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Alors que l'Elysée promet d'"aller vite" pour choisir enfin un Premier ministre après 45 jours de crise politique, l'hypothèse Cazeneuve continue d'agiter la gauche, à l'image du Parti socialiste, plus que jamais traversé par des divergences de stratégies.
A l'attentisme au sein de l'exécutif, un mois et demi après la démission du gouvernement Attal, s'est ajoutée une résurgence des tensions au PS, au deuxième jour de ses journées d'été à Blois, où les deux courants minoritaires du parti ont annoncé qu'ils s'alliaient pour essayer de faire pression sur Olivier Faure.
Alors que le Premier secrétaire a refusé de retourner discuter à l'Elysée, après que le chef de l'Etat a écarté la candidate du Nouveau Front populaire Lucie Castets, ses opposants réclament d'être "constructifs", et de ne pas fermer la porte à de nouvelles discussions avec Emmanuel Macron, afin de former "un gouvernement qui portent des politiques de gauche".
Ils s'affirment ainsi "majoritaires auprès des militants" - mais pas dans les instances du parti - et demandent que le PS "tienne désormais la ligne que nous tenons", a expliqué à l'AFP l'un des opposants, le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol.
"On doit créer une majorité de non censure", a aussi demandé devant la presse la présidente d'Occitanie Carole Delga, tandis que la maire de Vaulx-en-Velin Hélène Geoffroy a déploré que la direction ait "choisi la stratégie de LFI en choisissant le bruit et la fureur".
Parmi eux, se trouve aussi Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen et figure montante du PS dont le profil a retenu l'attention de l'Elysée.
Sur TF1, il s'est dit "en capacité" de devenir Premier ministre en construisant des "compromis".
Mais les spéculations se concentrent surtout sur Bernard Cazeneuve, l'ancien chef du gouvernement de François Hollande, qui a quitté le PS en 2022.
Depuis la Serbie, où il a effectué 24 heures de visite entre jeudi et vendredi, Emmanuel Macron a assuré faire "tous les efforts (...) pour aboutir à la meilleure solution pour le pays", et promis qu'il parlerait aux Français en temps voulu".
- Décision imminente ? -
Une décision pourrait tomber avant la fin du week-end ou en début de semaine, laissent filtrer des sources dans son entourage.
Bernard Cazeneuve, qui devait participer samedi en Saône-et-Loire aux universités d'été du "Laboratoire de la République" de l'ancien ministre macroniste Jean-Michel Blanquer, s'est désisté. Elémentaire réserve avant une possible nomination ?
L'ancien socialiste est regardé avec bienveillance par les opposants d'Olivier Faure, mais ce dernier refuse que le PS puisse soutenir quelqu'un qui serait "l'obligé" du président de la République, et défend toujours la candidature de Lucie Castets.
Celle-ci, arrivée sous les acclamations à Blois, a assuré, lors d'un meeting en fin de journée, qu'Emmanuel Macron "veut bien accepter que la gauche accède aux responsabilités, mais à une condition, qu'elle cesse d'être la gauche".
Au sein du parti tout le monde s'accorde pour censurer une ligne qui serait la prolongation du macronisme.
- "la poutre est en train de bouger" -
En revanche, "s'il y a un gouvernement avec une personnalité, de gauche par exemple, qui ferait une politique que nous souhaitons (...) nous serons là, pour à chaque fois que ça va dans le bon sens, le voter", assure le sénateur Rachid Temal, proche d'Hélène Geoffroy.
Pour Olivier Faure, si les 66 députés socialistes choisissaient de soutenir un autre gouvernement que celui du NFP, ils seraient "minoritaires dans un gouvernement de droite". "Si vous allez avec la droite, vous serez la droite", a-t-il dit au meeting.
La piste Cazeneuve, en tout cas, fait bondir la gauche de la gauche.
Au meeting socialiste, l'ex-insoumise Clémentine Autain a taclé "ceux qui auraient la bonne idée d'accepter d'être Premier ministre sans accord du NFP, et créeraient une crise chez vous".
Et la cheffe de file des députés insoumis Mathilde Panot, a assuré que LFI voterait "une censure contre M. Cazeneuve" et ferait "des motions de censure contre tout gouvernement qui ne serait pas dirigé par Lucie Castets".
Du côté du Rassemblement national (RN), qui dispose du premier groupe à l'Assemblée nationale,"il n'y aura pas une censure de principe", a dit sur LCI le porte-parole du parti, Laurent Jacobelli".
A droite, l'ex-président Nicolas Sarkozy a appelé dans le Figaro les Républicains à œuvrer pour "faire nommer un Premier ministre de droite", estimant que Bernard Cazeneuve n'était pas "en adéquation avec le centre de gravité de la politique française"