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A deux jours de l'annonce officielle des résultats des élections législatives en Inde, des partisans du Premier ministre nationaliste Narendra Modi, déjà convaincus de sa victoire, attendent de son troisième mandat la poursuite de sa politique pro-hindouiste mais aussi une amélioration du niveau de vie.
La ville sacrée de Varanasi (nord) a été samedi l'une des dernières où les Indiens ont voté, à l'issue d'un scrutin marathon de six semaines. C'est dans cette capitale spirituelle de l'hindouisme - aussi appelée Bénarés- que les hindouistes viennent incinérer leurs morts au bord du Gange.
C'est là aussi que s'exprime le plus fortement le soutien à la politique de resserrement des liens entre hindouisme et pouvoir, menée par M. Modi et son parti BJP (Bharatiya Janata Party) depuis 2014 suscitant l'inquiétude de la minorité musulmane forte de plus de 200 millions de personnes.
"Pour nous, il est déjà réélu", lance Bharat Lal Yadav, un serveur de thé âgé de 48 ans, alors que les sondages à la sortie des urnes augurent de la victoire de M. Modi, qui s'est dit confiant "que le peuple d'Inde a voté en nombre record pour réélire le gouvernement".
"Son gouvernement revient", assure Nand Lal, qui vend des fleurs aux dévots hindous devant un temple. "Tout ce que veut Shiva (le dieu hindou de la création et de la destruction, ndlr), Modi le fera" et "il résoudra tout, y compris l'affaire de la mosquée Gyanvapi".
Les hindous affirment que cette mosquée, qui accueille l'une des plus grandes congrégations musulmanes de Varanasi, a été construite au XVIIe siècle sur un sanctuaire dédié au dieu hindou Shiva, pendant l'empire moghol qui a régné sur une grande partie de l'Inde pendant plus de trois siècles.
- "Foi et religion" -
Depuis des années, les musulmans fréquentent la mosquée sous surveillance policière afin d'empêcher que le conflit ne dégénère. Mais fin janvier 2024, un tribunal local a ordonné que le sous-sol de la mosquée soit ouvert aux fidèles hindous. La plus haute cour du pays a refusé de réexaminer la décision en appel.
Peu avant, dans la ville voisine d'Ayodhya, M. Modi avait inauguré un temple construit sur un terrain où se trouvait pendant des siècles la mosquée Babri d'Ayodhya, démolie en 1992 par des fanatiques hindous. L'épisode avait déclenché des émeutes interconfessionnelles parmi les pires de l'histoire de l'Inde indépendante. Plus de 2.000 personnes, musulmanes pour la plupart, avaient péri dans tout le pays.
Pradeep Kumar Gupta, un homme d'affaires de 47 ans, dit avoir voté Modi "pour des raisons de foi et de religion".
"Il a fait de grandes choses pour notre culture", assure-t-il, jugeant que "ce vote portait sur l'Hindutva (projet d'hégémonie hindoue, ndlr) et le peuple a dépassé les questions d'emploi et d'inflation".
"Il peut résoudre ces questions, il peut le faire", renchérit Ramesh Gupta, un commerçant de 55 ans. "Rien n'est impossible pour lui".
- "Le roi" -
Mais même ses plus fervents partisans jugent que M. Modi doit travailler dur pour améliorer l'économie dans un pays qui connaît parmi les croissances les plus rapides dans le monde mais où sévit un chômage chronique.
Yadav, le serveur de thé, voudrait voir l'inflation maîtrisée: "il doit y prêter attention afin que même les gens pauvres puissent économiser quelque chose".
Un vendeur d'objets pieux hindous, Chandrashekhar Sharma, 45 ans, assure n'avoir "aucun doute que Modi revienne". Mais "après son retour, il devra s'attaquer au problème du chômage", ajoute-t-il.
D'autres partisans convaincus du Premier ministre, comme Chedi Ram, âgé de 55 ans, trouvent toutefois inutile de spéculer sur le troisième mandat du Premier ministre.
"Modi est le roi", assure Ram, "quoi que vous pensiez ou disiez, il fera ce qu'il voudra".