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L'hypothèse d'une hausse d'impôts fait frémir la macronie et divise ailleurs

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Ludovic MARIN

La fin d'un totem? Après sept années de baisses d'impôts, Michel Barnier a fait sursauter certains de ses interlocuteurs macronistes en évoquant une hausse des prélèvements, au nom d'une situation budgétaire étouffante mais au risque de se priver de soutiens dans sa propre famille politique.

Emmanuel Macron en avait fait une de ses marques de fabrique, revendiquant 50 milliards d'euros de baisses d'impôts depuis 2017 pour les entreprises (l'impôt sur les sociétés a, par exemple, été baissé de 33,3% à 25%) ou les ménages (suppression de la taxe d'habitation, transformation de l'impôt sur la fortune ou prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital).

Mais ce quasi-dogme est en passe d'être remis en cause par le déficit public qui pourrait se creuser à 5,6% du PIB cette année, voire 6,2% en 2025, laissant le nouveau Premier ministre face à une délicate équation budgétaire.

Celui-ci avait déjà laissé entrevoir une inflexion lors de sa première interview télévisée le 6 septembre, au lendemain de sa nomination. "Les Français ont envie et besoin de justice" fiscale, avait-il glissé.

Si l'hypothèse, au stade embryonnaire, n'est pas nouvelle, elle a trouvé une seconde vie mardi en agitant la réunion des députés macronistes, où Gérald Darmanin a allumé la mèche, selon Le Parisien.

D'après le ministre de l'Intérieur démissionnaire, M. Barnier a abordé à plusieurs reprises - y compris devant lui - la piste d'une augmentation d'impôts, sans toutefois préciser ses intentions.

Une version corroborée par un autre interlocuteur récent du Premier ministre au sein du camp présidentiel, qui confirme avoir entendu M. Barnier évoquer des augmentations d'impôts "sur les hauts revenus". De quoi inciter le patron du groupe de députés macronistes à réclamer un rendez-vous à M. Barnier qui devrait se tenir mercredi matin, afin d'obtenir des éclaircissements.

"Des on-dit", rétorque l'entourage du Premier ministre, renvoyant aux mots exacts de son interview. "Les rumeurs sur la fiscalité sont de pures spéculations. Le Premier ministre analyse la situation budgétaire et aucune option n’est aujourd'hui arrêtée", insiste-t-on de même source.

Car M. Barnier, qui n'a toujours pas constitué de gouvernement et n'a qu'une coalition précaire derrière lui à l'Assemblée, évolue sur le fil du rasoir, parmi des lignes rouges parfois fluctuantes.

"Nous voulons une stabilité fiscale et ne pas remettre en cause ce qui a permis de baisser le chômage et d’augmenter l’attractivité de notre pays. Revenir là-dessus serait une terrible erreur", résume le député macroniste Jean-René Cazeneuve, tout en se disant "ouvert" à des "augmentations très ciblées" et "ponctuelles", comme celle qui a visé les autoroutes.

- Les LR partagés -

Le camp présidentiel s'était lui-même à plusieurs reprises divisé autour de la taxation des superprofits, poussée en particulier par le MoDem. Et la thématique de "justice fiscale" pourrait rencontrer un écho chez certains élus de ce bloc.

En revanche, la possibilité de toucher à l'impôt sur les sociétés, évoquée notamment par L'Opinion, devrait rencontrer une ferme opposition dans une ancienne majorité à la sensibilité pro-entreprise.

Au sein des Républicains, dont est issu M. Barnier, le cap est en théorie très ferme. "Notre conviction, c'est que sur un certain nombre de domaines, on a besoin d'une politique de droite", qui ne comprend "pas de hausse d'impôts", a ainsi réaffirmé la semaine passée le patron des députés LR Laurent Wauquiez.

Mais cette intransigeance serait avant tout dirigée contre des retouches à "l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés", décrypte un député LR. Pour lui, le Premier ministre vise avant tout la taxation "des surprofits" et des "très riches". Et "là-dessus, côté LR, il y a zéro problème", veut-il croire.

Le Rassemblement national, qui souffle le chaud et le froid, a exposé les conditions de son appui par la voix du député Jean-Philippe Tanguy sur BFMTV: "Si c'est une mesure de justice fiscale, c'est-à-dire qu'on impose davantage les plus privilégiés et les surprofits de certaines multinationales en échange d'une baisse de la pression fiscale qui est très forte sur les classes moyennes et les classes populaires (...), là M. Barnier aura notre soutien."

Le Premier ministre pourrait-il trouver des appuis à gauche ? "Ça dépendra des détails: combien et surtout pour qui", a éludé la députée PS Christine Pirès Beaune.

"Ça ouvre l'appétit", a résumé mardi, en sortant d'un rendez-vous avec M. Barnier, le leader communiste Fabien Roussel.

Quant au gouverneur de la Banque de France, il a suggéré mardi "un effort" fiscal "exceptionnel et raisonnable sur certaines grandes entreprises et gros contribuables". "Tant qu'on n'est pas revenu sous 3%" de déficit public, a prôné François Villeroy de Galhau dans une interview au Parisien.

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