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Suite aux accusations contre l'Abbé Pierre, plusieurs rues et écoles de France vont changer de nom

Après les révélations d'agressions sexuelles visant l'abbé Pierre, de nombreuses villes s'apprêtent à débaptiser les lieux nommés en hommage à l'ancienne icône de la lutte contre le mal-logement.

Il est loin le temps, en 2007, où le Figaro titrait, quelques mois après la mort du prêtre : "toute la France veut sa rue Abbé-Pierre". L'homme d'Église est depuis juillet visé par des accusations de violences sexuelles, avec vendredi une nouvelle salve de témoignages sur des faits pouvant pour certains s'apparenter à des viols ou concernant des mineures. Depuis beaucoup ont pris leurs distances avec un nom devenu sulfureux.

La fondation Abbé Pierre a annoncé dès vendredi qu'elle allait changer de nom, et fermer définitivement le lieu de mémoire situé à Esteville (Seine-Maritime). L'école du village, qui porte également le nom du prêtre, devrait aussi être débaptisée.

En France 150 voies ou lieux-dits sont nommés Abbé-Pierre ou Henri Grouès (son nom de naissance), selon un décompte de l'AFP à partir de la base nationale des adresses. Mais le nombre risque de diminuer. Une mesure "très sage", car "le nom de l'abbé Pierre est sali et ne peut plus être proposé comme modèle", estime Véronique Fayet, ancienne présidente du Secours catholique, dans La Croix mercredi.

L'historien Mathieu da Vinha rappelle dans le même article qu'on parle, avec ces accusations, de faits punis par la loi à l'époque : "en dépit de l'action de l'abbé Pierre en faveur des plus pauvres et des mal-logés, très clairement, ce seul critère juridique conduit à retirer son nom de l'espace public".

La Ville de Nancy a annoncé lundi le prochain retrait d'une plaque commémorative posée à l'ancienne adresse parlementaire de l'abbé Pierre, qui fut député de Meurthe-et-Moselle de 1945 à 1951. "La parole des victimes, femmes et enfants, doit être prioritairement entendue, respectée et soutenue", explique la municipalité.

"Crève-coeur"

À Paris, et "de manière exceptionnelle", la ville "souhaite débaptiser le jardin des Grands Moulins" portant le nom de l'abbé Pierre. À Lyon, c'est la "fresque des Lyonnais", un trompe-l'œil représentant des Lyonnais célèbres, qui fait tiquer. La fresque est une propriété privée, ce qui complique toute décision, mais un débat est engagé, explique-t-on à la mairie.

La ville de Besançon va, elle, "très prochainement" retirer son nom de l'abri de nuit proche du parc des Glacis. La question se pose également dans des villes plus petites.

Le maire de Grande-Synthe (Nord) va proposer au Conseil municipal de changer le nom de la place Abbé-Pierre, car "la lutte contre les violences faites aux femmes est une priorité pour notre ville". À Talant (Côte-d'Or) aussi le maire compte "ouvrir une réflexion" quant à la dénomination de la place portant son nom, en centre-ville.

Dans la banlieue de Pau, le village Emmaüs Lescar souhaite lui retirer une sculpture de six mètres de haut représentant un visage stylisé d'Henri Grouès, à l'entrée de la communauté, et enlever en interne les représentations de l'abbé Pierre. "On ne peut pas cautionner les souffrances qu'il a infligées aux femmes et aux enfants", a expliqué à la République des Pyrénées Germain Sarhy, le fondateur du site.

À Hédé-Bazouges (Ile-et-Vilaine) c'est l'école primaire qui va changer de nom. "J'en avais parlé avec la direction diocésaine fin août. Après les dernières révélations, il n'y a plus à s'interroger", explique à l'AFP la cheffe d'établissement Florina Loisel, qui assure que les parents, actuellement mis au courant, accueillent positivement cette décision.

Même démarche au lycée privé Abbé-Pierre de Tinténiac (Ille-et-Vilaine): "ça ne faisait pas l'ombre d'un doute", affirme le chef d'établissement Raphaël Gouablin.

À Cysoing (Nord), on réfléchit à renommer une salle communale. "C'est un crève-coeur, mais aujourd'hui, on pense surtout aux victimes", affirme à l'AFP le maire Benjamin Dumortier. "Imaginez, vous louez une salle, et elle se nomme Abbé Pierre alors que vous êtes une victime ? Ça peut être problématique...".

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