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L'un des principaux mis en cause dans le dossier de maltraitances sur des enfants placés dans des familles sans agrément, a réfuté toute violence, préférant le terme de "recadrages", en dépit de récits accablants des victimes, mardi au deuxième jour du procès à Châteauroux.
"Je n'ai jamais été violent envers les jeunes", a répété à la barre Julien M., 44 ans, assurant ne "pas être un animal".
Accusé par plusieurs mineurs de violences physiques - dont des coups de poings et des étranglements -, il a dit avoir seulement effectué des "recadrages" sur des jeunes parfois "difficiles".
"Qu'on me dise que j'ai mis des gifles à un jeune, oui, mais des coups, non jamais", a martelé le prévenu, le teint rougeaud, alternant réponses hésitantes, faites de "je ne sais plus", et froideur déconcertante, durant ses cinq heures d'interrogatoire.
De nombreux épisodes de brutalité ont pourtant été rapportés par les victimes, scènes souvent choquantes et particulièrement douloureuses à entendre.
Comme en mai 2017, lorsque Mathias, âgé de 14 ans, dit avoir été saisi au niveau de la gorge par Julien M., alors fortement alcoolisé. Ce dernier lui aurait baissé le pantalon, avant de lui uriner dessus.
- "Ce n'est pas humain" -
"J'étais ivre et je ne m'en souviens pas. Si je l'ai fait, si je lui ai uriné dessus, je m'en excuse", s'est-il contenté de lancer, en réponse à l'insoutenable.
Une réponse qui a surpris le président de la chambre correctionnelle, Christophe Geoffroy: "Comment, même alcoolisé, un adulte en arrive à uriner sur un enfant ?"
"Ce n'est pas humain", finit-il par lâcher.
Sur le banc des parties civiles, Mathias est en pleurs.
Dans une vidéo glaçante filmée par deux adolescents qui venaient d'être violentés et diffusée mardi à l'audience, Julien M. est aussi accusé par ces deux jeunes d'avoir serré les testicules de l'un d'eux à travers son pantalon. "On s'est fait massacrer", peut-on entendre.
Autre humiliation, celle vécue par un des jeunes, pris par la tête, plongée à hauteur de la cuvette des toilettes et la chasse d'eau tirée, pour ne pas avoir été "assez propre".
Là encore, le prévenu balaie en bloc, malgré le récit de plusieurs témoins.
Face à toutes les accusations de violences, dont un épisode de menace avec un couteau, il a tenu la même ligne de défense, répétant à l'usure pour les minimiser qu'elles n'étaient rien d'autre que des "recadrages".
Julien M. a également rejeté les récits de surdosage médicamenteux.
Par "appât du gain", il a cofondé la structure "Enfance et Bien-Être, à qui des dizaines d'enfants ont été confiés entre 2010 et 2017, contre des sommes qui s'élèveraient à au moins 630.000 euros sur sept ans.
Julien M. n'a pas hésité à se vanter d'un statut "hors-cadre", tandis qu'il est aussi poursuivi pour avoir placé des mineurs dans des hébergements indignes, travail dissimulé en bande organisée et usage de faux.
"Il n'y a aucune recherche de crédibilité", a fustigé Me Jean Sannier, avocat de parties civiles, qui a dénoncé une "amnésie aléatoire".
- "Une ordure" -
L'autre fondateur de la structure, Bruno C., doit être entendu mercredi.
Dans ce procès, dix-huit personnes comparaissent jusqu'à vendredi devant le tribunal correctionnel.
Mais aucun responsable de l'Aide sociale à l'enfance ne sera jugé, en dépit de l'alerte effectuée par un de ses éducateurs et évoquée par le président mardi, concernant un épisode de coups de cravache sur un jeune et un défaut d'agrément.
Durant cette lourde journée pour les victimes, la plupart ont souvent paru effondrées par les déclarations faites à la barre.
Un de ces jeunes préfère, lui, relativiser à la sortie du tribunal. "Je m'en fiche de ce qu'il dit. C'est une ordure qui parle, ce qu'il dit entre par une oreille et ressort par l'autre. "Mais il faut qu'il paye pour ce qu'il a fait. Aucun enfant ne doit revivre ça".