" et "falsification de la signature" du chef de l'Etat, selon les putschistes qui accusent des membres de la famille de M. Bongo de l'avoir "manipulé" en profitant des séquelles d'un AVC survenu en 2018.
"On fait des études mais on ne trouve pas de travail, je suis au chômage depuis 5 ans, on nous dit que les caisses sont vides et on finit par trouver tout cet argent chez eux", s'emporte Anouchka Minang, 31 ans, sage-femme, après l'investiture du général Oligui.