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Un syndicat porte plainte pour du "travail illégal" dans quatre musées dont Le Louvre

Quatre grands musées français dont celui le plus visité au monde, Le Louvre, emploient-ils illégalement de la main d'oeuvre ? C'est l'objet de plaintes déposées cette semaine par le syndicat Sud-Culture, sur fond de critiques de l'externalisation dans le monde de la culture.

Ces plaintes, également évoquées par Libération, ont été transmises par courrier mercredi selon une source proche du dossier à l'AFP.

Outre le musée le plus visité au monde (8,9 millions de visiteurs en 2023), deux autres plaintes déposées à Paris visent la Bourse de commerce-Pinault Collection et le Palais de la Porte Dorée, tandis qu'une plainte cible à Marseille le Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (Mucem).

Contacté, Le Louvre a indiqué n'avoir "aucune information" concernant une telle plainte, et "ne jamais commenter" une éventuelle enquête en cours.

Le Mucem a fourni une longue réponse, indiquant notamment que "le ministère de la Culture a dès le début du projet du Mucem décidé que (des) missions seraient externalisées dans le cadre de marchés publics, comme cela est le cas dans d'autres musées nationaux".

Le musée a indiqué qu'une organisation interne permettait de "s'assurer que les personnels du prestataire ne soient pas subordonnés à un personnel du Mucem" et que les questions de ressources humaines "sont traitées directement par le prestataire", "sans intervention" du Mucem.

La Bourse de commerce - Pinault et le Palais de la Porte Dorée n'ont pas souhaité commenter, et les trois sociétés privées mises en cause n'ont pas répondu à l'AFP.

Le procédé dénoncé est à chaque fois le même : ces musées se voient reprocher d'avoir passé des appels d'offres relatifs à diverses prestations (accueil, médiation en salle, vente, vestiaire, audioguides, etc.) pour lesquelles des sociétés privées mettent à disposition des salariés.

- Salariés externalisés -

Sur le papier, ce prêt de main d'oeuvre est parfaitement légal.

Mais d'après les plaignants, il pose question car "les salariés prêtés se trouvent en réalité subordonnés directement aux équipes" des musées, sont "traités différemment des agents internes" avec des conditions de travail qui seraient moins bonnes, et serait in fine "exclusivement à but lucratif".

Pour les plaignants, "l'objectif affiché" est de libérer les musées "des contraintes de la gestion des tâches logistiques. Ce mécanisme d’externalisation a souvent été mis en place par les Etablissements publics culturels pour pallier aux plafonds d’emploi fixés par les textes budgétaires et le Ministère de la Culture."

"Les effets délétères engendrés par ces pratiques d’externalisation sur les conditions de travail des salariés ont été dénoncés à de nombreuses reprises par la presse", ajoute Sud-Culture.

Dans l'exemple du Louvre, 25 salariés chargés des audioguides auraient d'abord été externalisés en 2019.

"La comparaison de leur situation avec celle des agents restés embauchés par le Musée, tout comme celle des agents des autres prestataires (boutique et surveillance) les plaçait cependant dans des situations de traitement différencié", dit la plainte.

Mais en 2023, toujours d'après les plaignants, c'est cette fois l'ensemble des activités d'accueil et de surveillance du musée abritant la Joconde, soit 65 postes supplémentaires, qui auraient été confiés au privé.

Dans un communiqué de mai 2023, l'équipe des agents d'accueil du MuCEM affirmait par exemple que cette externalisation "dénature nos missions et vide de sens notre travail", avec une "multiplication des démissions, arrêts de travail, burn outs et accidents de travail", et appelaient leur direction à "internaliser" les postes en question.

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Ludovic MARIN

Sud-Culture souligne lui que cette "externalisation est une pratique qui touche massivement les établissements culturels depuis plusieurs années : le Centre Pompidou-Metz (2010), le Louvre-Lens (2012), le Palais de Tokyo (2012), le MuCEM (2013) la Fondation Louis Vuitton (2014), etc."

"L’engagement de ces actions judiciaires vise à faire en sorte que la justice se saisisse enfin de ce contournement illégal des textes et des plafonds d’emploi par les musées et leurs co-contractants" ont commenté pour l'AFP les avocats des plaignants, Me Thibault Laforcade, Juliette Bourgeois et Lucie Marius.

"C’est aussi une façon pour les salariés du milieu de la culture, qui subissent une précarisation de plus en plus dure, de dire dignement que cela doit cesser car les répercussions sur leur quotidien sont devenues intenables", d'après eux.

En parallèle, les avocats ont indiqué avoir également saisi l'Inspection du travail.

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